(huitième épisode de Paris des avant-gardes, commencé avec l'article d'août 2012)
Sur le couvercle d’une boîte de cigares.
Sur le couvercle d’une boîte de cigares.
Gallica |
Ses hospitalisations valent à Verlaine dix fois plus d’articles que la parution de Sagesse, et à son chevet
défilent Huysmans, Robert de Montesquiou, Marie Krysinska, la pianiste du Chat
Noir maintenant transporté 12 rue de Laval et dont la revue atteint désormais
un tirage de 17 000 exemplaires, Gabriel
Vicaire, le co-auteur des Déliquescences
d’Adoré Floupette, Francis
Poictevin, romancier disciple d’Edmond
de Goncourt et décadent, Maurice
Barrès et Anatole France, André Gide et Pierre Louÿs, enfin, le 8 janvier 1890.
Aux mardis, Francis
Viélé-Griffin, d’abord peintre, devenu poète sous l’influence de Jules Laforgue, introduit là par Henri de Régnier, aide Mallarmé à traduire le Ten O’clock, une conférence
donnée par Whistler le 20 février
1885, dans laquelle le peintre explique que le critique d’art ordinaire, à ne
voir dans un tableau qu’histoire ou anecdote, « la surprenante invention
qui aura fondu couleur et forme dans une si parfaite harmonie, ce que le
résultat a d’exquis, il demeure sans les comprendre. »
Vincent Van Gogh
a rencontré Signac dans la boutique
de couleurs du père Tanguy, et ils s’en
vont ensemble peindre à Asnières, où dans son atelier en bois, dans le jardin
de ses parents, ils visitent aussi Émile
Bernard renvoyé de l’atelier Cormon. Mallarmé vient de voir, à l’ex galerie
Goupil, boulevard Montmartre, - Boussod et Valadon successeurs -, que dirige Théo Van Gogh depuis une décennie, les
“Dix Marines d’Antibes“ de Monet.
« Je sors ébloui de votre travail de cet hiver, écrit-il au peintre ;
il y a longtemps que je mets ce que vous faites au-dessus de tout... »
Aussi lui
demande-t-il son concours pour un projet, le Tiroir de Laque, pour lequel il sollicite également Degas qui sans doute aime plus l’homme
que le poète, Renoir, et Berthe Morisot qui sera la première à
s’acquitter de sa tâche en lui donnant huit pointes sèches. Presque la seule
également, et quand, par l’intermédiaire de Verhaeren, le livre sera publié chez Deman, en 1891, sous le titre
de Pages, il aura simplement
un frontispice de Renoir.
A l'académie Julian, au 31 rue du Dragon, Sérusier rapporte à l'automne 88, à ses
amis Bonnard, Maurice Denis, Ibels, Piot, Ranson, Roussel, Vallotton, Vuillard, le talisman peint au bois d'amour de Pont-Aven par tons
purs juxtaposés sur le couvercle d’une boîte de cigares. Et quand s’ouvre
l’Exposition Universelle, au début de 1889, sur la place du Champ-de-Mars, en
face du Pavillon de la Presse, au café des Arts, dont Volpini est un directeur
qui n’a pas encore reçu ses glaces, les toiles du « Groupe Impressionniste
et Synthétiste » viennent en boucher les trous dans la tenture rouge
grenat. Profitant de l’aubaine, les amis ont uniformément encadré de baguettes
blanches dix-sept toiles de Gauguin,
vingt-trois d’Émile Bernard, celles de Laval,
d’Anquetin, de Schuffenecker, ont réalisé une affiche, rayée comme le drapeau
américain, et sont allés la coller eux mêmes, de nuit, dans tout Paris, montant
sur les épaules les uns des autres pour leur éviter, si haut, d’éventuelles
lacérations.
Les Nabis ou l’intelligence de la nature.
« L’Impressionnisme devenait le Synthétisme,
expliquera Maurice Denis, formule décorative, hiératique, de simplification et
de déformation, qui aboutissait au Symbolisme, c’est à dire à la transposition
de la nature dans le domaine de l’intelligence et de l’imagination ».
Villiers de
l’Isle-Adam a présenté à Mallarmé Georges
Rodenbach, le condisciple de Verhaeren à Gand. Maurice Denis fait déjà des
esquisses pour ce qui sera le frontispice de Sagesse, de Verlaine. Le 27
février 1890, chez Mme Eugène Manet,
devant une trentaine de personnes, dont Henri
de Régnier, Paul Dujardin, Théodore de Wyzewa, Mme Mallarmé, sa
fille Geneviève, et naturellement Julie Manet et ses cousines, Paule et Jeannie
Gobillard, future épouse de Paul Valéry,
Stéphane Mallarmé répète la conférence qu’il vient de prononcer dans plusieurs
villes de Belgique à commencer par Gand, consacrée à Villiers de l’Isle
Adam : « Un homme au rêve habitué, vient ici parler d’un autre, qui
est mort... »
Au printemps, les Eugène Manet achètent une propriété à
Mézy, près de Mantes, où une chambre est naturellement réservée à Mallarmé.
Quand il n’y vient pas, il écrit et adresse, par exemple, l’enveloppe de ce
quatrain : « Sans t’endormir dans l’herbe verte / Naïf distributeur,
mets-y / Du tien, cours chez Madame Berthe / Manet, par Meulan, à
Mézy. » Il en fera quantité comme cela, mettant même en vers la
gueule du lévrier qu’il a offert à Julie et qui transmet sans doute la lettre
des mains du facteur à celles de l’enfant. Mais il arrive aussi qu’il soit, à 9
heures, gare Saint-Lazare, salle d’attente de la ligne de Mantes, pour, avec
Berthe, faire le trajet d’une heure et, le dimanche 13 juillet 1890, aller avec
elle jusqu’à Giverny, chez Monet, qui lui offre, à l’issue de sa visite, une
petite toile, un méandre de rivière. « Une chose dont je suis heureux,
écrira Mallarmé à Berthe, c’est de vivre à la même époque que Monet. »
Vuillard dessine un programme pour le Théâtre Libre que
crée Antoine, soutenu par Lucien Descaves, et Sérusier
participera lui-aussi, plus tard, à cette entreprise pourtant
naturaliste ; Bonnard fait l’affiche France-Champagne que l’on voit
sur les murs de Paris, Gauguin est maintenant un visiteur du mardi tandis que
l’État refuse le don de l’Olympia de Manet au
Louvre. Les Nabis, selon le mot hébreu, qui signifie prophètes, que leur a
proposé le poète Cazalis, font leurs
débuts au Salon des Indépendants et chez Le Barc de Boutteville, 47 rue Le
Peletier. C’est dans cette boutique que se formera le jeune Vlaminck qui, alors militaire, écrit et
dans l’anarchie et, des
contes grivois, dans la revue Fin de
siècle.
Sérusier est « le Nabi à la barbe rutilante »,
Bonnard, le Nabi très japonard, Denis, le Nabi aux belles icônes, Cazalis, le
Nabi Ben Kallyre c’est-à-dire « à la parole hésitante ». A
l’instigation de Maurice Denis, ils vont se réunir tous les mois très régulièrement
jusqu’en 1896 pour le dîner de L'Os à moelle, chez Cabouret, passage Brady,
dans le 10e arrondissement, sans les femmes mais chacun apportant
une icône, une image qui sera le point de départ des discussions. « Se
rappeler qu’un tableau, a déjà écrit Denis – avant d’être un cheval de
bataille, une femme nue ou une quelconque anecdote – est essentiellement une
surface plane recouverte de couleurs en un certain ordre assemblées ».
Les verres, sur le marbre, tenaient une onde verte...
Dans une chambre d’hôtel exiguë, son installation au 110
rue du Bac n’étant pas encore achevée, Whistler réalise le portrait de Mallarmé
qui servira de frontispice l’année suivante à Vers et Prose. Gauguin achève, avant son départ, un autre
portrait du poète sur lequel charbonne un corbeau, référence à Poe que Mallarmé
traduit. Le 23 février 1891, Gauguin a mis 30 tableaux aux enchères à Drouot
pour financer son voyage à Tahiti, un mois plus tard, un banquet lui est offert
par ses amis, au café Voltaire, auquel est naturellement Mallarmé. Quand Gide,
que Barrès a présenté au Banquet Moréas, vient rue de Rome, il y a aux murs,
outre le Berthe Morisot et les Manet, « un paysage de rivière de Monet, un
autre portrait du poète, eau-forte de Whistler, un pastel de fleurs d’Odilon Redon. Sur le vaisselier, un
plâtre de Rodin représentant une nymphe nue saisie par un faune, et une bûche
de bois orangé où Paul Gauguin avait sculpté un profil de Maori », ainsi
que le décrit Camille Mauclair.
Le journaliste Jules
Huret entame, pour le Figaro, une vaste enquête sur l’évolution
littéraire. Si, du camp naturaliste, Paul
Alexis lui câble : « Naturalisme pas mort. Lettre suit. »,
quand il se tourne vers les Symbolistes, en tête desquels il a placé Mallarmé
et Verlaine, c’est au François Ier qu’il se rend pour rencontrer ce dernier, là
où Valery, que Pierre Louÿs, condisciple de Gide à l’école Alsacienne vient
d’amener aux mardis, ne le rencontrera jamais : « Quelque chose
d’invincible m’a toujours retenu d’aller faire la connaissance de Verlaine. /
J’habitais tout auprès du Luxembourg ; il m’eût suffi de quelques pas pour
atteindre la table de marbre où il siégeait de onze heures à midi, dans un
arrière-café qui s’achevait, je ne sais pourquoi, en grotte de rocaille.
Verlaine, jamais seul, était visible à travers le vitrage. Les verres, sur le
marbre, tenaient une onde verte, qu’on eût dit puisée dans la nappe émeraude
d’un billard, bassin de cette nymphée. »
Au Théâtre d’Art de Paul
Fort, à la fin de chaque représentation, le rideau reste levé trois minutes
sur un tableau nabi encore en chantier ou juste achevé. Le 21 mai 1891, à
l’initiative de Charles Morice, le
Théâtre d’Art donne au Vaudeville une représentation au bénéfice de Paul
Verlaine et de Paul Gauguin, un acte en vers de Verlaine, un autre de Catulle Mendès, une piécette de Maeterlinck, une enfin de Morice, avec
les meilleurs acteurs du temps dans des décors de Gauguin ; des lectures,
dont le Corbeau dans la traduction de Mallarmé ; illustrations des
programmes par Eugène Carrière,
Sérusier et Ary Renan, le petit
neveu d’Ary Scheffer. Finalement, le coût d’une mise en scène trop luxueuse
fait qu’il n’y aura pas de bénéfices, mais Debussy,
qui à 19 ans a été pianiste au Chat Noir qui s’ouvrait dans l’atelier de
Rodolphe Salis, et qu’on qualifiera un jour – en août 1900 - de « Verlaine
de la musique », était dans la salle et en a profité pour demander à
Maeterlinck la permission de mettre de la musique sur la Princesse Maleine, cette pièce qu’Octave Mirbeau, dans le
Figaro du 24 août 1890, saluait comme « l'œuvre la plus géniale de ce
temps, et la plus extraordinaire (...), supérieure en beauté à ce qu'il y a de
plus beau chez Shakespeare. »
Gallica |
La Revue Blanche et le parfum Idéal.
De nouvelles revues se créent : Pierre Louÿs fonde La Conque ; des lycéens de
Condorcet, Marcel Proust, Horace Finaly, Fernand Gregh, Robert
Dreyfus, Daniel Halévy, qui
forment déjà un groupe qu’ils désignent comme Le Banquet, en souvenir de celui de Platon, lui adjoignent
une publication. Surtout, en octobre est lancée la Revue Blanche, qui va réunir autour d’elle "des
peintres intelligents", comme l'écrira près de dix ans plus tard Thadée Natanson qui les oppose ainsi à
ceux du Salon des Artistes français. Dorénavant, on se retrouve dans les
bureaux de la revue, 1 rue Lafitte, qui deviennent un lieu de discussion comme
l’Os à moelle, et on y expose, comme Vuillard qui montre là ses travaux pour la
toute première fois.
Ici, même le parfum que Thadée envoie chercher chez
Houbigant par Lala, l’une des chambrières de son père, pour en imprégner ses
mouchoirs innombrables de chez Charvet, s’appelle "L'Idéal". Jules
Laforgue y écrit : « Je suis si exténué d’art. / Me répéter, quel mal
de tête ! » mais aussi : « Moi, créature éphémère, un
éphémère m’intéresse plus qu’un héros absolu... Telle grisette de Paris,... la
Jeune Fille d’Orphée de G. Moreau, nous fera seule sangloter, nous remuera
jusqu’au tréfonds de nos entrailles, parce qu’elles sont les sœurs immédiates
de notre éphémère, et cela avec son allure d’aujourd’hui, sa coiffure, sa
toilette, son regard moderne. »
Les Natanson s’installent l’été à la Grangette, à Valvins,
au bord de la Seine, pour être tout à côté de Mallarmé qui, depuis 1874, y loue
l’étage de l’ancienne auberge de Cayenne. Ceux qui, comme Vuillard, vont peu
aux mardis, viendront à la Grangette et fréquenteront là le poète, tandis qu’à
l’inverse, à Paris, on voit les Natanson à l’atelier qu’ont pris en commun
Bonnard, Maurice Denis, Vuillard et Lugné-Poe
au 28 de la rue Pigalle. Les trois derniers étaient condisciples au lycée
Condorcet, comme avec eux, Sérusier et Roussel. Un autre ancien, Gabriel Trarieux, emmène Maurice Denis
chez Mme Finaly pour qu’il y peigne un décor, et c’est l’occasion d’une
rencontre avec Gide et les poètes symbolistes.
Le peintre Henri
Lerolle, professeur à l’académie Julian et fondateur de l’Union centrale
des Arts décoratifs, ne craint pas de commander à Maurice Denis, qui n’a que 21
ans, un plafond peint, qui sera l’Échelle
dans le feuillage, où le fresquiste place quatre fois sa fiancée, Marthe Meurier. Henri Lerolle, bon
violoniste amateur, est le beau-frère d’Ernest
Chausson, et le soutien financier de Debussy, qui dédiera ses Images oubliées à l’une de ses
deux filles, Yvonne. « Il n’est pas défendu, lui recommande-t-il, d’y
mettre sa petite sensibilité des bons jours de pluie. » Maurice Denis
illustrera la Damoiselle élue
de Claude Debussy, rencontrera ici Ernest Chausson, Paul Dukas, Vincent d’Indy,
César Franck et, chez les Chausson,
à Paris comme au château qu’ils louent à Luzancy, en Seine et Marne, Raymond Bonheur, Degas, Henri de
Régnier, André Gide, Pierre Louÿs.
Personne n’a parlé comme lui.
Le matin du 10 mars 1892, une messe est célébrée à
Saint-Germain l’Auxerrois, accompagnée de trois extraits du Parsifal de Wagner, et de trois
fanfares pour harpes et trompettes d’Erik Satie. Cet office d’un genre nouveau
inaugure avec une pompe particulière le 1er Salon Rose+Croix qui
s’ouvre chez Durand-Ruel, en sa galerie du 11 rue Lepelletier. Un sâr Peladan, arrivé à Paris dix
ans plus tôt, a ressuscité un culte du 15e siècle dont il est, bien
sûr, le mage : « Le Salon de la Rose+Croix veut abattre le réalisme,
réformer le goût latin et créer une école d’art idéaliste. » A défaut d’un
culte durable, il se tiendra tout de même un salon annuel jusqu’en 1897,
dernière édition, galerie Georges Petit, à laquelle participera Georges Rouault, après qu’on n’aura vu
aux cimaises Rose+Croix aucun nabi, à l’exception de Félix Valloton, mais
Anquetin, Filiger, Khnopff, Schwabe, et Aman-Jean,
qui vient de faire un portrait de Verlaine sur son lit d’hôpital à Broussais.
Après la mort d’Eugène Manet, le 13 avril 1892, Berthe a
demandé à Stéphane Mallarmé d’être le tuteur de Julie. Quand Mallarmé arrive au
café Riche, où Renoir l’a invité à fêter son exposition, il sort d’un conseil
de famille. Du 7 au 21 mai, Renoir a montré les toiles de ce qu’il appelle
« sa manière aigre » - quand les autres disent « Ingres » -
ou le retour du dessin quand, après son voyage d’Italie, il avait pris
conscience d’être allé « au bout de l’Impressionnisme » et de ne
savoir « ni peindre, ni dessiner. »
Debussy a introduit le prince Poniatowsky chez Mallarmé,
Paul Valéry a été emmené aux mardis par Pierre Louÿs : « Je fus
frappé par la douceur de l’homme et de l’intérieur, par la couleur générale des
choses qu’éclairait une lampe toute baignée de nos fumées, par la grâce un peu
ironique de Geneviève Mallarmé, par la voix délicate, grave, merveilleusement
musicale de son père. Personne n’a parlé comme lui. »
Berthe Manet a laissé le rez-de-chaussée du 40 rue de
Villejust pour louer de l’autre côté de l’avenue Foch, rue Weber, un
appartement dont elle transforme une partie en atelier ; c’est là
désormais que se font les visites de Mallarmé, Degas ou Renoir. Les Nabis se
retrouvent le samedi après midi dans l’atelier de Paul Ranson, 25 boulevard du
Montparnasse, « le Temple », dont France, Mme Paul Ranson, est
« la lumière ». Ils se réunissent aussi, le premier dimanche de
chaque mois, dans les salons du conseiller d’État Georges Coulon, grand ami de
Casimir Ranson, député radical-socialiste et père de Paul. Ils ont chez lui
leur théâtre de marionnettes, auquel travaillent Maurice Denis, Lacombe,
Verkade, Sérusier et Vuillard, les costumes étant réalisés par France Ranson et
Marie Vuillard ; le dimanche des rameaux, ils y ont donné les Sept Princesses de
Maeterlinck.
Verlaine la prend au sucre
Dans les locaux de la Revue Blanche, a lieu une
grande rétrospective de Georges Seurat.
On y voit le seul portrait qu’il ait fait, une Jeune femme se poudrant, dans le miroir de laquelle était
aussi son unique autoportrait, jusqu’à ce que l’un de ses amis lui signale que
cela pouvait donner à jaser sur de prétendus liens l’unissant au modèle.
Maintenant qu’un vase de fleurs l’a remplacé, et qu’il est mort, ils savent que
la jeune femme, Madeleine Knobloch, était précisément la compagne du si secret
Seurat.
Gustave Moreau est maintenant professeur aux Beaux-Arts.
« Il voudrait nous faire croire que les dieux portaient des chaînes de
montres », disait de lui Degas, toujours si drôle. Mais ce n’est pas là ce
que le maître enseigne, plutôt une technique très savante alliée au respect de
la personnalité de chacun. Pour Rouault par exemple, déjà son élève, il fera
beaucoup plus, le soutiendra de toute sa confiance.
Après Villiers de l’Isle-Adam en 1888, après Mallarmé deux
ans plus tard, Verlaine est invité à Gand par Maeterlinck pour une conférence,
en 1893. A son arrivée en gare, « une fenêtre de troisième classe s’ouvre
à grand bruit et encadre la tête faunesque du vieux poète qui nous crie :
- Je la prends au sucre ! » C’est devenu son salut habituel, sa
façon gentiment cavalière d’exiger, avant toute autre chose, son absinthe.
Le tout jeune critique Camille Mauclair s’est associé
à Lugné-Poe, qui n’a guère que deux ans de plus, pour fonder le Théâtre de
l'Oeuvre ; le 17 mai 1893, ils montent Pelléas et Mélisande, de Maeterlinck, aux Bouffes parisiens,
devant Mallarmé, Henri de Régnier, James Whistler, Henri Lerolle, Léon Blum et Claude Debussy. Déjà
peut-être celui-ci songe-t-il au drame musical en retrouvant Gabrielle Dupont au 10 rue Gustave Doré
où ils viennent de s’installer après la rue de Londres : « Je voulais
à la musique une liberté qu'elle contient peut-être plus que n'importe quel
art, n'étant pas bornée à une reproduction plus ou moins exacte de la nature,
mais aux correspondances mystérieuses entre la Nature et l'Imagination. »
A la fin de l’année, sa décision sera prise.
Marthe Meurier se dédouble, se décuple pour être à la fois
le modèle de Toutes les Muses
de Maurice Denis. Bonnard, Vuillard, Sérusier, Roussel - qui épouse Marie, la
sœur de Vuillard -, sont les décorateurs du Théâtre de l’Oeuvre, et dessinent
les programmes pour les représentations données le plus souvent aux Bouffes du
Nord. Bonnard multiplie pour la Revue Blanche lithographies puis
affiches. Ibels peint Verlaine assoupi sur la banquette verte du Voltaire,
Eugène Carrière, délaissant ses maternités charbonneuses qui faisaient dire à
Degas : « On aura encore fumé dans la chambre des enfants »,
fait son portrait ; Bonnard illustre une réédition de Parallèlement : le poète postule, à l’Académie
française, au fauteuil de Taine !
La peinture et le perroquet.
Gauguin est revenu de Tahiti et s’en est retourné, avec
Charles Morice et Henri de Régnier, aux mardis de la rue de Rome ;
surtout, ayant touché un héritage, il donne de bruyantes soirées dans son
atelier du 6 rue Vercingétorix, au 2e étage, où il s’est installé
avec Annah la Javanaise, un singe, et un perroquet. Ce n’est pas lui qui aurait
pu répondre à Eugène Carrière lui demandant, devant l’explosion de ses couleurs
quelque terne que fût l’objet représenté, jusqu’où il irait donc s’il avait à
peindre un perroquet, comme le ferait Matisse : « Je ne sais pas
trop, je n’ai pas de perroquet. » Lui en a un ! Le 4 novembre 1893,
Gauguin exposait ses œuvres tahitiennes chez Durand-Ruel ; c’était un
fiasco complet.
Félix Fénéon, le
théoricien des Néos-impressionnistes plus que de la guerre sociale, est inculpé
dans l’opération anti-anarchiste qui, en vertu de « lois
hyper-scélérates », frappe extrêmement large et connaîtra son épilogue
dans le « procès des 30 », le 8 août 1894. Signac avait fait de lui
un portrait dont le titre aurait suffi à éclairer le jury sur les théories de
l’accusé : Sur l’émail d’un fond rythmique de mesures et d’angles, de
tons et de teintes, portrait de M. Felix Fénéon. Un autre témoin de
moralité picturale, Toulouse-Lautrec, l’aurait montré en spectateur de la danse
mauresque de la Goulue, à la Foire du Trône, aux côtés d’Oscar Wilde et de Jane
Avril. Qu’en aurait pensé la cour ?
Mallarmé part en retraite, il résidera maintenant de plus
en plus à Valvins. Quand les Natanson et leurs amis y arrivent avec le bateau à
vapeur de Paris, ils l’aperçoivent sur son voilier, "La Yole à Jamais
Littéraire" marquée de ses initiales, S.M., qu’il vernit, grée et astique
lui-même avec un soin maniaque.
Verlaine est élu sinon à l’Académie, du moins Prince des
Poètes à la mort de son vieil ennemi Leconte de Lisle. Son Altesse vit écartelée
entre deux maîtresses Eugénie Krantz,
qui sous le nom de Nini Mouton a été en vogue au bal Bullier sous le Second
Empire, et Philomène Boudin, dite
Esther en galanterie. Quand, le 25 octobre 1894, aux Soirées du café Procope,
une nouvelle représentation à bénéfice est donnée, avec au programme Madame
Aubin, comédie en un acte, une conférence de Laurent Tailhade et des récitations de vers, devant Yvette Guilbert, les Rothschild, Jules Claretie et l’on en passe, c’est
l’ex Nini Mouton qui est la plus rapide pour lui en extorquer la recette.
A l’été 1895, Émile Verhaeren est à Paris, chez Signac qui
lui a laissé son appartement du 15 rue Hégésippe Moreau pendant qu’il est à
Saint-Tropez. Verhaeren déjeune chez Toulouse-Lautrec, Henri de Régnier, les
Rodenbach, dîne chez Vielé-Griffin. Bientôt, c’est Maurice Maeterlinck qui
vient s’établir à Paris avec la cantatrice Georgette
Leblanc, la sœur de Maurice, le père d’Arsène Lupin.
« La tombe aime tout de suite le silence... »
Berthe Manet est morte. Mallarmé, Geneviève sa fille,
Renoir et Degas, continuent d’aller voir Julie qui est retournée rue de
Villejust mais y habite désormais avec ses cousines un appartement du 4e
étage où Degas prend une photo que Paul Valéry décrira ainsi :
« Auprès d’un grand miroir, on y voit Mallarmé appuyé au mur, Renoir sur
un divan, assis de face. Dans le miroir, à l’état de fantômes, Degas et
l’appareil, Madame et Mademoiselle Mallarmé se devinent. Neuf lampes à pétrole,
un terrible quart d’heure d’immobilité pour les sujets furent la condition de
cette manière de chef-d’œuvre. »
Le 1er Salon de l’Art Nouveau s’ouvre chez Bing
le 25 décembre 1895, avec 600 articles, et une forte participation des Nabis.
Gauguin est reparti, définitivement, pour les îles malgré le résultat piteux
d’une seconde vente aux enchères à Drouot. De là-bas, il écrira que « La
couleur est vibration de même que la musique. » Comme en prélude au Salon
de l’Art Nouveau, Debussy a donné celui à l’Après-midi d’un faune, le 22
décembre, devant Mallarmé et Louÿs, dans le cadre de la Société Nationale de
Musique, salle Érard, 13 rue du Mail.
Verlaine s’éteint le 8 janvier 1896, au 39 rue Descartes,
son dernier domicile après qu’il eut habité, entre Esther et Eugénie, de part
et d’autre de la montagne Saint-Geneviève, 5 rue Broca, 20 rue de la Glacière,
48 rue du Cardinal Lemoine, 16 rue Saint-Victor, entre autres. Cinq mille
personnes suivent le cercueil de cette adresse à l’église Saint-Etienne-du-Mont
voisine, puis jusqu’au cimetière des Batignolles, où Mallarmé lui rend
hommage : « La tombe aime tout de suite le silence... »
Frontispice d'Odilon Redon. Gallica |
Bonnard expose pour la première fois chez Durand-Ruel, et Alfred Mellerio, que l’on verra à ses
côtés dans le tableau de groupe des Nabis peint par Denis, théorise Le mouvement idéaliste en peinture :
« Le réaliste prend pour but final de reproduire la nature dans la
sensation directe qu’elle fait éprouver ; l’idéaliste ne veut y voir que
le point de départ éloigné de son œuvre. Tout réside pour lui dans la transformation
cérébrale entièrement subjective que lui fait subir notre esprit. »
La Grangette devenant trop petite, les Natanson se sont un
peu éloignés, à Villeneuve-sur-Yonne, mais de toutes façons quand Mallarmé
meurt à Valvins, début septembre, les vacances sont finies et de l’un et
l’autre village les amis sont partis. Dans le cimetière de campagne, le
dimanche de l’enterrement, « M. Renoir est bien émotionné ; Roujon
prononce en tremblant quelques paroles au nom des vieux ; Paul Valéry prend
ensuite la parole au nom des jeunes ; mais il est tellement émotionné qu'il ne
peut continuer », note Julie Manet dans son journal.
Cet impressionniste est musicien.
L’hiver précédent, Mallarmé travaillait avec Odilon Redon à
la réalisation d’Un coup de
dés, le peintre se proposant de « dessiner blond et pâle »
pour que l’on pût tenter l’impression sur papier blanc, directement sur celui
du texte. Le roman de Camille Mauclair, le
Soleil des morts, qui paraît à ce moment, prolonge la vie des mardis de
la rue de Rome et de la maison de Valvins.
Théo Van
Rysselberghe et Maria, sa femme, qui sera « la petite dame » de
Gide, son amie et confidente, s’installent à Paris, à la Villa Aublet du 44 rue
Laugier, tandis que les Verhaeren emménagent 206 rue Championnet, dans la tristesse
qui suit la mort de Mallarmé, et un mois
avant que ne meure à son tour Georges Rodenbach. Chez Durand-Ruel, la dernière
exposition d'ensemble des Nabis se tient, en 1899, en hommage à Odilon Redon.
Mais déjà, à l’Académie Carrière, dans la cour du Vieux Colombier, où Eugène
vient corriger une fois par semaine, Matisse, qui s’est lié dans l’atelier de
Gustave Moreau avec Marquet, Camoin et Manguin, rencontre maintenant Derain
et Jean Puy. De Gustave Moreau
professeur, Suarès écrira : « Ils ne savent même pas ce qu’ils lui
doivent. Nul éloge ne vaut celui-là. Il a eu la vertu de comprendre ce qui lui
était le plus contraire et qui aurait dû lui répugner le plus. »
Les quatre premiers font atelier commun à l’académie
Camillo, rue de Rennes et, sur le motif, Matisse et Marquet, son cadet de six
ans, se retrouvent autour du Pont Saint-Michel, à côté donc de l’appartement de
l’aîné qui s’est installé sur le quai au 2ème étage du numéro 19, devant
Notre-Dame, au Luxembourg. Un petit héritage a permis à Manguin d’acquérir, 61
rue Boursault (auj. La Bruyère), une maison flanquée d’un petit jardin, où il
est possible d’installer un atelier démontable. Quand l’académie Camillo aura
fermé, quand on aura épuisé le charme de l’atelier de Jean Biette, rencontré à l'académie Carrière et installé rue Dutot,
dans le 15e, on se retrouvera chez Manguin.
Le propriétaire et Jeanne sa femme y reçoivent Debussy et
Ravel, que Matisse accompagne parfois au violon. Concernant Debussy, Jean
Marnold écrira, après Pelléas et Mélisande, que « Le compositeur
est un artiste de la plus rare originalité. Il a trouvé des nuances
insoupçonnées pour colorer l'interprétation de sentiments, d'images, d'«
impressions ». Il affectionne tout particulièrement le terme « impression »;
[…] Mais cet impressionniste est musicien. Ses « impressions » se traduisent
naturellement en combinaisons sonores, et les « impressions » neuves,
inopinées, qu'il suscite chez autrui, sont la conséquence de combinaisons
inédites, nouvelles. » Le petit groupe de peintres qui subissent
l’ascendant de Matisse travaillent par tons purs, avec des bleus, des
écarlates, des orangés.
Au Salon des Indépendants d’avril 1901, dans les Serres de
la ville de Paris, Matisse et Marquet sont les deux seuls à s’exprimer ainsi, tandis
que Verhaeren évoque dans le Mercure de France, les néo-impressionnistes :
Signac, Van Rysselberghe, Cross, Luce ; Ensor qu’il met un peu à part, et les symbolistes : Denis,
Vuillard, Bonnard qui exposent autour de deux toiles de Cézanne.
Van Gogh plus que mon père.
Jacques-Émile
Blanche, André Gide et ses amis, etc. Détail |
Chez Bernheim jeune, rue Laffitte, la rétrospective Van Gogh du printemps donne à
voir l'Arlésienne, la Chambre à coucher, la Nuit étoilée... Derain et
Vlaminck sont venus s’y conforter dans la voie qu’ils explorent ensemble à
Chatou ; Vlaminck est bouleversé : « ce jour-là, écrira-t-il,
j’aimai Van Gogh plus que mon père. » Derain l’y présente à Matisse, et
peu après tous trois exposeront ensemble dans la toute petite galerie de la
menue Berthe Weill, rue Victor
Massé.
Aux Indépendants, Verhaeren a vu également, de Jacques-Émile
Blanche, André Gide et ses amis au café
maure lors de l'exposition universelle de 1900, à savoir André Gide, Henri Ghéon, Eugène Rouart, le mari d’Yvonne
Lerolle, Charles Chanvin et Athman-ben-Sala, le jeune homme que
Gide aurait volontiers ramené de Tunisie cinq ans plus tôt si sa mère, et
Marie, la vieille servante, n’avaient poussé les hauts cris. Par bonheur, Ghéon
vient de trouver une solution au problème. « La caractérisation de chaque
modèle est en tout point réussie et la personnalité se devine. Les attitudes
sont naturelles et spécialisées. L’ensemble est ancré dans la vie. Seul, le
sourire de M. Ghéon se fige » écrit Verhaeren, qui juge que Blanche se
rapproche-là « de ce grand et discret peintre qui a nom
Fantin-Latour ».
On retrouve André Gide, la tempe appuyée sur sa main
droite, écoutant Émile Verhaeren qui, chez lui, à Saint-Cloud, fait la lecture
à Félix Le Dantec, Francis
Vielé-Griffin, Henri-Edmond Cross,
Maurice Maeterlinck, les bras croisés sur le dossier du fauteuil de
Gide, Félix Fénéon, accoudé à la cheminée, Henri Ghéon, et l’on cite aussi Stuart Merrill, tels que les a peints
Théo Van Rysselberghe dans sa Réunion
littéraire, trois ans plus tard.
Le 15 octobre 1904, le Salon d'Automne ouvre au Grand
Palais, Matisse y expose quatorze œuvres. Quatre ans plus tôt, avec Marquet,
ils y peignaient des guirlandes au plafond pour gagner leur vie ; Marquet
disait, en rigolant : - Encore six heures et nous aurons fini notre
journée. Matisse lui criait : - Tais-toi, ou je te tue ! Aujourd’hui,
c’est Othon Friesz, le Viking venu
du Havre avec Dufy, son camarade d’enfance, qui est frappé par une sorte de
révélation. Dufy aura un temps de
retard : « Devant le Luxe,
Calme et Volupté de Matisse, j’ai perçu de nouvelles raisons de
peindre, et le réalisme impressionniste perdit pour moi son charme, à la
contemplation du miracle de l’imagination introduite dans le dessin et la
couleur. » Le duo havrais, après celui de Chatou, rejoint les anciens de
l’atelier Gustave Moreau. Chez Manguin, Matisse et Marquet peignent et s'y
peignent peignant le même modèle, et L’Académie
rue Boursault, qui y vient sur la toile n’a toujours pas pu être
attribuée de façon certaine à un seul des trois.
La cage aux Fauves.
Il leur manquait un nom. Au Salon d’Automne de 1905, ont été
mis ensemble par le placeur Matisse avec la
Fenêtre ouverte, peinte à Collioure, et la Femme au chapeau, la sienne, posant quai Saint-Michel, La Promenade, La Jeune Femme en Robe japonaise au Bord
de l'Eau ; Vlaminck, avec La Vallée de la Seine à Marly, La Maison de mon Père, Le
Crépuscule, L'Étang de
Saint-Cucufa ; Marquet et Anthéor, Menton,
Agay, Les Rochers rouges du Trayas, Camoin, Manguin qui expose La Sieste, Sur le Balcon, Sous
les Arbres, Les Chênes Lièges,
Le Pré, Valtat, et Rouault,
le marginal. « Comme, au centre de la galerie où voisinaient les purs,
on avait installé par contraste, un gracieux petit buste d’enfant d’Albert
Marque, Louis Vauxcelles qui passait
là, dit à Matisse : - Tiens ! Donatello dans la cage des
fauves... La boutade, répétée, se cristallisa en définition. »
Pour Noël, André Gide qui patientait depuis des mois -
« J’attends de cette maison ma force de travail, mon génie. Déjà tout mon
espoir y habite », écrivait-il dans son Journal du 17 mai -,
emménage avenue des Sycomores, dans la villa Montmorency. Cocteau décrit la
maison que Gide y a fait construire comme une « maison symbolique, où les
fenêtres ne regardent pas en face. A l’intérieur, des couloirs, des escaliers
s’entrecroisent, se contredisent. » Dès l’entrée, un escalier grimpe ainsi
autour des quatre murs jusqu’en haut, et ne dessert pas pour autant toute la
maison. Dans ce hall, l’Hommage à
Cézanne, de Maurice Denis : dans la galerie d’Ambroise Vollard,
autour d’un tableau de Cézanne, on voit, à
gauche, Redon, Vuillard, Mellerio, le critique d’art, Vollard et Denis lui-même
et, à droite, Seruzier, Ranson, Roussel, Bonnard et Marthe Meurier devenue Mme
Maurice Denis.
Dans le grand salon, René
Piot peindra autour de la cheminée, cinq ans plus tard, une immense
fresque représentant des groupes de
danseuses au milieu de papillons. Mais Gide donne lecture de ses manuscrits à
ses amis dans sa bibliothèque, depuis un pupitre surélevé de quelques marches,
dans cette salle comme une église, montant jusqu’à la charpente, avec ses
petites fenêtre placées tout en haut du mur, sous le toit. Derrière le lutrin,
la porte menant à son cabinet de travail comme à la sacristie : une toute
petite pièce avec un fauteuil et un bureau encastré dans le mur.
Matisse et Friez ont installé un atelier dans l'ancien
couvent des Oiseaux, que la nouvelle loi sur les congrégations vient de libérer,
84-88 rue de Sèvres. Matisse y peint la
Joie de Vivre, qui sera aux Indépendants de 1906, - vernissage le 20
mars -, et qu'achète aussitôt Léo Stein.
Dans l’appartement de Matisse, 19 quai Saint-Michel, le décor est étrangement
semblable à celui de Mallarmé : des Baigneuses de Cézanne, une Tête
de garçon de Gauguin, un plâtre de Rodin, tous achetés chez Vollard, et
deux pastels d'Odilon Redon.
Le Rat Mort de Derain |
et celui de Vlaminck |
Après Monet et Degas, Vlaminck peint le Rat mort, où Rimbaud poignarda Verlaine, où
fréquenta « la petite danseuse de 14 ans », Marie van Goethen, et Derain y trouve la Femme en chemise. Ambroise Vollard, le marchand des
Nabis, a pris des engagements avec Derain dès février 1905, et acheté en bloc
tout l'atelier de Vlaminck un an plus tard.
Madame Matisse figure doublement dans les salons des Stein,
27 rue de Fleurus et rue Madame, Gertrude et Léo ont acquis la Femme au
Chapeau, Michael et Sarah son Portrait
à la raie verte. Matisse rencontre là Picasso dont Léo et Gertrude
viennent d'acheter la Fillette au
panier de Fleurs.