Molière, Racine, Boileau et les melons d'Auteuil

L'occasion de ce parcours a été une balade pour la librairie Fontaine Auteuil, 41 rue d'Auteuil.


40, rue d’Auteuil, auberge du Mouton Blanc. Molière loue un appartement à Auteuil cinq ou six années durant, vers 1667, au coin rue d’Auteuil / av. Théophile Gautier ; Racine est un temps presque en face, dans l’enclos Ternaux (un château de la fin du 17e siècle que le manufacturier Nicolas Ternaux n’acquerra qu’en 1804), et le cabaret du Mouton-Blanc le lieu où les rejoignent les non-résidents quand ils ne logent pas chez l’un ou l’autre ; le tout dans le mouchoir de poche de la Grande-Rue, aujourd’hui d’Auteuil. Racine (29 ans) y teste ses Plaideurs (1668) sur Ninon de Lenclos (48 ans) et la Champmeslé (26 ans) ; Molière (46 ans) y écrit son Amphytrion (1668). Mais les deux hommes, brouillés depuis 3 ans, n’y sont pas ensemble.

43-47, rue d’Auteuil : Vestiges de l'Hôtel Antier ou de Verrières. L’Hôtel Antier, dit aussi “des Demoiselles de Verrières“, fut construit juste après la mort de Boileau (qui s’éteignit en 1711) pour une cantatrice de l’Opéra âgée de 23 ans, Mademoiselle Antier [1687-1747. Elle chantera durant 30 ans à l’Académie Royale de Musique, y créera, de Rameau, Hippolyte et Aricie, Castor et Pollux], qui y reçut le Tout-Paris des Arts et de la Finance. On parla longtemps de la fête qu’elle y donna en 1744 pour la convalescence du Roi Louis XV. Un fermier général, M. d’Épinay, acheta ce joyau et l’offrit à deux sœurs, Marie et Geneviève Rainteau, anciennes actrices de la troupe théâtrale du Maréchal de Saxe, qui l’occupèrent de 1750 à 1767. Marie, maîtresse officielle du Maréchal de Saxe, avait ajouté alors à son nom celui de Verrières.
Dans le parc de l’Hôtel, Marie et Geneviève firent édifier un théâtre de 400 places - aujourd’hui disparu - relié à la maison d’habitation par un souterrain et l’on y joua, reflet de la licence du logis, de nombreuses pièces interdites dans les théâtres publics : Les surprises de l’amour de Marivaux, La partie de chasse de Henri IV  de Collé, Camille et Constance du poète Colardeau. Les Demoiselles de Verrières étaient également adorées par les villageois qu’elles conviaient à leurs fêtes champêtres.
Marie eut une fille du Maréchal de Saxe, Marie-Aurore, grand-mère de George Sand. Dans les années 1750, durant la décennie où M. d’Épinay, l’amant de Marie, est Fermier général, les demoiselles de Verrières possèdent également un hôtel à la Chaussée d’Antin, dont celui d’Auteuil n’est que la maison de campagne. Leur salle de spectacle, très grande pour un théâtre particulier, d’une belle hauteur et très richement décorée ne compte « pas moins de sept loges en baldaquin, d’un dessin élégant et tendues de riches étoffes », sans compter, comme il est de règle chez les courtisanes, « un certain nombre de loges grillées qui permettaient aux femmes de qualité d’assister au spectacle sans être vues ». Aurore, la fille que Marie a eue du maréchal de Saxe, et qui sera donc la grand-mère de la future George Sand, « ne restait pas simple spectatrice de ces représentations théâtrales : non seulement elle figurait toujours avec succès dans les pièces que l’on représentait sur le théâtre de sa mère, mais elle jouait encore dans des opéras comiques qui, souvent, alternaient avec les comédies. Elle avait une voix magnifique qu’elle maniait à ravir ». On la verra tenir le rôle de Colette dans le Devin de village, et elle fera ici tous les principaux rôles des opéras de Grétry et des pièces de Sedaine.
L’Hôtel Antier fut vendu à un certain M. de Rouhault en 1767 et de nombreux propriétaires se succédèrent ensuite. Le parc fut grandement mutilé par le percement des rues adjacentes. Il reste de cet ensemble, qui fut l’un des joyaux du quartier d’Auteuil, la façade restaurée sur le jardin.
En 1784 et 1785 [Benjamin Franklin est encore l’ambassadeur en titre et Thomas Jefferson vient d’arriver], John Adams en poste à l’Ambassade américaine à Paris, et futur second Président des Etats-Unis (1797-1801), a résidé avec sa famille et son fils, John Quincy Adams (sixième Président des Etats-Unis, 1825-1829) dans cet Hôtel.
Eugène de Rothschild céda l’Hôtel en 1954 à Total, Compagnie Française des Pétroles, qui l’a enclavé dans des immeubles de bureaux et a amputé son parc. La façade sur la rue d'Auteuil, en retrait au fond d'une cour encadrée par deux ailes rajoutées, a été refaite récemment dans le même style.
En 1993, le CNRS y installe son nouveau Siège. La façade donnant sur le parc est encadrée de deux pavillons circulaires. Ses deux étages et son attique sont séparés par un large entablement. Le fronton arrondi est décoré d'un cartouche représentant une jeune femme (peut-être Mlle Antier). Au-dessus de l'attique un groupe en terre cuite surmonte la façade : deux amours accoudés à un cartouche et liés par des guirlandes. Subsiste également de cette époque quelques éléments décoratifs, comme le bassin rond, avec son jet jaillissant de tritons sculptés, et des boiseries.

2bis, rue Michel-Ange, PLU : Ancienne sous-station électrique d'Auteuil construite en 1912 par l'architecte Paul Friesé. La façade est composée autour d'une triple arcature métallique qu'encadrent deux travées et une galerie traitées avec soin en briques ocres et éclairées par des baies en plein cintre. La symétrie parfaite de l'ensemble n'est pas sans évoquer la rationalité d'un édifice à vocation industrielle. Elle est représentative du modèle élaboré par Friesé ici pour l'alimentation électrique du réseau métropolitain en plein développement. Le sous-sol était réservé aux câbles et cellules d'arrivées, au rez-de-chaussée, se trouvaient les groupes moteurs-générateurs, les transformateurs et les ventilateurs, en étages les accumulateurs. La nécessité de la ventilation explique les grandes fenêtres en façade; mais si les premières sous-stations réalisées par Friesé affirmaient franchement leur parti industriel, elles se sont "habillées" au fil des ans comme pour cette réalisation tardive de motifs plus conventionnels.

Le salon de Mme Helvétius était 59, rue d’Auteuil ; veuve, elle avait racheté la maison du pastelliste Quentin de La Tour en 1772, et elle reçut là jusqu’en 1800, Condillac, Condorcet, Diderot, puis Benjamin Franklin, le voisin de Passy, qui y amènera Thomas Jefferson, au milieu d’une vingtaine de chats angora. 70 ans après Antoine, le jardinier de Boileau, Thomas Blaikie, l'horticulteur écossais qui refait à l’anglaise , pour le comte d’Artois, le parc de Bagatelle, apporte à l’occasion quelques arrangements au jardin de l’hôtesse des Idéologues du cercle d’Auteuil. Il a ainsi l’occasion, « toujours en compagnie de ces gens de génie », de dîner « avec le docteur Franklin qui est ici comme ambassadeur américain, un homme très ordinaire ».

Villa Montmorency. La comtesse de Boufflers avait été la « Minerve savante », « l’Idole » du Temple, du temps de sa liaison avec le prince de Conti et jusqu’à la mort de celui-ci. Un tableau de Michel Barthélemy Olivier montrait, en 1766, l’un de ces thés à l’anglaise dont la maison était coutumière où les dames, se passant de domestiques, faisaient elles-mêmes le service. Les Goncourt, dans La Femme au 18e siècle, réussissent à en nommer tous les personnages. « Cette charmante femme au bonnet blanc et rose, au fichu blanc, à la robe d’un rose vif, au tablier à bavette de tulle uni mettant sur le rose la trame blanche d’une rosée, cette jolie servante qui sert de ce plat posé sur ce réchaud, s’appelle la comtesse de Boufflers. »
A compter de 1773, elle donne à souper à Auteuil, trois fois par semaine, aux anciens de la société du Temple
« Le jardin de Mme Boufflers », pouvait écrire l’Almanach du voyageur à Paris, en 1787 – on n’avait pas alors la même conception de la propriété privée et tous les domaines étaient ouverts aux gens du même monde –, « à Auteuil, traité dans le genre pittoresque, est remarquable par sa vaste étendue et son caractère de simplicité. On n’y rencontre ni rivière ni pont, ni aucun de ces petits monuments élevés à grands frais, et souvent trop multipliés dans un local serré ; mais on y jouit de la belle nature : on y a tiré parti de la disposition du terrain, profité des sites intéressants qu’il présentait, et on en a fait un lieu charmant ». De la terrasse, la vue s’étendait sur tout Paris, « les tours et dômes de Notre-Dame, de Saint-Sulpice, des Invalides et du Val-de-Grâce ».
Face à l'entrée de la Villa Montmorency
En 1860, sur le parc et le château de Boufflers, qu’a achetés Émile Pereire pour y faire passer le chemin de fer de ceinture, la « villa Montmorency » s’ouvre par un portail monumental où quatre cariatides supportent un linteau affichant le nom de la résidence. Une cinquantaine de maisons, aux occupants souvent anglais, et aussi souvent bâties de brique balnéaire façon Trouville, Dinard ou Arcachon – toujours ce côté station estivale d’Auteuil –, sont déjà dressées sur la pente, autour d’un rond-point orné d’une fontaine. (On peut l’apercevoir depuis le bd de Montmorency, à la hauteur du n°71)

67, bd de Montmorency. C’est dans une maison louis-philipparde que les Goncourt emménagent le 19 septembre 1868, six semaines après l’avoir achetée. Au rez-de-chaussée, un vestibule, la cuisine, la salle à manger ainsi qu’un grand et un petit salon. Le 1er étage est celui d’Edmond : bureau, chambre, salle de bains, cabinet dit « de l’Extrême-Orient ». Le 2e est à Jules, avec sa chambre et deux petites pièces inoccupées.
Jules n’aura pas trouvé le calme dans la maison d’Auteuil, gêné par les enfants des voisins et par le train de la Petite Ceinture ; il s’y éteint le 20 juin 1870 ; il n’a pas quarante ans.
Les droits d'auteur de la réédition d’En 18..., ce livre qui avait été éclipsé par le coup d’Etat, permettent à Edmond de faire aménager par Frantz Jourdain, au deuxième étage de la maison d’Auteuil, ce « Grenier » qui ressemble à « une des plus riches huttes de l’Exposition universelle », à en croire Jules Renard.
Les Daudet viennent, en avant-première, visiter ce Grenier, qui ne sera inauguré que le dimanche 1er février 1885. Les rencontres dominicales y seront désormais rituelles pour les dix ans à venir, à l’exception des mois d'été. A Auteuil, Edmond fait planter dans le jardin une quarantaine de pivoines envoyées du Japon par Hayashi, collectionneur et marchand d'art qu’il a rencontré à l’Exposition universelle de 1878. Le 28 juin 1896, dernier “Grenier“ ; Edmond s’éteint trois semaines plus tard, le 17 juillet, à Champrosay.
La Ville de Paris s'en est portée acquéreur en 1938 afin d'y perpétuer la mémoire de ses occupants.

Pour la Noël 1904, André Gide emménage dans la villa Montmorency, 38 avenue des Sycomores. Il rongeait son frein depuis des mois - « J’attends de cette maison ma force de travail, mon génie. Déjà tout mon espoir y habite », écrivait-il dans son Journal du 17 mai. Cocteau décrit la maison que Gide a fait construire comme une « maison symbolique, où les fenêtres ne regardent pas en face. A l’intérieur, des couloirs, des escaliers s’entrecroisent, se contredisent. » Dès l’entrée, un escalier grimpe ainsi autour des quatre murs jusqu’en haut, et ne dessert pas pour autant toute la maison. Dans ce hall, l’Hommage à Cézanne, de Maurice Denis, qui dépeint, dans la galerie d’Ambroise Vollard, autour d’un tableau de Cézanne, à gauche Redon, Vuillard, Mellerio, le critique d’art, Vollard et Denis lui-même et, à droite, Seruzier, Ranson, Roussel, Bonnard et Marthe Meurier devenue Mme Maurice Denis.
Dans le grand salon de Gide, René Piot peindra autour de la cheminée, cinq ans plus tard, une immense fresque  représentant des groupes de danseuses au milieu de papillons. Mais Gide donne lecture de ses manuscrits à ses amis dans sa bibliothèque, depuis un pupitre surélevé de quelques marches, dans cette salle comme une église, montant jusqu’à la charpente, avec ses petites fenêtre placées tout en haut du mur, sous le toit. Derrière le lutrin, la porte menant à son cabinet de travail comme à la sacristie : une toute petite pièce avec un fauteuil et un bureau encastré dans le mur.

- Bout en impasse de la rue Pierre Guérin ; Le Jardin d'Enfants des Nations Unies a été fondé en 1951 par un groupe de parents de différentes nationalités travaillant à l'UNESCO; il est ouvert à tous. Ce Jardin d'Enfants se trouve aujourd'hui 40 rue Pierre Guérin dans les locaux de l'ancienne "Petite École" crée en 1915 par Madame Alice Hertz. Elle en avait fait une préfiguration, dès le début de la guerre, à Morgat (Bretagne) où elle s’était repliée avec la famille de son mari, qui lui écrivait, le 1er octobre 1914 :
« Chère Alice,
[...]
Je suis bien content que ton petit jardin d'enfants familial marche si bien et te donne à toi comme aux chers petits de grandes joies. Que n'ai-je été ton élève, je me le dis bien souvent ici--car, pour être un bon soldat, il faudrait avoir tous les sens aiguisés et tous les muscles dispos. Je pense souvent à ton beau projet qui devait se réaliser ces jours-ci et qui m'intéressait passionnément. Cela m'apparaît plus nécessaire que jamais. Après la guerre, il faudra tout reprendre par la base et la base après la procréation de beaux êtres sains, c'est leur première éducation. Chère femme, emmagasine des forces, ne t'use pas trop, tâche d'être aussi insouciante que possible, de vivre au jour le jour, de ne pas trop chercher à comprendre, d'avoir une confiance soumise dans le temps qui travaille pour nous, dans la sagacité de nos chefs, et dans la bravoure des soldats de France et d'Angleterre. Garde-toi pour l'heure où, comme tu dis, il faudra se mettre à rebâtir. »
Dans une réponse datée du 16 décembre 1914, Alice réfléchissait à la possibilité de louer un appartement avec un superbe jardin qu'elle avait vu en passant rue des Vignes et d'y fonder un authentique jardin d'enfants. Elle établira finalement ce jardin rue Pierre Guérin. Depuis 1910, elle donnait des cours de formation de jardinières d’enfant, inspirés par les idées du pédagogue allemand Friedrich Froebel, au collège Sévigné ; elle y poursuivra son enseignement jusqu’en 1927. Léon Eyrolles, éditeur et libraire de l’enseignement technique, qui avait épousé la sœur de Robert Hertz, était membre du conseil d’administration du collège Sévigné. Voir Un ethnologue dans les tranchées: Lettres de Robert Hertz à sa femme Alice CNRS Editions, Paris 2002.

1bis, rue Raffet, PLU : Pavillon à pans de bois percé de grandes baies vitrées sur cour arborée abritant l'ancien atelier du sculpteur Maurice Calka. A échappé à la démolition dont le menaçait un immeuble de standing  Les deux ateliers de la rue Raffet étaient à l'origine occupés par le sculpteur Paul-Albert Bartholomé (1848-1928) qui les fit installer et y travailla jusqu'à sa mort en 1928. Il y conçut, notamment, son œuvre la plus connue, le monument d'accueil du cimetière du Père-Lachaise. Son meilleur ami, Edgar Degas y séjourna souvent, sa dernière photo y fût d'ailleurs prise. A partir des années 50 le bâtiment accueillit deux locataires distincts : l'architecte Bernard de La Tour d'Auvergne et le sculpteur Maurice Calka. Bernard de La Tour d'Auvergne y travailla jusqu'à sa mort au milieu des années 70. Le second atelier, celui de Maurice Calka, est resté en activité jusqu’à son décès en 1999. [Maurice Calka, sculpteur 1921 – 1999 Premier Grand prix de Rome, il aura vu de son vivant deux de ses œuvres acquérir une notoriété mondiale. La première est construite en Pierre, à Addis-Abeba (Ethiopie) et mesure dix mètres de haut. Il s'agit de la statue du Lion de Judée, commandée par l'Empereur Hailé Sélassié, qui y voyait l'occasion d'exprimer une vision de l'Afrique entrant dans l'ère moderne (1955). Cette sculpture, à la silhouette aisément identifiable, devint par la suite un symbole culturel de l'afro-centrisme. La seconde œuvre est un bureau en plastique moulé - semblable à un galet poli et réalisé à la fin des années soixante - en petite série. Ce meuble préfigurera le design des objets de toute la décennie suivante. Il a été répertorié dans de nombreuses publications et expositions.] A cette date, décision fût prise de lui rendre hommage en laissant pour la première fois son atelier accessible au public.

3-7, rue Raffet, PLU : Immeubles de rapport en brique et pierre de taille construits par l'architecte Charles Plumet en 1929. Très belles portes conservées de style Art Déco.

24, rue Jasmin, PLU : Immeuble de logements construit par les architectes Pol Abraham et Paul Sinoir en 1922 et devenu par la suite une annexe à usage de pensionnat du collège de Montmorency. Il est caractéristique des débuts du Mouvement Moderne par le jeu géométrique et répétitif de ses trois bow-windows triangulaires. La proximité immédiate du collège de Montmorency, réalisé en 1931 par Pol Abraham permet de juger de l'évolution de l'architecte et de la radicalisation des théories modernistes et fonctionnalistes intervenue entretemps. [Abraham fait partie des principaux représentants du Mouvement Moderne à Paris où il ouvre sa première agence en 1923. Elève de Pascal à l'école des Beaux-Arts, dont il sort diplômé en 1920, il soutient en 1933 sa thèse : "Viollet-le-Duc et le rationalisme médiéval", et est nommé la même année inspecteur général de l'enseignement technique. On les retrouvera 8-10, rue Leconte de Lisle, dans une réalisation de 2 maisons individuelles, en 1924-25, inspirées de l'architecture belge]

22 bis, rue Jasmin, angle et 15, rue Henri Heine, PLU : Collège Montmorency de style fonctionnaliste construit par l'architecte Pol Abraham en 1931. Le collège de Montmorency était destiné à accueillir de jeunes Américaines soucieuses de poursuivre leurs études à Paris. Le programme prévoyait des bureaux, quatre salles de cours, un salon-bibliothèque-théâtre en saillie au deuxième étage, dix-huit chambres, une infirmerie, un laboratoire, et des pièces pour le personnel. La façade laissant apparent le béton armé, l'absence de tout ornement, la rigidité des formes renvoyant aux fonctions font de cette réalisation un manifeste moderniste. Il héberge actuellement une agence d'architecture.

18, rue Henri Heine, PLU : Immeuble de rapport construit par l'architecte Hector Guimard en 1925-1926. Il peut-être être considéré comme le chef-d'œuvre de la dernière période créatrice de Guimard. La façade est en brique et pierre de taille et comprend trois travées symétriques organisées autour d'un bow-window central en pierre de taille. Guimard abandonne définitivement l'ornementation Art Nouveau pour un style plus épuré, proposant ainsi une vision très personnelle de l'Art Déco. A l'intérieur, il réussit à recréer un exceptionnel mur de pavé de verre séparant les deux escaliers comme au Castel Béranger.

21, rue Jasmin et angle 8-12, Henri Heine, PLU : Bureau des Postes et Télécommunications construit en 1913 par l'architecte Paul Guadet. Le béton est recouvert de briques bicolores et enrichi d'un discret décor de mosaïques et de céramique, dont un beau portail d'entrée. Guadet a ouvert son bâtiment avec de grandes fenêtres pour permettre l'éclairage maximal des téléphonistes. Le bâtiment repose sur un socle en pierre et les grandes fenêtres sont coupées par des meneaux. Ceux-ci sont en béton armé égayé de cabochons de céramique. Le remplissage est en briques, disposées le plus souvent trois par trois en carrés alternés, et interposés de lits horizontaux. Le portail est un beau morceau d'architecture en céramique.

Angle rue / square Jasmin, 1906
3, square Jasmin, PLU : Hôtel standardisé réalisé par l'architecte Hector Guimard en 1921-1922. Guimard avait conçu ce modèle de maisons standardisé pour la Société générale de Constructions Modernes et il était prévu que toute l'impasse soit ainsi lotie. Sur une structure simple, dont le caractère industriel transparaît dans l'aspect "strié" de chaque élément, le décor reste fidèle à l'Art Nouveau, tant dans les quelques éléments sculptés que dans l'utilisation des fontes Guimard. Elle a fait l'objet d'une surélévation et de réaménagements récents.

11, square Jasmin, PLU : Immeuble de rapport construit par l'architecte Jacques Rivet en 1955. La façade est découpée en damiers rigoureusement séparés par la structure apparente des murs et planchers en béton. Elle produit un effet géométrique répétitif "à la Mondrian". La composition plastique rigoureuse de ce plan manifeste l'influence qu'exerce encore le mouvement moderne sur l'architecture des années 50.

L'immeuble Houyvet
120, av. Mozart, PLU : Immeuble Houyvet conçu en 1924 et réalisé en 1927 par Hector Guimard. Cet immeuble de rapport composé d'appartements meublés et commandité par l'industriel Michel Houyvet est caractéristique de la période tardive de Guimard. Placé à proximité immédiate de l'Hôtel Guimard du n°122, il témoigne de l'évolution profonde de son style. Il doit être rapproché dans la production de l'architecte de l'immeuble de la rue Greuze daté de 1928. Les ornements ont totalement disparu en façade, la ligne droite devient majoritaire. Les seules animations viennent des contrastes créés entre les zones de brique et de pierre.

122 avenue Mozart, l'Hôtel Guimard construit en 1909. En 1912, Guimard, se mariant, construit pour lui sur une parcelle triangulaire : l’agence est au rez-de-chaussée, l’atelier de peinture de son épouse, Adeline Oppenheim, sous le toit.

29, rue d’Auteuil, 3, rue Boileau : extension de Jean-Baptiste Say, 1997, P. de Turenne

Flaubert, écrivant à Bouilhet qui en revient : « Il me semble que tu as passé à Auteuil un vrai dimanche d’antan, tant par l’entourage des gens que par les lieux en eux-mêmes. L’ombre de Boileau planait à l’entour ; les anneaux de sa perruque moutonnaient sur le paysage et les feuilles, dans le jardin, s’entrechoquaient comme des mains qui applaudissent ».

34, rue Boileau, PLU : Hôtel Roszé construit en 1891 et première œuvre subsistante de l'architecte Hector Guimard. Il a été réalisé pour Camille Roszé, représentant de fabriques de gants de peaux et corsets. "Dans cette modeste villa à l'italienne, à peine visible derrière son rempart de glycines, Guimard a déjà fait œuvre totale, y compris le dessin du jardin, des vitrages, des tentures et des modèles des céramiques de la façade exécutées par Emile Muller"

n° 38, Hameau Boileau. C’est là que régna Antoine (Riquié), le jardinier de Boileau, très habile dans l’art de soigner pêchers et abricotiers, et très bon joueur de quilles, immortalisé par des vers dont on ne cite ici que quelques-uns (pour le reste cliquez sur le lien):
« Laborieux valet du plus commode maître
Qui pour te rendre heureux ici-bas pouvait naître,
Antoine, gouverneur de mon jardin d'Auteuil,
Qui diriges chez moi l'if et le chèvrefeuille,
Et sur mes espaliers, industrieux génie,
Sais si bien exercer l'art de La Quintinie ;
Ô ! que de mon esprit triste et mal ordonné,
Ainsi que de ce champ par toi si bien orné.
Ne puis-je faire ôter les ronces, les épines,
Et des défauts sans nombre arracher les racines !
Mais parle : raisonnons. Quand, du matin au soir,
Chez moi poussant la bêche, ou portant l'arrosoir,
Tu fais d'un sable aride une terre fertile,
Et rends tout mon jardin à tes lois si docile ;
Que dis-tu de m'y voir rêveur, capricieux,
Tantôt baissant le front, tantôt levant les yeux,
De paroles dans l'air par élans envolées,
Effrayer les oiseaux perchés dans mes allées ?
(…)
Mais je vois, sur ce début de prône,
Que ta bouche déjà s'ouvre large d'une aune,
Et que, les yeux fermés, tu baisses le menton.
Ma foi, le plus sûr est de finir ce sermon.
Aussi bien j'aperçois ces melons qui t'attendent,
Et ces fleurs qui là-bas entre elles se demandent,
S'il est fête au village, et pour quel saint nouveau,
On les laisse aujourd'hui si longtemps manquer d'eau. »

La propriété qui avait été celle de Boileau, de 1685 [il l’avait achetée, le 10 août, 10 000 livres] à 1709 [Racine l’a fréquentée jusqu’en 1699, Mme Racine aussi, et leurs 7 enfants], est passée ensuite à Claude Deshais-Gendron (1663-1750). Celui-ci s’est formé à Montpellier, il a vite acquis une grande réputation, il a été l’auteur, en 1700, d'un traité consacré aux recherches sur la nature et la guérison des cancers ; il est devenu, après 1715, médecin et chirurgien du régent, le duc d'Orléans. Il fera fortune en tant qu'ophtalmologiste. Ses qualités humaines et sa culture l’ont lié aux hommes de science et de lettres de l'époque, dont le poète Boileau avant Voltaire. C'est dans la maison qui a appartenu à Boileau, à Auteuil, qu'il se retire, et qu'il reçoit savants, ambassadeurs et personnes influentes. Antoine Riquié en est resté le jardinier ; il mourra à 95 ans, le 3 octobre 1749. Gendron décèdera en 1750.
La propriété de Boileau sera la première lotie à Auteuil. Les quatre hectares que bichonnait Antoine et qui appartinrent ensuite à Hubert Robert, ont été rachetés par l'imprimeur Rose-Joseph Lemercier, conseillé par l'architecte Louis-Charles-Théodore Charpentier, également créateur, à Auteuil, de la villa Montmorency comme du hameau de Boulainvilliers, sur les dépendances du château de Passy. Il livre dès 1842 des parcelles construites, ou constructibles avec servitudes, dans un jardin à l’anglaise, autour d’un grand rond-point. Sa publicité insiste sur la bonne desserte de son « hameau » : en été – et en été seulement, Auteuil est toujours et surtout villégiature –, les voitures desservant Saint-Cloud et Boulogne partent tous les quarts d’heure de la place du Carrousel et, avec la même fréquence, de la rue de Rivoli vers Sèvres et Versailles. De plus, Auteuil se voyant englobé à l’intérieur des toutes nouvelles fortifications, le règlement des voitures de place leur fait obligation d’y accepter la course. Entre des impasses dont les noms ressuscitent la guirlande des amis d’Auteuil, naissent maisons normandes et chalets, quelques manoirs gothiques, puis une réalisation néo-classique d’Hittorff et une serpentine de Guimard.

26-28, av Despréaux, PLU : Villa n°24 du Hameau Boileau, l’une des 5 qui restent du lotissement d’origine, composée sur le modèle d'un manoir néo-gothique avec tourelle orthogonale et colombages par l'architecte Jean-Charles Danjoy, restaurateur de cathédrales. Il était entouré de maisons normandes et de chalets. Reproduit sur les documents de vente de 1849. Maison figurant au P-V de la commission du Vieux Paris (rapport de Michel Fleury le 11/01/1977)
pavillon néo-classique de Hittorf au 6, av Despréaux
chalet rustique du 2, rond-point La Fontaine.
8, av Molière, PLU : Villa d'aspect néo-classique remarquablement conservée du Hameau Boileau. Grille de fonte du balcon et des vantaux de la porte piétonne.

40, rue Boileau, PLU : Hôtel particulier construit pour le peintre Lucien Simon (1861-1945, La critique va inventer l’expression « bande noire » pour un petit groupe qui s’écarte de la « peinture claire », - l’impressionnisme-, alors à la mode dans les ateliers. Le plus souvent inspirées par la Bretagne, où il séjourne régulièrement depuis 1892 plusieurs mois par an dans le sémaphore désaffecté à la pointe de Combrit en Sainte-Marine qu’il a acquis en 1901, où il a installé un atelier) en 1906 par les architectes Joachim Richard et Eugène Audigier. Il présente une architecture originale avec des accents vénitiens et mozarabes interprétés dans un registre Art Nouveau. Réalisé en béton armé, l'hôtel a néanmoins été revêtu de grès de Gentil et Bourdet. Situé dans le hameau Boileau, il a subi des remaniements intérieurs et extérieurs et est actuellement occupé par une annexe de l'ambassade d'Algérie.

- 62 rue Boileau, ambassade du Vietnam, 1977, V. Thangh Nghia
- 63 rue Boileau, école, 2004, Gaetan Le Penhuel

67, rue Boileau, laboratoire aérodynamique d’Eiffel. Construit au pied de la Tour, il a été déplacé là en 1912 ; en 1929, il est repris par le GIFAS (groupement des industries françaises aéronautiques et spatiales) qui l’ouvre à l'industrie automobile et au bâtiment en 1945, et il a fini par appartenir au Centre Scientifique et Technique du Bâtiment (CSTB). Monument historique.

39, bd Exelmans, PLU : "Atelier" de Jean-Baptiste Carpeaux, construit à l'initiative de la veuve du sculpteur pour y abriter ses œuvres, cet hôtel a été commencé par Edouard-Michel Lewicki en 1888 et surélevé par Guimard en 1895 (atelier du second étage) qui y a apposé sa signature. Les niches abritent deux copies de marbres réalisées par Carpeaux.

59, rue Chardon-Lagache, Plaque : Pierre Rebière, né en 1909, fils de forgeron, fut d'abord employé de restaurant avant d'être embauché aux usines Renault comme forgeron lui aussi. Il adhéra en 1934 à la cellule communiste de l'entreprise et fut licencié à la fin de 1934. En février 1935, membre du comité de chômeurs du XVIème arrondissement, où il demeurait.
En octobre 1936, il appartint à la délégation française qui négocia avec le ministre espagnol Martines Barrio, la constitution des Brigades internationales. Commissaire du bataillon "Commune de Paris" de la Xème Brigade, Pierre Rebière participa aux combats de Madrid, puis fut blessé en février 1937 durant la bataille du Jarama. Lors du IXème congrès du Parti communiste (Arles 25-29 décembre 1937), il fut élu suppléant du Comité central. Fusillé en octobre 1942, à 33 ans.

47/8 Chardon-Lagache, et 9 Grande Av. de la Villa de la Réunion (visible de la rue Chardon-Lagache), PLU : Hôtel Deron-Levent construit par l'architecte Hector Guimard en 1905-1907 pour Charles Deron Levent, négociant en textiles. Le projet initial prévoyait la construction d'un véritable castel dans le style Art Nouveau déjà employé par Guimard pour le castel d'Orgeval, mais il fut remanié et la façade réalisée paraît assagie par rapport au projet d'origine. Elle inaugure une nouvelle étape, plus classique, du style Art Nouveau de Guimard qui se poursuivra jusqu'à la Guerre. Il présente aussi des fontes d'un type nouveau, qui sont les premières productions de la fonderie de Saint-Dizier. Une annexe de l'Hôtel est située au n°9.
41, rue Chardon-Lagache, PLU : immeuble Jassedé, construit en 1893, l’une des réalisations précoces de Guimard

11, rue Chardon-Lagache. Les anciennes possessions de la seigneurie des Génovéfains avaient été acquises par Gérard, premier peintre de l'Empereur, en 1809, dans la perspective d’y vivre une partie de l'année. En 1856, ses héritiers vendirent la propriété qui fut morcelée. Pierre-Alfred Chardon, fils d'un « médecin des pauvres », avait amassé une fortune considérable dans un magasin de confection du faubourg Saint Honoré, ce qui lui permit d'ouvrir en 1865 une maison de retraite pour les gens modestes. Il associa à son nom le nom de jeune fille de sa femme : Lagache. Pour bâtir la maison, il fit l'acquisition d'un lot : le bâtiment long avec sa chapelle axiale.
Hôpital Sainte-Perine. Tournées, vers des fonctions hospitalières depuis 1788, les Dames Augustines de Chaillot en avaient été chassées par le percement, en 1854-58, de l’avenue Joséphine (devenue av. Marceau en 1879) et étaient arrivées ici en 1860.
En 1889, la fondation Rossini, maison de retraite des artistes, était fondée grâce à un legs du compositeur Rossini qui avait habité le quartier.
16, Chardon Lagache, Max et Géo Chiquet, sc, 1934

1 ter, rue Molitor, PLU : Hôtel Delfau construit en 1894 pour Louis Marie Albert Delfau, agent commercial, et traité dans le style néo-roman en pierre de taille et briques ocres par Hector Guimard. Le tympan de grès est l'œuvre de Thimoléon Guérin, collaborateur habituel de Guimard pour ses monuments funéraires, et est orné d'un coq sur fond de fleurs réalisé par Muller qui surmonte la fenêtre de la chambre du maître. Ce modèle figura longtemps au catalogue et sur les supports publicitaires du céramiste. L'aspect de l'hôtel a été considérablement modifié lorsque les époux Delfau firent construire en 1907 une annexe à leur hôtel par l'architecte François Orliac et surélever la façade postérieure de
Guimard (modification du comble et de l'intérieur).

En 1872, la ville de Paris rachète le château Ternaux. L’école Normale d’Instituteurs y est logée en attendant la construction du bâtiment sur la rue Molitor. Aujourd’hui IUFM.

2-4-6, rue du Buis : Les bâtiments des n° 2, 4, 6 remontent au XVIIIème siècle et constituent des vestiges d'un hôtel qui a été transformé. Au n°6, maison d'angle présentant une façade composée de deux étages carrés sur rez-de-chaussée. Angle abattu. Le rez-de-chaussée est orné de refends. Les fenêtres du premier étage sont surmontées de mascarons et de guirlandes. Au n°4 se retira Olympe de Gouges. Ses positions furent toujours très proches de celles des hôtes de Mme Helvétius, dans le salon de laquelle on défendait le principe d'une monarchie constitutionnelle. En relation avec le marquis de Condorcet et l’épouse de celui-ci, née Sophie de Grouchy, elle rejoignit les Girondins en 1792. Elle fréquentait les Talma, le marquis de Villette et son épouse, également Louis-Sébastien Mercier et Michel de Cubières, secrétaire général de la Commune après le 10 août, qui vivait maritalement avec la comtesse de Beauharnais, auteur dramatique et femme d'esprit. Avec eux, elle devint républicaine comme d'ailleurs beaucoup de membres de la société d'Auteuil, qui pratiquement tous s'opposèrent néanmoins à la mort de Louis XVI : le 16 décembre 1792, Mme de Gouges s'offrit pour assister Malesherbes dans la défense du roi devant la Convention. Dans sa Déclaration des Droits de la Femme, 1791, elle avait écrit de façon prémonitoire "la femme a le droit de monter sur l’échafaud ; elle doit avoir également celui de monter à la Tribune". Elle sera guillotinée le 3/11/1793.
Le château Ternaux est loué à Madame Récamier qui y reçoit Lamartine, Chateaubriand. En 1853, c’est un pensionnat.
On prend rue Désaugier, on tourne à dr. rue d’Auteuil, puis à dr. rue Verderet.

2, rue Verderet, PLU : Immeuble de rapport construit en 1936 par Joseph Bassompierre, Paul de Rutté et Paul Sirvin abritant des studios, des chambres et un duplex. Profitant de l'exiguïté de la parcelle (78 m²), les architectes ont habilement transformé la contrainte en atout, grâce à une saillie en courbe sur les trois premiers niveaux, qui a ainsi permis de supprimer l'angle aigu du bâtiment. Le revêtement en casse de grès cérame or, les ferronneries du même ton des balcons supérieurs, la finesse des huisseries métalliques confèrent au bâtiment une apparence à la fois précieuse et moderne. Le traitement des façades, la couleur, la ligne courbe et le jeu de décrochement des derniers niveaux s'opposent aux tenants de la pureté et du dépouillement moderne des années vingt. Elle indique une vision adoucie de la modernité proche de celle de Michel Roux-Spitz ou de Madelin.

4, rue d’Auteuil, PLU : Chapelle Sainte Bernadette, construite entre 1936 et 1937 par l'architecte Paul Hulot en brique de Bourgogne sur une armature de ciment. Les verrières sont l’œuvre de Mauméjean. La façade-clocher parée de brique, réalisée en 1953 par Raymond Busse, annonce le bâtiment situé en retrait de la rue d'Auteuil. Emplacement du lieu de naissance de Pierre Chardon.

Vers 1667, Molière, on l’a dit, loge au coin de la rue d’Auteuil et de  l’avenue Théophile Gautier. La veille de la première d’Amphytrion, il s’est couché tôt, laissant Boileau, La Fontaine, Chapelle, La Bruyère, Racine boire seuls, racontera Louis Racine, le second fils de ce dernier, qui n’aura que 7 ans à la mort de son père. Chapelle, qui n’est pas gai, propose bientôt qu’on aille se jeter tous ensemble dans la Seine. L’acteur Baron appelle à l’aide son quasi-père adoptif. Molière descend, fait valoir qu’une aussi belle et grande action, qu’il approuve, doit se faire au grand jour : il faut attendre le matin. Dans l’intervalle, les candidats au suicide auront oublié leur projet.
On les imagine, d’après les mémoires fournis par Baron à Grimarest, mener une vie toute contemporaine : Molière joue au théâtre du Palais-Royal son Amphytrion, ou le Tite et Bérénice que lui a confié Corneille, et il habite Auteuil. Il est presque quotidiennement en bateau : il y monte au pont Royal et il descend là où, sous le pont Mirabeau, coulera la Seine. À bord, des moines qui s’arrêtent au couvent des Bonshommes de Chaillot, des paysans qui rentrent à Auteuil après avoir livré leurs produits aux marchés parisiens. Pendant le trajet, Molière discute avec l’ami Chapelle, si souvent à ses côtés, de la philosophie de Gassendi. Ou bien le jeune Baron avoue que quatre vers de son rôle lui paraissent obscurs. Molière se rend : il ne les comprend pas mieux ; par chance, Corneille vient dîner ce soir, on demandera à l’auteur. Mais Corneille lui-même n’est plus très sûr de ce qu’il a voulu dire ; il s’en tire par cette pirouette : « Récitez-les noblement : tel qui ne les entendra pas les admirera ».

8-10, rue Leconte de Lisle, PLU : Maisons individuelles réalisées par les architectes Pol Abraham et Paul Sinoir en 1924-25. Les façades des deux maisons construites pour le même client, l'ingénieur Marette, sont inspirées de l'architecture belge (Pompe, De Koninck) qu'Abraham avait connu l'année précédente. L'oriel du second étage, avec ses angles marqués et le balcon du troisième qu'il soutient, est l'élément essentiel de la composition, comme il sied à l'ouverture de la pièce principale sur la rue.

5-11, rue Leconte de Lisle, PLU : Ensemble de maisons disposées autour d'une voie privée. Le n°7 a été surélevé mais il conserve deux panneaux en bas-relief au-dessus des fenêtres du rez-de-chaussée. Au n°9-9bis, deux pavillons sur cour présentant deux façades composées d'un étage carré sur rez-de-chaussée.

17-23, rue Leconte de Lisle, PLU : Groupe de cinq maisons édifié en 1923-1925 par l'architecte Adolphe Thiers. Thiers a construit cinq maisons sur une parcelle délimitée par de nombreux angles dont il était propriétaire et dont il fut probablement le promoteur. L'intérêt de cet ensemble réside surtout dans le plan, l'architecte ayant réussi à obtenir des pièces régulières en disposant les services, cuisines, dégagements, escaliers le long des limites biaises, et à placer les garages sous la cour aménagée en jardin de façon à laisser chaque maison bénéficier de son sous-sol. La construction est en brique avec linteaux et corniches en béton armé, ainsi que les terrasses aménagées dans les décrochements. Les volets de bois, avec barres et écharpes, donnent à ces maisons une image de "résidence secondaire" avant la lettre.

Rue des Perchamps à dr. : 1927, le Studio Building d’Henri Sauvage, 2-4, Gal Largeau/21-35 rue des Perchamps/65-65bis-65ter La Fontaine. Le revêtement de Gentil et Bourdet, entreprise de Billancourt, souligne les volumes : gris sur le plat, marron en creux, multicolore sur les bow-windows des ateliers. Inscrit aux Monuments Historiques. Voir aussi dans le 16e sa Cité Argentine, 111, av Victor Hugo (1905), et l’immeuble du 28, rue Scheffer – rue Pétrarque (1928). Redescendre par la rue des Perchamps

85-87 rue La Fontaine, PLU : Immeuble construit par l'architecte Ernest Herscher en 1905 avec des détails influencés de l'Art Nouveau. Remarquables façades sur rue et sur cour. L'architecte a utilisé des consoles métalliques pour soutenir la loggia du dernier étage suivant un modèle proche de celui utilisé par son camarade d'atelier, Henri Sauvage, pour la villa Majorelle de Nancy (1898). Une abondante faune et végétation en pierre sculptée complète la décoration de la façade : des mésanges, un escargot et un lézard se promènent entre les feuillages entourant le portail d'entrée, tandis que les allèges des baies, les consoles des balcons et des bowwindows regorgent de campanules. "Les façades en briques roses de la cour intérieure révèlent une invention que l'on rencontre rarement dans ces lieux visibles des seuls résidents; la composition est toute en vigueur, encadrée par les fenêtres triples disposées en escalier qui suggèrent la fonction de circulation verticale dévolue aux angles". (in Catalogue Henri Sauvage. A.A.M. Bruxelles et S.A.D.G Paris, 1976.)

16, rue d’Auteuil : Saint-Jean de Passy est dans l’hôtel Véron, de la 1ère moitié du 18e siècle, dont sont protégés l’escalier, le vestibule, le salon, l’élévation, la rampe d’appui, le décor intérieur.

11-27, rue d’Auteuil : Ensemble cohérent de maisons représentatives de l'ancien village d'Auteuil s'étendant jusqu'au lycée J.-B. Say. Au n° 11, belle maison d'angle de trois étages carrés sur rez-de-chaussée, ornée de refends au premier étage et d'appuis soutenus par des consoles cannelées; la maison du n°19 est sommée d'une pittoresque lucarne à ferme débordante.