Charonne, un village à l'ombre des bougies






Balade pour les Équipages de la librairie éponyme, 61, rue de Bagnolet:

41, rue de Bagnolet / 2, rue Ligner. PLU : Immeuble de rapport en pierre de taille et brique construit par l'architecte Achille Champy en 1912 à l'angle de deux rues. Porte piétonne ornée d'une clef saillante. Étage noble desservi par un balcon soutenu par des consoles. Achille Champy a également construit dans le 11et a été architecte conseil pour l'Office Public des Habitations à Bon Marché de Colombes dans les années 1930.

24, rue de Bagnolet / 2, rue Monte-Cristo PLU : immeuble de rapport, 1909; bon exemple d'immeuble destiné à la clientèle des employés des arrondissements populaires à mi-chemin entre la construction sociale et le modèle de l'immeuble bourgeois en pierre de taille de la Belle-Époque.

Villa Riberolle : 1 à 23 ; 6bis ; 22-24, PLU ; atelier r-de-c, habitation à l’étage, très remanié. Ouverte en 1903 ; important atelier de moteurs électriques de General Electric.

15, rue de Bagnolet / 2quater cité Aubry, PLU : Maison d'angle caractéristique de l'ancien village de Bagnolet et composée d'un étage sur rez-de-chaussée. Deux lucarnes.

La rue de Bagnolet, entre le boulevard de Charonne et la rue de la Réunion, était comprise dans la rue de Fontarabie. Au lieudit Fontarabie, on trouvait comme à toutes les barrières des guinguettes. Ici les plus notables avaient pour enseigne Les Désirs des Français, La Chasse Royale, ou les Noces de Cana, du nom de son propriétaire, Jean-Gabriel Cana à la fin des années 1780 ; cette dernière existait toujours sous cette enseigne, devenue énigmatique, 70 ans plus tard. Y donner à manger gras, y laisser pratiquer le jeu était interdit durant le carême, et vendre du vin à l'heure des offices, toute l'année. Les vérifications étaient nombreuses et l'infraction punie de contravention comme on peut le voir en cliquant ici.

Au 44 rue Planchat, Université populaire Zola ; rattachée à la Société des Universités populaires qui a son siège à l’Hôtel des Sociétés Savantes, 28 rue Serpente.
 
49, 49bis, rue Planchat, PLU : Deux maisons du XIXe  siècle, témoignant de l'habitat du quartier. Elles présentent une façade composée d'un étage sur rez-de-chaussée et séparées par une cour.

Église St-Jean Bosco. Cette église en béton armé fut édifiée de 1933 à 1937. Elle fait partie des paroisses créées par le cardinal Verdier dans le cadre des Chantiers du Cardinal qui voulaient implanter des églises dans les banlieues ouvrières de Paris. L'architecte Rotter s'inspira de Perret et de son église du Raincy. Cette église, typique du style "art déco", a la grande chance d'avoir conservé son décor d'origine dans sa presque totalité, ce qui en fait un témoin important sur le plan artistique. Dans la crypte, des vitraux évoquaient la vie du Père Planchat, son apostolat dans le quartier, et sa mort comme otage de la Commune. Ils ont été déposés.

95bis, rue de Buzenval, PLU : Maison en meulière et brique. Façade composée de deux travées et présentant un décor rustique utilisant des briques de couleurs et soulignant notamment l'entourage des fenêtres. Porte d'entrée en plein cintre. Le sens aigu du pittoresque dont témoigne cette réalisation se lit encore dans l'appoint de la céramique (frises polychromes, beau linteau au-dessus de la croisée supérieure) et jusqu'aux joints de ciment injectés d'éclats de silex.

Rue des Vignoles : À la veille de la Révolution, la vigne, que coupe ici ou là un rideau de peupliers, que ponctue quelque noyer solitaire, occupe encore près de quatre-vingts pour cent du sol de Charonne Les particularités de l’exploitation de la vigne à Paris – pleine propriété, avec une stricte égalité dans l’héritage (mêmes conditions d’exposition et de pente) – aboutiront à des lanières de plus en plus étroites encore visibles dans le parcellaire, au sud de la place de la Réunion, par exemple.

32, rue des Vignoles, PLU, imm. 19e à usage actuel d’entrepôt. Décor très simple caractéristique de l’architecture des anciens faubourgs.
Au 33 rue des Vignoles, l'Union régionale de la CNT

Dans les années 1880, la Foire aux pains d’épices occupe le boulevard de Charonne, la place de la Nation et les rues qui l’étoilent dont le cours de Vincennes, la rue Philippe-Auguste, le boulevard Voltaire jusqu’à la mairie du 11e et le boulevard Diderot jusqu’à la rue de Reuilly. Née en 1719 à l’intérieur de l’abbaye de Saint-Antoine, la Foire est passée sur la voie publique en 1806, à compter du jour de Pâques, pour occuper pratiquement tout le faubourg. Elle s’appellera plus tard Foire du Trône avant de sauter finalement le périph’ et d’atterrir, en 1965, sur la pelouse de Reuilly.

64, bd de Charonne, PLU : Immeuble de rapport d'aspect vers 1850 présentant une façade sur rue composée de cinq travées et élevée de cinq étages carrés sur rez-de-chaussée. La composition de la façade, encore nettement tributaire des modèles Louis-Philippe, se distingue par son triplet central à hauteur de l'étage noble orné de pilastres et desservi par un balcon portant une grille de fonte finement ouvragée. Porte cochère surmontée d'un médaillon.

À l’été 1830, Martin Nadaud arrive de Villemomble avec son père par l’actuelle rue d’Avron. « Nous rentrâmes dans Paris par la barrière de Montreuil. C’était le 31 juillet ; ai-je besoin d’ajouter que mon émotion fut grande en voyant barricades sur barricades jusqu’à la Bastille ? Mais il nous fut impossible d’aller plus loin. Quel tableau pour un enfant [il a 14 ans et demi] qui sortait de son village ! (...) la population entière, combattants et non-combattants, était dehors, criant à pleins poumons : « Vive la Charte ! À bas les Bourbons !... »
Mais rue d’Avron, au Petit-Charonne, il n’y avait rien eu à voir : la rue, alors de Montreuil, n’est à cette date constituée que de cabarets, dont le plus tapageur, à la barrière, est celui des Quatre-Drapeaux ; elle ne commencera d’être habitée qu’après 1830.

15, rue d’Avron / 1-3, rue Planchat, PLU : Maison de faubourg à l'angle de deux rues composée d'un étage sur rez-de-chaussée. Combles éclairés par des lucarnes.

30, rue d’Avron /49, rue de Buzenval, PLU : Magasin et immeuble de rapport construit par l'architecte Louis-Charles Boileau en 1902 pour un négociant de nouveautés établi rue d'Avron. Les magasins occupaient une partie du sous-sol, le rez-de-chaussée et les deux premiers étages, reliés par un escalier et un ascenseur intérieur. Le troisième étage, marqué par un encorbellement, était occupé par l'appartement du négociant, les étages supérieurs étaient divisés en deux logements, et le septième en chambres séparées. Le métal et le verre dominent dans la partie réservée au magasin, mais les piles sont en brique de Vaugirard. Les parements extérieurs et les tableaux sont en brique blanche de Bourgogne, avec des joints creux passés au fer.

60, rue de Buzenval, PLU : Hôtel d'inspiration néo-Renaissance (traitement des lucarnes notamment) construit en 1902 par l'architecte Adolphe Vautrin. Le rez-de-chaussée est orné de refends. Balcons soutenus par des consoles ornés de garde-corps galbés en fonte au premier étage. La fenêtre à droite de la façade est cantonnée par deux pilastres et surmontée d'une frise.

Rue de Buzenval / 25-27, rue des Haies, PLU : Bâtiment des bains-douches municipaux, construit en 1924-1927 par les architectes-voyers Georges Planche et Henri Gaudruche. Bâtiment à structure béton et parement de brique. Décors de céramique polychrome sur le porche et la frise de couronnement. Il s'agit du premier équipement de bains-douches municipal autonome et il devait servir de prototype.
Le concours fut ouvert le 15 septembre 1924. Le projet retenu fut celui de deux architectes voyers au dépend de celui d'un entrepreneur de banlieue. Il prévoyait une séparation immédiate hommes-femmes qui occupent deux étages différents. Les locaux techniques sont au sous-sol, tandis que le logement du directeur occupe l'aile en retour sur la rue des Haies, avec entrée indépendante. Le programme exigeait aussi que ne fussent employés en façade "que des matériaux ne nécessitant pas d'autre ravalement qu'un nettoyage ou une brossage".
La brique convenait à merveille, employée avec quelques éléments de céramique bleue. Le bâtiment fut mis en service en 1927, premier d'une série de douze établissements semblables, réalisés au cours des années trente.

En diagonale, de l'autre côté du carrefour, le rail du palan de la Cie parisienne de distribution d'électricité, de 1909, dépasse pour peu de temps encore du porche d'angle, le bâtiment étant promis à démolition.

Le 6 janvier 1902 (alors qu'étaient flambant neufs les n° 49 et 60 de la rue) était découvert, rue des Haies, un véritable arsenal, nécessaire à régler le différend qui opposait la bande des Popincourt, commandée par Leca, à celle des Orteaux, dirigée par Manda (de son vrai nom Joseph Pleigneur), à propos de Casque d’or. C’est pour en qualifier les membres que le journaliste Arthur Dupin lança le mot d’apaches.

Rue des Vignoles ; place de la Réunion ; immeubles faisant l’arrondi dont un récent de l’Opac.
La vie communale est au Grand-Charonne, relié à son cadet par la rue de la Réunion (réunion du Petit et du Grand Charonne, sans rapport avec l'île) qui en tire son nom.

Le quartier en 1924 : Les ébénistes y gagnent de 200 à 250 F la semaine pour 48 heures de travail ; une chambre coûte de 20 F à 28 F la semaine, mais à 20 F, elle est vraiment sordide. Le restaurant le moins cher est celui des Coopérateurs, rue d’Avron, où l’on peut manger pour 3,25 F mais les parts y sont vraiment très petites. Pour la distraction, une demi-douzaine de cinémas, un Théâtre-Eden rue d’Avron, un café-concert. Sur 650 quotidiens que vend chaque matin la marchande du boulevard de Charonne, il y a 50 Humanité, et 150 exemplaires de journaux d’extrême gauche si l’on ajoute à l’Huma, l’Oeuvre et le Quotidien. Sur les murs, quelques affiches appellent à un rassemblement à la Bellevilloise « Pour l’évacuation immédiate de la Ruhr et du Maroc », une autre à une réunion des Jeunesses Communistes. Dans l’atelier où Jacques Valdour s’est fait embaucher, les graffitis des WC sont très politiques, il y voit même une citation de Lénine. 
La communauté italienne est forte dans le quartier, et ses hôtels meublés nombreux rue des Orteaux, rue de Buzenval, et surtout rue des Haies ; ses restaurants se trouvent surtout rue de Montreuil et bd de Charonne. Les Algériens, en 1924, se regroupent le midi dans le square de la place de la réunion.
 
17, rue des Orteaux : le moignon d'immeuble qui sert de contrefort à son voisin, inclus dans les secteurs de l’opération d’aménagement, confiée à la SIEMP, ayant pour mission d’éradiquer l’habitat insalubre, est en passe d'être remplacé par un bâtiment de 20 logements.

120, rue de la Réunion, le « Jardin naturel » est un musée de l’état sauvage ; on y est au confluent du château des Bragelongne (du 16ème siècle, qui disparaîtra sous le 2nd Empire), et de Montlouis. Le château s’étendait alors jusqu’à l’actuelle rue Ligner. Henri IV y était venu, Richelieu en était familier. Le bâtiment s’étirait à l’emplacement de l’actuelle rue des Pyrénées, le parc se prolongeait au nord jusqu’au clos Montlouis ; c’est à la jonction des deux, là où s’élève à présent le mur des Fédérés, que Louis XIV a vu Paris s’ouvrir à Condé et tirer sur les troupes royales.
Le côté sauvage du jardin appelle le récit de Jean-Jacques Rousseau :
« Le jeudi 24 octobre 1776, je suivis après dîner les boulevards jusqu’à la rue du Chemin-Vert par laquelle je gagnai les hauteurs de Ménilmontant, et de là prenant les sentiers à travers les vignes et les prairies, je traversai jusqu’à Charonne le riant paysage qui sépare ces deux villages, puis je fis un détour pour revenir par les mêmes prairies en prenant un autre chemin », raconte-t-il dans ses Rêveries du promeneur solitaire. Il n’a pas eu besoin de contourner le Père Lachaise, qui n’existe pas encore, et même, les Jésuites ayant alors été expulsés depuis une douzaine d'années, le statut de Montlouis est incertain, qu’il a pu traverser.
« Depuis quelques jours on avait achevé la vendange ; les promeneurs de la ville s’étaient déjà retirés ; les paysans aussi quittaient les champs jusqu’aux travaux d’hiver. La campagne encore verte et riante, mais défeuillée en partie et déjà presque déserte, offrait partout l’image de la solitude et des approches de l’hiver. (…)
 « Je m’amusais à les parcourir avec ce plaisir et cet intérêt que m’ont toujours donnés les sites agréables, et m’arrêtant quelquefois à fixer des plantes dans la verdure. J’en aperçus deux que je voyais assez rarement autour de Paris et que je trouvai très abondantes dans ce canton-là. L’une est le Picris hieracioïdes de la famille des Composées, et l’autre le Buplevrum falcatum de celle des Ombellifères. Cette découverte me réjouit et m’amusa très longtemps et finit par celle d’une plante encore plus rare, surtout dans un pays élevé, savoir le Cerastium aquaticum que, malgré l’accident qui m’arriva le même jour [le jeudi 24 octobre I776], j’ai retrouvé dans un livre que j’avais sur moi et placé dans mon herbier ».
Charonne ne compte alors pas même six cents âmes.

8 à 2, rue de Lesseps / 81bis, rue de Bagnolet, PLU : Séquence cohérente de villas sur jardin édifiées par l'architecte Camille Nivoit en 1889. La maison de l'architecte correspond au pavillon du n°4. Traitement et décor pittoresque utilisant la brique.

Aux environs du n°80 (alors n°20), était le jardin où les frères Jacquin, pépiniéristes du quai de la Mégisserie, faisaient pousser arbres, arbrisseaux, arbustes et plantes vivaces, dahlias qu'ils vendaient par nom et par couleur. L'un des frères fut maire de Charonne de 1844 à 1848.

Au 85, rue de Bagnolet, la "villa Godin", l'une de ces impasses (fermées) qui vont buter sur le Père-Lachaise et en ont la tranquillité champêtre. « Vous enterrez vos meubles ! C'est bien ça ? Je me suis demandé aussi pourquoi ce trou. Remarquez, mieux vaut faire ça que la décharge publique. Et puis, si on en a besoin un jour, au moins on sait où c'est. C'est pas toujours facile-facile de se séparer de certain meuble avec qui on a vécu, on s'attache ! C'est le Père-Lachaise qui vous a donné cette idée ? » (Alain Sevestre, Double Suicide villa Godin, p. 47, éditions de Minuit)

163, rue des Pyrénées, PLU : Maison faubourienne sur rue, prolongée par un bâtiment bordé d'une terrasse. Construction de trois niveaux en plâtre en pierre, implantée en profondeur le long du square Henri Karcher.

102bis, rue de Bagnolet. Construite vers 1860 (désaffectée en 1934), la gare de marchandises de la Petite-Ceinture allait attirer de nombreuses industries, plutôt à l’est des voies : parfumeries, savonneries, l’une des plus importantes fabriques de bougies stéariques de la capitale, rue Aumaire (aujourd’hui partie haute de la rue Vitruve; le plus gros contribuable de Charonne en 1859 est M. Baudoin, fabricant de bougies au n°21 de la rue Aumaire) ; l’usine de Houy-Navarre qui, à la Croix-Saint-Simon, confectionne papiers et toiles abrasifs, et celles qui font des ressorts pour crinolines, des tissus de caoutchouc, des couleurs, des boutons.
Charonne comptait quinze mille habitants à l’annexion. En 1866, la Petite-Ceinture ouverte au trafic voyageurs, c’est-à-dire ici aux déplacements de la main-d’œuvre, faisait circuler cinquante-six trains chaque jour, dans les deux sens, avec un premier départ à 4 heures 50 du matin.
Dès le Second Empire, les démolitions opérées au centre de Paris font refluer ici la population ouvrière ; la vente de terrains devient la principale activité de Charonne ; c’est alors que son château disparaît.
Au-dessus d’un tronçon de voie morte, la gare de Charonne est redevenue, à partir de 1995, un lieu vivant à l’enseigne de la Flèche d’or, ferroviaire sans doute, mais dans laquelle on peut voir une double allusion par la flèche aux Apaches et par l’or à une blonde fameuse qu’interpréta Simone Signoret.

Au 109, Benjamin Trigano et Philippe Starck ont fait d'une partie de l'immense parking à étages, plus tagué qu'un marin en bordée, le Mama Shelter, un hôtel branchouille avec de l'Apple partout, des sex toys à la réception, des scooters électriques à louer pour sillonner le Charonne popu.

108, rue de Bagnolet (et 22, rue Pierre Bonnard), charcuterie (auj. agence immobilière), décor intérieur 2e moitié 19e siècle : décor de marbre et fixés sous verre protégés MH depuis le 23 mai 1984.
L'église en 1858, dessin de Ransonnette; Gallica

L’église Saint-Germain-de-Charonne, avec de puissants contreforts autour d’une base du 13ème siècle, et un cimetière attenant, est celle d’un village et, aujourd’hui, le seul exemple de ce type restant à Paris.
Photo d'Atget, 1900; Gallica
Les ouvriers de Charonne ont payé un lourd tribut à la Semaine sanglante, et le mur surplombant le presbytère, au petit cimetière Saint-Germain-de-Charonne, est un autre mur des Fédérés, au pied duquel de nombreux restes, retrouvés près de trente ans plus tard de l’autre côté du chemin, ont été enterrés.
Derrière l’église Saint-Germain, le couvercle du réservoir semble le conservatoire du m2 étalon de gazon.

Des bâtiments 18ème siècle notables ont disparu savoir, au n°2, rue Saint-Blaise, l’hôtel construit par Jacques-François Blondel (1705-1774), et au 5, rue Saint-Blaise la maison des frères Le Camus de Mézières. Nicolas, architecte et théoricien de l'architecture (De la distribution des maisons de plaisance et de la décoration en général, 1737), né et mort à Paris (1721-1789) eut ici avec ses frères, Antoine et Louis-Florent, un petit théâtre particulier. En 1763, Le Camus de Mézières était chargé de construire une nouvelle halle aux blés sur l'emplacement de l'ancien hôtel de Soissons : la rotonde circulaire que nous connaissons, entourant une cour centrale à ciel ouvert, intégrant la colonne astronomique de Catherine de Médicis, seul vestige de l'hôtel construit pour elle au XVIe siècle. La rotonde sera couverte pour la 1ère fois en 1783 par les architectes Jacques-Guillaume Legrand et Jacques Molinos.
Le 5, rue St-Blaise par Atget; Gallica

134-36, rue de Bagnolet, PLU : Deux maisons jumelles "de vignerons" d'un étage sur rez-de-chaussée et soubassement, construite sur un terrain en forte pente. Le rez-de-chaussée est exhaussé par un soubassement qui permet de rattraper la pente. L'accès à chaque maison se fait par un escalier à double volée en fer à cheval menant à la porte piétonne et produisant un effet pittoresque. Entre les volées des escaliers, un soupirail permet un accès direct à la cave.

137, rue de Bagnolet, PLU : Maison d'un étage sur rez-de-chaussée et de deux travées, témoin du village de Bagnolet au XIXe  siècle. La porte d'entrée est encadrée de deux pilastres. A l'étage, la façade est ornée d'une niche centrale et de quatre pilastres. Corniche à denticule à la retombée du toit. Lucarne.
L'Ermitage par Atget; Gallica

Le pavillon de l’Ermitage, seul bâtiment 18ème de Charonne, était une dépendance de l'ancien château de Bagnolet, que limite ici la rue de Bagnolet entre la rue des Prairies et le boulevard Davout (situé sur la commune de Bagnolet, il avait son entrée dans l'axe de la rue des Orteaux, de l'autre côté du bd Davout). La Seigneurie de Bagnolet était devenue, en 1719, la propriété de la Duchesse d’Orléans, arrière arrière grand-mère du futur Philipe-Égalité, qui procéda, en 1769 (il n'était encore que duc de Chartres), à la vente complète du domaine de Bagnolet. La Duchesse d’Orléans avait fait construire l’Ermitage en 1734. Habité en 1792 par la comédienne Grandmaison, il sera le siège de la conspiration du baron de Batz, son amant, qui se proposait d’enlever Louis XVI pendant sa marche vers l’échafaud. La Grandmaison en paiera l’échec de sa vie, et la Révolution aura cette conséquence inattendue pour Charonne que les arbres de son orangerie, joints à ceux des serres des couvents et des petites maisons, que les émigrés vendent à l’encan, vont y donner naissance à une culture de l’oranger, sinon pour les fruits, essentiellement pour les fleurs et les feuilles, plus rentables.

[En allant au bout de la rue de Bagnolet, on trouvait une vaste carrière à plâtre, qui terminait ici l’arc de gypse parti de Montmartre, et qui avait été, à la fin de son exploitation, reconvertie dans le champignon et la barbe-de-capucin, cette salade d’hiver blanche, de la famille de la chicorée sauvage. Une autre partie de la carrière désaffectée, sur-remblayée (outre son comblement, elle avait été montée en colline, sans étayage suffisant) et donc trop fragile pour supporter autre chose que des pavillons, a pu de ce fait être lotie par une Société coopérative d’habitations à bon marché, La Campagne à Paris, dont soixante pour cent des souscripteurs, en 1907, exerçaient un métier manuel. La moitié de sa centaine de maisons individuelles a été achevée à l’été 1914, l’autre en 1928. À côté du quartier des Apaches, la Campagne à Paris, autour des rues Irénée-Blanc, Jules-Siegfried et Paul-Strauss, semble une réserve, isolée en haut de ses escaliers.]

La rue des Balkans a été nivelée par "l'atelier national" de Charonne pendant la révolution de 1848.

49bis-53, rue Vitruve / 3, place des Grès, PLU : Ensemble d'habitation sur cour du XIXe  siècle témoignant de l'ancienne urbanisation du quartier.

55, rue Vitruve, PLU : Maison sur cour témoignant de l'ancien habitat du quartier. Façade sobre élevée d'un étage carré sur rez-de-chaussée.

Rue Aumaire (aujourd’hui partie haute de la rue Vitruve). En 1817, le chimiste Michel Eugène Chevreul découvrit que le suif animal (utilisé pour la fabrication de bougies) était composé de deux acides gras (l'acide stéarique et l'acide oléique) et de glycérine. En éliminant la glycérine, Chevreul inventa la stéarine, permettant cette bougie moins malodorante qui fit la fortune de Baudoin (évoqué plus haut) à Charonne. Nommé, en 1824, directeur des teintures des manufactures royales, aux Gobelins, Chevreul, en s’intéressant aux couleurs,  passa de la chimie à l’optique : son essai de 1839, De la loi du contraste simultané des couleurs, allait influencer l’Impressionnisme et le pointillisme.

Un bâtiment moderne, de 1991, au coin Albert Marquet / Vitruve évoque les poêles dits Salamandre.

On recroise la rue des Orteaux. La rue des Orteaux était encore, en 1830, l’Ancienne Avenue de Madame, (la duchesse d’Orléans était "Madame" car l'épouse de "Monsieur", frère du roi, et père de celui qui serait le Régent), qui entre deux rangées d’ormes avait mené à son château de Bagnolet, dont nous reste le pavillon de l’Ermitage.
Dans la rue des Orteaux, en 1912, les Fratelli Crosio fabriquaient ces accordéons faisant tourner la tête de Simone Signoret qui, à l’envers de la valse, revient se river au regard de Serge Reggiani. Les Italiens étaient nombreux dans le quartier, vivant le plus souvent en hôtels meublés, dans cette rue, celle de Buzenval, celle des Haies. (En 1912, les frères Crosio étaient donc rue des Orteaux avec, en 1916, leur magasin-atelier 29 rue de Reuilly; en 1948, ils passaient rue René Boulanger, avant la rue Faidherbe.)

1 à 3 rue Vitruve / 38b-40 rue des Orteaux, PLU : École en brique de l'entre-deux-guerres.

A l'arrière des parcelles en lamelles qui, à gauche de la rue des Vignoles, rappellent les vignes disparues, on avait, 80, rue des Haies, l'entreprise G. Renault & Bon Dufour, fabricants de jouets, (soldats de plomb, châteaux forts ou bergeries miniatures), de la Belle Epoque aux années 1960. Rue89 lui a succédé en 2007 dans ce qui est devenu une pépinière d'entreprises.
La manufacture d'inox Létang-Rémy était voisine, qui se délocalisa en Seine-Maritime et licencia 130 ouvriers en 1978-79, avant d'être rachetée 20 ans plus tard par Guy Degrenne.