L'occasion de ce parcours a été une balade faite pour la librairie l'Arbre à lettres Bastille 62, rue du Faubourg Saint- Antoine, 12e.
- L’hôtel des Mousquetaires noirs. 532 propriétaires ou principaux locataires du faubourg Saint-Antoine devaient fournir jusque-là 810 chambres pour le logement de la seconde compagnie des mousquetaires. La construction de la caserne, entre 1700 et 1704, les libérera de cette servitude, désormais remplacée par une taxe. Le bâtiment principal était à peu près parallèle à la rue de Charenton, 2 ailes faisaient retour vers celle-ci, celle de droite venant coller au portail de la chapelle (on y entrait par la caserne). Entre les 2 ailes : la cour d’honneur. Du pavillon d’entrée actuel partaient en hémicycle concave les murs de clôture. Une deuxième cour, derrière la première était entourée par les écuries. Les 2 étages sur rez-de-chaussée (plus combles mansardés) abritaient 329 chambres, 14 antichambres (pour les officiers et l’aumônier), 1 salle de billard. Les mousquetaires logeaient à 2 par chambre avec une chambre adjacente pour leurs valets.
- L’hôtel des Mousquetaires noirs. 532 propriétaires ou principaux locataires du faubourg Saint-Antoine devaient fournir jusque-là 810 chambres pour le logement de la seconde compagnie des mousquetaires. La construction de la caserne, entre 1700 et 1704, les libérera de cette servitude, désormais remplacée par une taxe. Le bâtiment principal était à peu près parallèle à la rue de Charenton, 2 ailes faisaient retour vers celle-ci, celle de droite venant coller au portail de la chapelle (on y entrait par la caserne). Entre les 2 ailes : la cour d’honneur. Du pavillon d’entrée actuel partaient en hémicycle concave les murs de clôture. Une deuxième cour, derrière la première était entourée par les écuries. Les 2 étages sur rez-de-chaussée (plus combles mansardés) abritaient 329 chambres, 14 antichambres (pour les officiers et l’aumônier), 1 salle de billard. Les mousquetaires logeaient à 2 par chambre avec une chambre adjacente pour leurs valets.
Louis XVI décide de la
suppression des compagnies de mousquetaires fin 1775. L’hôtel se vide l’année
suivante. Avec l’arrivée des Quinze-vingts en 1780, les auberges des mousquetaires, (au n°26) sont
transformées en logements pour les directeurs. La longueur de la chapelle est
doublée par l’annexion de 3 travées de l’aile droite de l’hôtel, parce qu’elle
devient alors chapelle paroissiale : les fidèles du quartier entrent
maintenant par l’extérieur et restent au rez-de-chaussée; les pensionnaires
entrent par l’étage du bâtiment, une tribune ayant été construite à leur
intention. Stalles et tabernacle sont refaits. Deux nouvelles chapelles sont
édifiées, consacrées à St-Jean baptiste et St-Joseph, les vitraux représentant
ces derniers étant rapatriés des Quinze-Vingts de la rue St-Honoré, avec ceux
de St-Louis et de St-Rémy auxquels le maître hôtel est dédié ; un vitrail
de la vierge également.
Dès 1785, les écuries ont été
mises en location et transformées en ateliers : polissage de diamants,
d’acier, manufacture de tabac. La chapelle est fermée en 1793, échoit à un
marchand de charbon, est restaurée en 1799, rendue au culte à l’Empire : Pie VII
y passe en 1805. Dans les anciennes écuries (hauteur du n°17 rue Moreau), Nicolas
Appert a ses ateliers de 1820 environ à 1828. En 1848, c’est au presbytère
des Quinze-Vingts qu’est conduit Mgr Affre après qu’il a été
mortellement blessé à la hauteur du 4, rue du fbg Saint-Antoine « par une
balle perdue ». L’archevêque de Paris était venu, le 25 juin 1848, à 16
heures, en rentrant par l’immeuble de la Tour d’Argent, 2, rue de Charenton, s’interposer
entre la troupe et la barricade.
La construction du chemin de fer
de Vincennes en 1858, son élargissement en 1877, amènent la destruction des
anciennes écuries. En 1956, il est question de tout raser du n°24 au n°34 de la
rue de Charenton sans compter tout le côté impair de la rue Moreau, où serait
reconstruit le portail classé. La suppression de la gare de la Bastille, la
réorganisation prévue de la place s’opposent à l’extension à l’Ouest du projet.
La chapelle, les anciennes auberges des mousquetaires (n°26) et le joli
pavillon d’entrée sont sauvés. Classés MH : conciergerie ; chapelle ;
chœur ; abside et les deux travées droites de la chapelle. Le portail porte la
marque du niveau de la crue de 1740. Sur une pierre du piédroit, on distingue
le N°6 de la numérotation de 1724.
On prend à gauche
- 35, rue de Charenton,
PLU : Bâtiment sur rue en retrait sur l'alignement ancien, présentant une
façade pouvant être daté vers 1845-1855, composée de trois travées et élevée de
quatre étages carrés sur rez-de-chaussée. Un fronton triangulaire orne la
fenêtre centrale du premier étage à l'aplomb de la porte. Sur cour, la façade
arrière présente des modénatures néo-gothiques (baies en lancettes) avec
vestige de vitraux. Le bâtiment situé en fond de cour, comptant quatre étages
sur rez-de-chaussée, présente un aspect vers 1840. Il conserve un bel escalier
seconde moitié XVIIIe à limon tournant
orné d'une rampe en fer forgé à motif de serlienne. Des bâtiments résiduels, fin
XIXe, à usage d'ateliers et de remise occupent la cour. L'ensemble est
remarquable par sa diversité. La façade sur cour du bâtiment sur rue arbore une
écriture néo-vénitienne exceptionnelle probablement sans équivalent dans
l'architecture parisienne. (source : inventaire général, 1986)
Au-delà, du n°25 au n°1, tous les
immeubles, dont la façade principale donne sur la rue du Fbg St-Antoine, sont
PLU. Ils s’échelonnent de la mi-18e siècle (n°17, 15) à la mi-19e
(n°5). Les plus anciens sont les 23 et 25, qui datent de 1682 avec réfection,
pour le 23, dans les premières années 1760. On en distinguera le n°7 (et n°8 du
Fbg St-Antoine) parce que ce fut la maison de Théodore Pépin, épicier républicain, né en 1800, membre de la
Société des Droits de l’Homme, complice de Fieschi
dans l’attentat à la machine infernale dirigé contre Louis-Philippe en 1835. L’argotique
« pépin » pour désigner le parapluie viendrait de son nom (il ne se
séparait jamais du sien) si l’on en croit certains dictionnaires de la langue
verte.
- 43 rue de Charenton : Première parcelle à cour régulière depuis la pointe de l'îlot sur la place de la Bastille. La surélévation de l'un des bâtiments sur rue est spectaculaire. Elle témoigne de ce que le facteur de sédimentation architecturale peut apporter à la ligne de ciel et au rythme des alignements sur rue. Cette surélévation, menée en deux étapes au moins, concerne l'un des bâtiments les plus anciens du faubourg Saint-Antoine, comme en témoigne l'escalier, d'une exceptionnelle qualité monumentale (volées droites et rampe à balustres carrés datable du milieu du XVIIe siècle). PLU
- 45 rue de Charenton :
Cour caractéristique du faubourg comprenant deux bâtiments particulièrement
remarquables : en fond de cour, un pavillon d'habitation d'un étage carré sur
rez-de-chaussée présentant un aspect du milieu du XVIIIe siècle et sur l'aile
droite un bâtiment d'ateliers comprenant trois étages sur rez-de-chaussée à
structure en bois apparente et remplissage moellon ou brique pouvant être daté
fin XIXe. PLU
- le n°32, asile temporaire,
annexe de l’hôpital des Quinze-Vingts est de 1885, il fait un angle très
aigu.
- le n°34, rue de Charenton,
qui fait le coin avec la rue Moreau, est de 1882.
poursuivre jusqu’à la cour du chêne vert
- Cour du Chêne Vert. Sur l’emplacement du couvent des Filles
anglaises, de 1672, qui s’étendait jusqu’à la rue Moreau. PLU : Parcelle
industrielle caractéristique du faubourg composée de bâtiments à usage mixte
édifiés vers 1890. Constructions utilisant le métal, le bois et la brique
enduite. Les deux premiers bâtiments hébergeant des ateliers de part et d'autre
de la cour, comptent trois étages sur rez-de-chaussée. L'intérêt de cet
ensemble réside dans la perspective créée au débouché de la rue Saint-Nicolas,
grâce à l'ouverture de la cour sur la rue et grâce aux façades, visibles depuis
la rue, qui se développent dans la profondeur de la cour.
En face : angle St-Nicolas /
Charenton, PLU : Le bâtiment principal, situé à l'angle de deux rues, est
élevé de trois étages carrés sur rez-de-chaussée. Il comporte un escalier à
volées droites et une rampe à balustres ronds vers 1700. Le bâtiment sur cour,
d'un étage sur rez-de-chaussée, pouvant être daté vers 1760, présente des
garde-corps en fer forgé remarquables. L'irrégularité de la modénature et le
fruit de la façade sur rue laissent deviner l'ancienneté du bâtiment. Celui-ci
a fait probablement l'objet d'une reprise, comme l'indique la disparité entre
la date estimée de l'escalier (vers 1700) et celle de la façade (vers 1840).
Avec l'ajout de fontes décoratives vers 1870, le bâtiment est doté d'une valeur
de sédimentation architecturale d'autant plus élevée que la parcelle est
petite. La qualité monumentale de la façade sur rue, néoclassique tardive (le
chanfreinage de la façade à l'angle indique une sensibilité pré
haussmannienne), des ferronneries du bâtiment sur cour et de l'escalier du bâtiment
sur rue, ainsi que la position urbaine remarquable de celui-ci, font de cette
parcelle l'une des plus caractéristiques du faubourg Saint-Antoine.
-10, rue St-Nicolas Au 10, ancien
hôtel qui possède sur sa façade un joli
cartouche sculpté orné de roses portant "Germain
Ciseleur" quand le voit Rochegude et aujourd'hui "Carré St-Nicolas".
On revient sur nos pas jusqu’à la
rue Moreau :
- 20, rue Moreau (ex rue des
Filles-Anglaises), PLU : Immeuble sur rue présentant une façade élevée
vers 1890 comprenant quatre étages sur rez-de-chaussée en brique, métal et
meulière. Sur cour, deux corps d'ateliers remarquables d'époque similaire avec
une structure en bois apparente et remplissage de brique. Bâtiments industriels
d'une grande unité monumentale et d'une facture architecturale caractéristique
de l'architecture industrielle du tournant du siècle. La parcelle a été
investie de manière synchronique.
Dans les anciennes écuries de la
Caserne des Mousquetaires, (hauteur du n°17 rue Moreau), Nicolas Appert, on l’a
vu, a ses ateliers de 1820 environ à 1828.
Au 12, rue Moreau, vers 1850, s'installent les frères Cochot, fils de l'inventeur (Jean-Baptiste était au 123, rue du Fbg-St-Antoine) de la navigation à vapeur sur la haute Seine (de Melun à Paris) avec son Parisien, dont les versions 4 et 5 vont voguer sur le Rhône.
Au 12, rue Moreau, vers 1850, s'installent les frères Cochot, fils de l'inventeur (Jean-Baptiste était au 123, rue du Fbg-St-Antoine) de la navigation à vapeur sur la haute Seine (de Melun à Paris) avec son Parisien, dont les versions 4 et 5 vont voguer sur le Rhône.
On va jusqu’au départ du Viaduc des Arts. On s’étonne qu’on
n’ait pas su faire une entrée de la promenade plantée plus attrayante !
Le chemin de fer de Vincennes a été inauguré le 22 septembre 1859, de
Paris à la Varenne Saint-Maur. La guerre de 1870 en interrompt les travaux et
ce n’est qu’en 1875 qu’il atteint Brie Comte Robert. En 1900, il rejoint
Verneuil l’Étang où il se raccorde à la grande ligne de Belfort et Mulhouse.
Mais ce sont évidemment les destinations de Vincennes, Nogent, Joinville, Champigny,
La Varenne, Chennevières, ou encore Boissy-St-Léger qui font son succès. Le
dimanche, malgré sa fréquence très importante, ses 24 voitures sont toujours
bondées. Voir Nogent eldorado du dimanche, de Marcel Carné.
En face, au 55, rue de Lyon (rue
ouverte en 1847), dans un bel immeuble d'E. Rigaud, de 1922, portant les attributs du Mercure du Commerce et la roue d'engrenage de l'Industrie, siège Paris Métropole, créé en 2009, "syndicat mixte d’études ouvert aux
partenaires privés (CCI), qui rassemble désormais 188 communes d’Ile-de-France
ainsi que les départements et le Conseil régional d’Île-de-France".
- Écoutons Vielé-Griffin, poète symboliste de 20 ans le cadet de Verlaine, qui vient visiter son aîné :
« Dépassant donc la Bastille, lieu encore lointain à cette époque
pré-métropolitaine, nous suivîmes le viaduc du chemin de fer de Vincennes, sous
les arcades duquel se blottissent encore des boutiques et des habitations
cintrées d’entresol. Mais voici qu’une voûte s’ouvre, donnant accès à une
rue ; nos indications s’en confirment ; hardiment nous franchissons
l’humble arc de triomphe et, curieux bien que peu rassurés, nous tournons sans
hésiter à gauche pour nous trouver dans une grande cour aux larges pavés gras
de lessive et de déchets alimentaires… un lavoir laissait échapper la vapeur de
son essoreuse et des gaillardes aux manches retroussées vidaient à même le
ruisseau leurs baquets d’eau bleue… bientôt nous voici reçus par le poète. Une
chambre de rez-de-chaussée, triste et nue : deux chaises ; une table
devant la fenêtre sans rideaux portait des livres, parmi lesquels nous
reconnûmes, non sans émotion, nos premières plaquettes ; un lit, à rideaux
de lustrine verte, faisait face à la fenêtre et, l’œil fixe vers la cheminée
sans glace où s’accumulaient brochures et journaux, un mauvais portrait de
Verlaine, toile nue et sans cadre, pendait à un clou. C’était sinistre. » Ça s’appelle l’hôtel du Midi, maison plus ou moins de passes, au n°6 de la cour Saint-François qui ouvre au n°5 de
la rue Moreau ; et la chambre est une espèce d’arrière salle de la buvette
du marchand de vins qu’il faut traverser pour y accéder. Verlaine est venu y
habiter le 15 mai 1885, 2 ans après son départ du 17 rue de la Roquette.
En octobre, il reçoit ici de Mallarmé, une enveloppe sur laquelle
figure ce quatrain :
Tapi sous ton chaud macfarlane
Ce billet, quand tu le reçois
Lis-le haut ; 6 cour Saint-François
Rue, est-ce Moreau ? cher Verlaine.
Et la lettre arrivée à bon port,
Mallarmé suit.
A l’hiver, Verlaine a la jambe
dans une gouttière, plâtrée, et sa mère qui le veille jour et nuit en attrape
une pneumonie. Le 21 janvier 1886, elle meurt dans une chambre du 1er étage.
L’escalier est trop étroit pour qu’on puisse monter Verlaine sur une civière
afin qu’il lui donne un dernier baiser. De la même façon, le cercueil sera
descendu par la fenêtre, Verlaine ne l’a pas revue et ne sera pas à la messe
d’enterrement qui est dite dans la chapelle des Quinze-Vingts. Il va rester là
encore un an ou un an et demi après quoi il sera plus souvent à l’hôpital que
n’importe ou ailleurs : 20 séjours en 10 ans. Pour Verlaine, voir d’Alain Buisine, Verlaine Histoire d’un corps,
Tallandier, 1995.
On fait demi-tour pour emprunter
la voûte suivante, celle de l’avenue Ledru-Rollin (ouverte dès 1806, ne prendra
ce nom qu’en 1879). Au n°64, PLU : Ensemble construit vers 1880-1890 autour
d'une cour rectangulaire, sur une parcelle traversante. Il s'ouvre avenue Ledru
Rollin par un immeuble de rapport en pierre de taille et brique adroitement
composé et signé “P. Flanet, architecte 1891”. A l'arrière, sur cour, se
développent symétriquement des ateliers en pierre, brique et métal élevés de
trois étages sur rez-de-chaussée. Une verrière à structure métal en tiers-point
abrite une partie de la cour. Celle-ci se clôt, côté rue Traversière, par un
immeuble présentant une façade composée symétriquement de sept travées autour
d'un porche monumental en plein cintre (n°55 : passage de la Trôle) et élevée de quatre étages carrés sur
rez-de-chaussée. Les modénatures sont très sobres (chaînes de
refends, bandeaux et moulurations autour des baies). L'une des parcelles
polyvalentes habitat-industrie-commerce les plus caractéristiques du faubourg
pour la régularité de l'espace et de l'esthétique (verrière) de la cour. (On
traversera l’église pour voir l’envers de la parcelle au 55.)
Eglise Saint-Antoine-des-Quinze-Vingt
élevée pour le compte de la Ville de Paris par l'architecte Lucien-Robert Roy
sur les plans d'Emile Vaudremer et Paul Bichoff entre 1902 et 1904. La
conception de cette église emprunte beaucoup aux œuvres majeures de Vaudremer :
Saint-Pierre de Montrouge, Notre-Dame d'Auteuil et surtout l'église grecque de
la rue Bizet. Elle offre un bel exemple de juxtaposition du style néo-roman et
de techniques nouvelles. Le clocher aligné sur l'église est désaxé par rapport
à la rue. Cette tour de style roman, flanquée d'un escalier en
échauguette, domine le mur en brique animé par une horloge en fer de
grande taille. A l'intérieur, les structures reproduisent fidèlement les
arcades en plein cintre, les chapiteaux et les lourds piliers des églises
romanes. Mais une large verrière au-dessus du transept, la forme incurvée des
tribunes, l'usage systématique du fer forgé, le décor en grès de Bigot des
autels sont autant de signes de modernité. Œuvre posthume, réalisée assez
fidèlement par un disciple, Saint-Antoine-des-Quinze-Vingt révèle l'attirance
de Vaudremer, dans les dernières années de sa vie, pour le pittoresque et
l'asymétrie.
L’orgue en fut construit par le
fameux facteur d’orgues, Aristide
Cavaillé-Coll, en 1894, pour le Baron de l’Épée, riche amateur de musique
qui désirait jouer chez lui, dans le vaste auditorium qu’il avait fait aménager
55, avenue des Champs-Élysées, de la musique de Richard Wagner. Avec ses 2800
tuyaux, dont le plus grave mesure plus de 5 m. de haut, l’instrument possède la
puissance des cuivres wagnériens jointe à la subtilité des cordes et des bois.
Lorsque
Cavaillé-Coll disparaît en 1899, l’église Saint-Antoine est déjà en projet. En
1907, le Comte Christian de Bertier de Sauvigny rachète au Baron de l’Épée le
grand orgue de son salon de musique et décide de le faire installer dans
l’église Saint Antoine.
On a traversé
l’église pour arriver rue… Traversière. Au 57, arrière et entrée de la crypte
de St-Antoine des 15-20.
C’était ici un petit coin
d’Auvergne : des parents aveyronnais, chaque samedi, de 14 à 15h, y
conduisent leurs enfants, à partir de trois ans, aux leçons de bourrée
longtemps données par Raymonde Raynaldy.
Cette personnalité du folklore rouergat a dirigé pendant près de quinze ans,
les cours hebdomadaires dans les locaux de la paroisse Saint-Antoine. Les
positions et les voltes sont enseignées depuis par Régine Raynaldy, fille de Raymonde, qui a elle-même fondé son
propre orchestre, partie intégrante de La
Bourrée Montagnarde fondée en 1927.
38, rue
Traversière : École de trait puis librairie ouvrière créées par Agricol Perdiguier en 1856.
Aujourd’hui, belle enseigne de l’ébéniste restaurateur Didier Maulet.
En traversant la
rue de Charenton, on voit, à la pointe 2, rue Emilio
Castelar / 85, rue de Charenton : Boulangerie aménagée en rez-de-chaussée
d'un immeuble d'angle construit en 1906. La devanture comporte des panneaux
peints fixés sous verre, signés de T. Luc et représentant des scènes de
moisson. A l'intérieur, les murs sont recouverts de carreaux de céramique,
agrémentés d'une frise de fleurs stylisées. Inscrite MH
Le groupe HBM de
la fondation Rothschild (8 rue de Prague – 7 rue Théophile Roussel – 3
rue Charles Baudelaire – 9 rue Emilio Castelar, toutes rues ouvertes sur
l’emplacement de l’ex hôpital Trousseau) a été réalisé par Nénot, l’architecte de la nouvelle Sorbonne
et achevé en 1909 ; PLU. Cet ensemble est la réalisation la plus
emblématique de la fondation Rothschild, et le concours d'architecture dont il
est le fruit en 1905, à l'Hôtel de Ville, constitue un brillant résumé de
l'architecture hygiéniste. Parmi les 127 concurrents ayant remis des esquisses,
se distinguent les projets de Tony Garnier (le plus radicalement novateur),
celui du lauréat Augustin Rey, d'Henry Provensal (classé second), de
Ventre et Majou (encore étudiants). Le projet réalisé se démarque toutefois
fortement du projet d'Augustin Rey. Après la démission de ce dernier, les plans
définitifs sont établis par Nénot en 1907. L'alignement sur rue, brisé par Rey,
y reprend tous ses droits, les cours n'étant ouvertes sur la rue que par des
brèches. Même revu dans un sens plus académique, le groupe reste une référence,
dans la mesure où il concrétise toutes les théories et rassemble tous les
objets techniques propres au logement populaire. C'est aussi un village où tout
est prévu pour une vie en quasi-autarcie grâce à une palette d'équipements et
une école où des ouvriers enlevés à leur taudis, viennent apprendre à habiter
dans les meilleures conditions possibles. Le groupe
de la fondation Rothschild a été visité le 2 décembre 1909 par le roi Manuel II
du Portugal, signale Rochegude.
Entre la rue Traversière et la rue de Cotte s’étendait donc,
(entrée au 89, rue de Charenton dans la numérotation de l’époque) l’hôpital
Ste-Eugénie ouvert en 1854 avec 425 lits pour les enfants de 2 à 14 ans. Il était
devenu hôpital Trousseau en 1880 et serait démoli à la fin du 19ème
siècle. (Il succédait ici à l’hôpital Ste-Marguerite qui avait lui-même
remplacé l’hospice des Orphelins de 1674, créé par la chancelière d’Aligre et
la reine Marie-Thérèse, sur des terrains rachetés à l’immense abbaye St-Antoine ;
il avait été « hôpital des Enfants de la Patrie » en 1792.) Le square Trousseau a été ouvert en 1906
- Laverdure, 58 rue Traversière et n° adjacents. « C'est vers le
milieu du XVIIème siècle que des archives mentionnent l'activité à Paris rue
Traversière d'un marchand de couleurs, droguiste et fabriquant de vernis.
L'activité axée principalement depuis l'origine vers les fournitures pour
l'ébénisterie, s'est au fil des ans étendue aux différents métiers du bois, aux
beaux-arts, à la décoration. Les ébénistes, menuisiers, restaurateurs de
meubles, sculpteurs, doreurs, luthiers, marqueteurs, restaurateurs de tableaux,
artistes peintres, décorateurs
sont nos principaux clients. Les différents produits que nous présentons dans notre catalogue sont diffusés en France et dans le monde entier. »
sont nos principaux clients. Les différents produits que nous présentons dans notre catalogue sont diffusés en France et dans le monde entier. »
12, rue Théophile
Roussel, immeuble primé au concours de façades de 1907, de Joseph Charlet et E.
Perrin. Tous deux ont également été primés en 1910 pour le 24-26 Charles
Baudelaire.
Revenus rue de
Charenton, à gauche :
91, rue de
Charenton / 1, rue de Cotte, PLU : Maison d'angle d'aspect néoclassique
élevée de quatre étages carrés sur rez-de-chaussée, vestige de l'ancien hôtel
de Gournay profondément modifié par l'ouverture des rues de Cotte et d'Aligre
dans la seconde moitié du XVIIIe siècle. Le 91 rue de Charenton – 1 rue de
Cotte constitue l'ancienne aile latérale ouest, avec retour sur la rue de
Charenton. Sa façade a été reprise dans un style néoclassique probablement vers
1820-1840. Le bâtiment donnant sur la rue de Cotte a été épaissi côté cour avec
l'aménagement d'un nouvel escalier à limon tournant et d'une nouvelle porte
cochère. Corniche très saillante. Chaînage d'angle. Construction à usage mixte,
atelier et habitation, vers 1860 sur cour dont l'accès sous porche est
carrossable depuis la rue de Cotte.
3, rue d’Aligre,
PLU : La parcelle du 3-5 rue d'Aligre est remarquable pour le bâtiment en
redans qui s'y élève. Il s'agit d'une partie du corps de logis central de
l'ancien hôtel de Gournay, sectionné au niveau de son avant corps central par
l'ouverture de la rue d'Aligre. La cour de cette parcelle, ouverte sur la rue
d'Aligre serait ainsi l'un des derniers vestiges apparents de la cour
principale de l'ancien hôtel de Gournay. Devenue un café associatif le 14
juillet 2007, La Commune rassemble
dans son projet des associations partenaires : Attac 12, les associations
de parents d’élèves FCPE et Petits Baudelaire, l’association des Espagnols du
12ème, Slow Food Bastille, le centre social Relais 59, les clubs Cigale,
l’association France Palestine, la Ligue des Droits de l’Homme 12ème,
l’association Soleil-club de prévention, le Faubourg des Arts, la Colline
Compagnie, l’association des mal voyants des quinze-vingt, l’association
France-Amérique Latine, le GEM l’Etoile Polaire, "Sondons les sondages".
Puis on revient
sur nos pas prendre la rue Abel :
14, rue Abel (entre rue de Charenton et viaduc des arts),
PLU : Ensemble de logements sociaux "Habitations à Bon Marché" réalisé par l'architecte Emile Bois
en 1913-1923. Ce projet fortement inspiré de l'architecture flamande, avec ses
briques et pignons baroques, a été retenu en 1912 lors d'un concours de la
Ville pour la construction d'Habitations à Bon Marché. L'immeuble ne fut achevé
qu'après la guerre et le projet réalisé est plus sobre que le projet initial. Il
constitue toutefois une réussite exceptionnelle, à la fois par ses proportions
et par le jeu sur la qualité décorative des matériaux qui alterne deux couleurs
de briques, le béton, la meulière en soubassement et le moellon.
L'immeuble qui fait la pointe rue Abel / rue Parrot, face à l’avenue
Daumesnil, a des consoles léonines.
4 bis rue
Parrot, (coin rue Émile Gilbert) inscrit MH : Traiteur de la Gare. Charcuterie installée en rez-de-chaussée d'un
immeuble construit en 1903. La devanture formée d'un coffrage de bois est ornée
de peintures fixées sous verre, signées de l'atelier de Benoist et Fils. Elles
représentent des scènes de chasse au sanglier et au cerf, et des natures mortes
avec bouquets de fleurs ou gibiers.
à la pointe des rues Abel et Parrot |
Elle aura vécu moins de 50 ans
mais un certain nombre des prisonniers du 2 décembre, dont Raspail, y seront enfermés. Victor
Hugo, Histoire d’un crime :
« Mazas, qui a remplacé la
Force, aujourd'hui démolie, est une immense bâtisse rougeâtre, élevée, tout à
côté de l'embarcadère du chemin de fer de Lyon, sur les terrains vagues du
faubourg Saint-Antoine. De loin on la croit en briques, de près on reconnaît
qu'elle est construite en cailloux noyés dans le ciment. Six grands corps de
logis à trois étages, se touchant tous au point de départ et rayonnant autour
d'une rotonde qui est le centre commun, séparés par des cours qui vont s'élargissant
à mesure que les corps de logis s'écartent, percés de mille petites lucarnes
qui sont les jours des cellules, entourés d'une haute muraille, et présentant à
vol d'oiseau la figure d'un éventail, voilà Mazas. De la rotonde qui fait le
centre s'élance une sorte de minaret qui est la cheminée d'appel. Ce
rez-de-chaussée est une salle ronde qui sert de greffe. Au premier étage est
l'autel, où un seul prêtre dit la messe pour tous, et l'observatoire, d'où un
seul surveillant veille sur toutes les portes de toutes les galeries à la fois.
Chaque corps de logis s'appelle division. Les cours sont coupées par de hauts
murs en une multitude de petits promenoirs oblongs. »
Les 5
cours comprennent chacune 20 promenoirs, l’isolement étant la règle, de nuit,
de jour comme durant la promenade quotidienne. La messe est suivie depuis les
cellules dont on maintient les portes en position entrebâillée, portes qui
ouvrent toutes en direction du centre.
« Le coup d'État eut pour les
représentants prisonniers des procédés très divers ; ceux qu'on ménageait,
les hommes de la droite, on les mit à Vincennes ; ceux qu'on haïssait, les
hommes de la gauche, on les mit à Mazas. Ceux de Vincennes eurent les
appartements de M. de Montpensier, rouverts exprès pour eux, un dîner excellent
et en commun, des bougies, du feu, et les sourires et les génuflexions du
gouverneur, qui était le général Courtigis. Ceux de Mazas, voici comme on les
traita : (…)
Du reste solitude absolue,
silence profond. Pourtant au bout de quelques heures, M. Émile Leroux – c'est
lui qui a dit le fait à M. Versigny – entendit de l'autre côté de son mur à sa
droite une sorte de frappement singulier, espacé, intermittent, avec des
intervalles inégaux. Il prêta l'oreille ; presque au même instant, de
l'autre côté du mur à gauche, un frappement du même genre répondit. M. Émile
Leroux ravi – quelle joie d'entendre un bruit quelconque ! – songea à ses
collègues prisonniers comme lui, et se mit à crier d'une voix éclatante :
– Ah ! ah ! vous êtes donc là aussi, vous autres ! Il n'avait
pas achevé sa phrase que la porte de sa cellule s'ouvrit avec un grincement de
gonds et de verrous ; un homme – c'était le geôlier – apparut furieux, et
lui dit :
– Taisez-vous !
Le représentant du peuple, un peu
stupéfait, voulut quelque explication.
– Taisez-vous, reprit le
guichetier, ou je vous f... au cachot !
Le guichetier parlait au
prisonnier comme le coup d'État parlait à la nation.
M. Émile Leroux, avec ses
habitudes entêtées de « parlementarisme », essaya pourtant
d'insister.
– Comment ! dit-il, je ne
puis répondre aux signaux que me font deux de mes collègues !
– Deux de vos collègues !
reprit le geôlier, ce sont deux voleurs. Et il referma la porte en éclatant de
rire.
C'étaient en effet deux voleurs
entre lesquels était, non crucifié, mais verrouillé, M. Émile Leroux.
La prison Mazas est si
ingénieusement bâtie que la moindre parole s'y entend d'une cellule à l'autre.
Point d'isolement, par conséquent, en dépit de la cellule. De là ce rigoureux
silence imposé par la logique parfaite et atroce du règlement. Que font les
voleurs ? Ils ont imaginé un système de frappement télégraphique, et le
règlement perd ses peines. M. Émile Leroux avait tout simplement troublé un
dialogue commencé.
– Laissez-nous donc jaspiner
bigorne [parler argot], lui cria le voleur son voisin, qui, pour cette
exclamation, fut mis au cachot.
C'était là la vie des
représentants à Mazas. Du reste, étant au secret, pas un livre, pas une feuille
de papier, pas une plume, pas même la promenade d'une heure dans le préau.
Les voleurs aussi, on vient de le
voir, vont à Mazas. Mais à ceux qui savent un métier, on permet de
travailler ; à ceux qui savent lire, on passe des livres ; à ceux qui
savent écrire, on accorde une écritoire et du papier ; à tous on laisse
l'heure de promenade exigée par l'hygiène et autorisée par le
règlement.
Aux représentants, rien.
L'isolement, la claustration, le mutisme, l'obscurité, le froid, « la
quantité d'ennui qui rend fou », comme a dit Linguet parlant de la
Bastille.
Être assis, jambes et bras
croisés, sur une chaise toute la journée ! telle était la situation.
Mais le lit ? On pouvait se
coucher ?
Non.
Il n'y avait pas de lit.
A huit heures du soir, le
guichetier entrait dans la cellule, atteignait et déplaçait quelque chose qui
était roulé sur une planche près du plafond. Ce quelque chose était un hamac.
Le hamac fixé, accroché et tendu,
le guichetier souhaitait au prisonnier le bonsoir.
Il y avait sur le hamac une
couverture de laine, quelquefois un matelas de deux pouces d'épaisseur. Le
prisonnier, enveloppé dans cette couverture, essayait de dormit et ne parvenait
qu'à grelotter.
Mais, le lendemain, il pouvait du
moins rester couché toute la journée sur son hamac ?
Point.
A sept heures du matin, le
guichetier rentrait, souhaitait le bonjour au représentant, le faisait lever,
et roulait le hamac dans sa niche près du plafond.
Mais, en ce cas, il fallait
ressaisir le hamac d'autorité, le dérouler, le raccrocher et s'y recoucher.
Fort bien. Le cachot.
Cela était ainsi. Le hamac pour
la nuit, la chaise pour le jour.
Soyons juste pourtant.
Quelques-uns obtinrent des lits, entre autres MM. Thiers et Roger (du Nord). M.
Grévy n'en eut pas.
Mazas est une
prison-progrès ; il est certain que Mazas est préférable aux plombs de
Venise et au cachot sous-fluvial du Châtelet. C'est la philanthropie
doctrinaire qui a construit Mazas. Pourtant, on le voit, Mazas laisse à
désirer. Disons-le, à un certain point de vue, l'encellulement momentané des
faiseurs de lois à Mazas ne nous déplaît pas. Il y a eu peut-être un peu de
Providence dans le coup d'État. La Providence, en mettant les législateurs à
Mazas, a fait un acte de bonne éducation. Mangez votre cuisine ! il n'est
pas mauvais que ceux qui font les prisons en tâtent. »
Gustave Flourens, emprisonné à Mazas à la suite de l'émeute du 31 octobre 1870 contre la politique défaitiste du gouvernement de la Défense nationale, en sera libéré par un autre soulèvement des Parisiens le 21 janvier 1871 ; il sera ensuite général de la Commune. Selon certains dix-neuvièmistes, il serait le modèle du capitaine Nemo de Jules Verne, qui l’évoquait dès son Paris au XXe siècle, sous son nom, au chapitre 16 : le personnage principal, Michel Dufrénoy, y passe « devant la Sorbonne où M. Flourens faisait encore son cours avec le plus grand succès, toujours ardent, toujours jeune ». Mais Volker Dehs montre bien qu’il s’agit ici du père et d’une notation ironique : l’action de Paris au XXe siècle se passe en 1962 et Pierre Flourens était l’auteur d’un livre sur la longévité humaine.
Gustave Flourens, emprisonné à Mazas à la suite de l'émeute du 31 octobre 1870 contre la politique défaitiste du gouvernement de la Défense nationale, en sera libéré par un autre soulèvement des Parisiens le 21 janvier 1871 ; il sera ensuite général de la Commune. Selon certains dix-neuvièmistes, il serait le modèle du capitaine Nemo de Jules Verne, qui l’évoquait dès son Paris au XXe siècle, sous son nom, au chapitre 16 : le personnage principal, Michel Dufrénoy, y passe « devant la Sorbonne où M. Flourens faisait encore son cours avec le plus grand succès, toujours ardent, toujours jeune ». Mais Volker Dehs montre bien qu’il s’agit ici du père et d’une notation ironique : l’action de Paris au XXe siècle se passe en 1962 et Pierre Flourens était l’auteur d’un livre sur la longévité humaine.
Puis y seront enfermés les otages de la Commune, l’ex président de
la Cour de Cassation, Bonjean, dès le 21 mars et, à compter du 4 et 5
avril : l’archevêque de Paris, Mgr Darbois, Deguerry, curé de la
Madeleine, des prêtres, des jésuites, des sergents de ville, des gardes de Paris,
le banquier Jecker. Le lundi 22 mai, ils sont transférés à la Roquette.
La
prison est détruite en 1898 pour ne pas être ce sur quoi tomberaient en sortant
du train de la nouvelle gare de Lyon les voyageurs de l’Expo Universelle de
1900 (La 1ère gare était de 1847-52).
On redescend la rue Traversière
jusqu’à l’Hôtel Massilia construit
en 1911 par l'architecte Marcel Oudin, architecte des magasins du Printemps,
boulevard Niel. L'immeuble occupe l'ensemble d'une parcelle triangulaire et
compte six étages sur rez-de-chaussée, atteignant ainsi une densité
exceptionnelle. Sa structure est dessinée comme elle le serait avec une
charpente métallique, à l'exception des hauteurs où elle devient décorative.
Les briques blanches sont utilisées comme remplissage de l'ossature de béton
armé beige, laissée apparente, avec des modulations que n'eut pas permis un
autre matériau. La façade principale est animée par deux bow-windows centraux
encadrant des balcons. On remarque les ferronneries des balconnets. Par sa forme
et sa position, c'est un bâtiment que les usagers de ce quartier de la gare de
Lyon identifient et connaissent bien.
On va jusqu’à la Rue Crémieux. Ouverte en 1865 par la
compagnie générale immobilière de Moïse
Polydore Millaud, patron du Petit
Journal, lancé le 1er février 1863, du Soleil plus tard et de
quelques publications dérivées, après avoir possédé une banque et un bazar. La
rue a gardé son nom jusqu'à la fin du siècle, avant de prendre celui du membre
du gouvernement provisoire de 1848. 35 pavillons de 3 niveaux comportant chacun
2 pièces à feu, avec cuisine en sous-sol sur le mode anglais.
En face de la rue Crémieux, le 12,
rue de Lyon (UGC) était encore, dans les niches aujourd’hui vides, orné de
statues quand le marquis de Rochegude
publia ses Promenades en 1910. A la gauche du bâtiment, au n°18, s’élevait
le Grand Théâtre Parisien que Polydore Millaud y avait ouvert le 1er
avril 1865, avec la Duchesse de Valbreuse,
pour le public populaire du faubourg. Dans le décor, les verrous avaient
malencontreusement été placés à l’intérieur du cachot, ce qui avait suscité un
abondant courrier au journal ! Aux parquet, stalles, 1er et 2e
amphithéâtre, avant-scènes et tribunes s’ajoutaient des confortables, et des grands
confortables. On y jouait le drame, la comédie, le vaudeville et même l’opéra
(Jeanne d’arc). Les représentations
étaient sans cesse troublées par le bruit des trains du chemin de fer de
Vincennes, la scène étant toute proche du viaduc, ce qui était assez gênant
pour les acteurs. Mais le public était généralement enthousiaste et on l’a vu
faisant bisser le monologue de Hamlet. La salle devint ensuite un
caf'conc’ dit Théâtre des Folies de Lyon,
encore visible sur des photos de l’inondation de 1910:
On redescend par la rue
d’Austerlitz voisine, ex passage d’Orient, qui a quelques-unes de ses maisons
précédées de marches.
Par la rue de Bercy, on atteint,
au 10, bd de la Bastille, la Maison Rouge :
Puis on remonte par la rue Jules César. Elle doit
son nom d’avoir été ouverte, au moment où paraissait l’Histoire de Jules César de sa majesté impériale Napoléon III, (en
1865), sur l’emplacement des Arènes nationales, construction légère de bois et
de toile mais du plus pur style gothique ; cirque à l’antique, sportif et
gymnique, et non tauromachique, comme le regrette Théophile Gautier dans son
feuilleton de La Presse qui en relate l’inauguration :
« La place de la Bastille et la rue de Lyon avaient, lundi dernier [7 juillet 1851], l'apparence de la calle d'Alcala à Madrid un jour de course. – Dia de toros. Les voitures se hâtaient de toutes parts et de longues files de piétons dont aucun ne retournait, se dirigeaient vers le même but; on ouvrait les Arènes nationales, espèce de succursale de l'Hippodrome, trop éloigné des faubourgs populeux de Paris et plus exclusivement destine à la fashion qui le trouve sur le chemin du bois de Boulogne. (…)
Les Arènes, bâties au point de vue populaire, ne donnent que deux représentations par semaine, le dimanche et le lundi, pour ne point distraire les ouvriers de leurs travaux. On sait que, depuis un temps immémorial, le lundi est célébré beaucoup trop religieusement par la classe qui travaille, dans les cabarets et les guinguettes de la banlieue. Le prix des places des Arènes nationales lui donne les moyens de se divertir plus honorablement et à moins de frais, variant de dix sols à vingt sols. C'est donc un service que rend M. Arnaut à l'édilité de Paris en occupant un certain nombre d'heures une population un peu turbulente dans les plaisirs, où la pousse le besoin de réagir contre ses rudes labeurs. Le prix d'un litre de bleu empoisonné de litharge et de bois de campèche solde un billet des Arènes et empêche de boire ce même litre. Double avantage : l'on s'amuse et l'on ne s'intoxique pas. »
Par la rue Lacuée, on arrive à
l’ex siège de la FSGT. Les « majos » du Congrès de Tours ayant gardé dans le
domaine du sport le sigle FST, les sportifs ouvriers minoritaires se sont
rebaptisés, en 1926 : Union des sociétés sportives gymniques du travail
(USSGT), et leur bulletin Sports et
Loisir. Douze mois plus tard, pourtant, l’élan du Front populaire
réconcilie les sportifs communistes et socialistes; de la fusion naît la FSGT,
et un journal unique Sport, le «
journal des sportifs ouvriers ».
« PAS UN SOU, PAS UN HOMME
POUR LES JEUX OLYMPIQUES DE BERLIN
C’est à Berlin en 1936 que
doivent se dérouler les prochains Jeux olympiques. Le choix de cette ville
comme siège des dits Jeux a déjà soulevé, dans bien des pays, la protestation
des sportifs et de ceux qui, au-dessus de toute considération politique ou philosophique,
rêvent d’une humanité toujours plus harmonieuse. À ces protestations fortes
mais encore insuffisantes doit s’y joindre celle de la conscience universelle.
La protestation de cette dernière doit être d’autant plus rigoureuse et
pressante qu’il importe d’exiger sans délai la fin des persécutions dont les
Juifs comme les catholiques sont présentement l’objet en Allemagne. Jamais plus
grand défi n’aurait été jeté aux hommes de cœur et de progrès si l’indifférence
de ceux-ci permettait la tenue à Berlin des Jeux olympiques. (…) Contre les
Olympiades de Berlin adhérez tous au Comité anti-olympique, 2 rue Biscornet,
Paris 12e. »
2, rue Biscornet |