-
23, rue Turenne, Hôtel Colbert de Villacerf, surintendant des bâtiments du roi, (de 1650, il restera dans la
famille jusqu’en 1755); fontaine au fond de la cour datant de 1650, ce qui en
fait la plus ancienne des fontaines parisiennes du 17e siècle ; l'hôtel a
été exhaussé de 3 étages en 1931.
-
fontaine de Caron, de 1783, de style maniériste, au fond de l’Impasse de la
Poissonnerie, du marché Ste-Catherine. La "culture Sainte-Catherine"
est le riche enclos, au long du rempart de Philippe-Auguste, d’un prieuré fondé
en 1229 par les sergents d’armes de Philippe Auguste en accomplissement d’un
vœu fait à Bouvines. La culture Sainte-Catherine est rachetée par le roi en
1767 pour l’édification d’un marché, finalement redessiné par Soufflot, dont la
première pierre sera posée en avril 1788.
- 11, rue de
Sévigné (ancienne rue Culture-Sainte-Catherine), ancien établissement de bains évoqué
par Hugo : « le passant qui s’arrête rue Culture-Sainte-Catherine,
après la caserne des pompiers, devant la porte cochère de la maison des Bains,
voit une cour pleine de fleurs et d’arbustes en caisses, au fond de laquelle se
développe, avec deux ailes, une petite rotonde blanche égayée par des
contrevents verts, le rêve bucolique de Jean-Jacques. Il n’y a pas plus de dix
ans, au-dessus de cette rotonde s’élevait un mur noir, énorme, affreux, nu,
auquel elle était adossée. C’était le mur du chemin de ronde de la
Force », écrit Hugo dans Les
Misérables, en 1862.
Explication de
texte : - « maison des Bains » parce que cet établissement a
succédé en 1812 au théâtre du Marais, inauguré en 1791, que Beaumarchais avait
fait construire avec des matériaux de la Bastille démolie. (Plaque
commémorative)
- « rue
Culture-Sainte-Catherine » à cause du prieuré longeant l'enceinte de
Philippe Auguste ; la rue correspondait au chemin de ronde ; il y a des
restes d’une tour de l’enceinte dans la cave du n°7, chez les pompiers. A l’angle de la caserne
marques de censive.
- « la
caserne des pompiers » parce que ceux-ci sont installés dès la Restauration dans l’hôtel Poulletier du n°7 ;
- « Il n’y
a pas plus de dix ans » parce que c’est en mai 1850 que les deux prisons
de la Petite et de la Grande Force ont été fermées et leurs huit cent quarante
détenus transférés à Mazas.
- N°9 rue de
Sévigné se trouvait l’hôtel du comte de Chavigny, ministre de Louis XIII, un
hôtel Renaissance modernisé à partir de 1642 par François Mansart (1598-1666), auquel est
attribué la façade sur jardin ; y subsiste un plafond peint attribué à
Mignard. Le domaine, divisé à la fin du XVIIème siècle, fera place à deux hôtels :
l’hôtel « de Mansart », réaménagé, s’ouvrira pour la première fois
sur la rue de Sévigné.
- Au n°5 de la
rue de Sévigné, la maison (plaque) garde le souvenir de la philanthropie de
François-Vincent Raspail, qui y soigna gratuitement les pauvres de 1840 à 1848
avant de prendre part à la révolution de février 1848 et d'être élu député.
- la grande
éloquence des sermons emplit la nef de l’église Saint-Louis des jésuites, achevée en 1647, et
connaît son acmé le Vendredi saint, jour pour lequel les laquais y retiennent
physiquement la place de leurs maîtres dès le mercredi ! La voix de
Bossuet, durant les dix ans suivant 1659, date à laquelle il a été appelé à
Paris par Vincent de Paul, et, à la décennie suivante, le timbre de Bourdaloue,
logicien dont la dialectique implacable vous prend dans son étau et vous
« ôte la respiration », à en croire Mme de Sévigné, auditrice assidue
sauf si « la presse était à mourir ». Étouffée, oui, mais seulement
par le prédicateur !
Puis tonnent
les grandes orgues : Marc Antoine Charpentier prend la maîtrise de la
musique des jésuites en 1689, celle dont le jour de gloire est la Saint-Louis, le 25
août, fête du Roi-Croisé qui partage son nom avec le Roi-Soleil, dans le même
temps où François Couperin, dit le Grand, succède à la tribune de Saint-Gervais à
son oncle et à son père et y compose, avant d’avoir 20 ans, ses deux premières
Messes.
Mme de Sévigné,
mariée à Saint-Gervais, est fidèle à Saint-Louis : « L’après-midi
nous fûmes à l’église des jésuites de la rue Saint-Antoine pour entendre le
sermon de l’évêque de Valence [Daniel de Cosnac, premier aumônier de Monsieur,
frère du roi]. Le roi, la reine, M. le cardinal et la plupart des grands
de la cour y assistèrent. Tout autour de l’église, on voyait plus de quatre
mille cierges allumés, outre les chandelles dont l’autel, fait en forme de ciel
et rempli de figures d’anges, était éclairé. Les armes du Roi et de la Reine y
étaient représentées, soutenues de ces petits corps ailés ; et par des
machines et des ressorts, on faisait descendre l’hostie jusque dans les mains
de l’évêque. Il y eut aussi une magnifique musique composée des meilleures voix
de celle du roi et aidées de celles de l’église même qui est très
excellente. »
L’Empire
installera le lycée Charlemagne dans la maison professe des jésuites;
Saint-Paul s’est ajouté à Saint-Louis dans le nom de l’église désormais
paroissiale.
- la rue de
Rivoli a détruit, de la rue Mahler à la rue de Sévigné, tout le côté nord de la
vieille rue Saint-Antoine.
- rue du Roi-de-Sicile parce
qu’ici se situait l’hôtel de Charles d’Anjou, frère de Saint Louis, roi de
Naples et de Sicile, la maison angevine régnant sur Naples et les domaines en
dépendant depuis 1266.
N°2-4 La prison
de la Grande Force, destinée à remplacer celle du For-l’Évêque, avait été
établie en 1780 dans l’hôtel des ducs de La Force (successeurs ici des rois de
Sicile) dont elle prendra le nom. Une Petite Force suivra, aux dépens de
terrains de l’hôtel de Lamoignon, contre lequel elle a laissé un pan de son mur,
24, rue Pavée. À la Petite Force sont détenues, après le 10 août 1792, les
fidèles de Marie-Antoinette : la princesse de Lamballe, Mme de Tourzel qui
dirigea la fuite à Varennes, et sa fille Pauline dont la robe avait déguisé le
dauphin. Ces deux dernières seront sauvées par la chute de Robespierre ;
la princesse de Lamballe, le 3 septembre 1792, devant le guichet d’entrée de la
Grande Force, la gorge plaquée sur la borne d’angle de la rue du Roi-de-Sicile
et de la rue des Ballets (auj. l’extrémité sud de la rue Malher), a été
décapitée au couteau (plaque).
Mais revenons
aux Misérables : Depuis
1 heure du matin, Thénardier, évadé, est allongé sur l’arête d’un autre
pan de ce mur, d’une hauteur de trois étages, donnant rue du Roi-de-Sicile,
sans plus pouvoir rien faire qu’attendre d’être repris. 4 heures sonnent, le
jour va poindre, et voilà qu’il distingue des voix au-dessous, mais… ce n’est
pas la police ! Deux petits mots révèlent des voix amis: « Ces deux
mots, icigo et icicaille, qui tous deux veulent dire ici, et qui appartiennent,
le premier à l’argot des barrières, le second à l’argot du Temple, furent des
traits de lumière pour Thénardier. À icigo il reconnut Brujon, qui était rôdeur
de barrières, et à icicaille Babet, qui, parmi tous ses métiers, avait été
revendeur au Temple. L’antique argot du grand siècle ne se parle plus qu’au
Temple, et Babet était le seul même qui le parlât bien purement. Sans
icicaille, Thénardier ne l’aurait point reconnu, car il avait tout à fait
dénaturé sa voix. »
- 13 et 11, rue Pavée En 1577,
l’hôtel de Lorraine et ses somptueux jardins étaient considérés comme l’un des
plus beaux domaines de Paris. En 1685, ce domaine est morcelé ; de ce
partage naissent deux hôtels : l’hôtel aux n°9-11 conserve le souvenir de celui
de la famille de Lorraine avec sa façade et sa porte cochère Louis XIII
; au n° 13, un nouvel hôtel indépendant a été réaménagé, l’hôtel
d’Herbouville, selon les dessins du célèbre architecte Jean Hardouin-Mansart de
Jouy (1703-1766, petit-fils de Jules Hardouin-Mansart qui était lui-même le petit neveu de François Mansart. On lui doit la façade de Saint-Eustache), qui garde une porte Louis XV. Il accueille aujourd’hui une école
religieuse israélite.
- Au cœur du Pletzl, la « petite place » comme se désigne en yiddish
le quartier, au 10 de la rue Pavée, pour
l’association russo-polonaise Agoudas Hakehilos, regroupement de neuf sociétés
très orthodoxes, Hector Guimard construit en 1913 une synagogue modern style.
- la vieille
porte Baudet ou Baudoyer des remparts de Philippe Auguste, sur la rue Saint-Antoine (à la hauteur
de l'actuelle église Saint-Louis), a été démolie en 1382, année de la révolte
des Maillotins. À compter de cet endroit, passé son début tortueux (qui sera
rebaptisée François-Miron en 1865), la rue Saint-Antoine s’élargit vers l'est en
un cours magnifique, qui sera la promenade à la mode jusqu’à l’ouverture du
Cours-la-Reine, en 1616.
Le 1er juin
1540, Charles Quint, autorisé à traverser la France avec son armée pour aller
mater les Flandres, est accueilli par les corps constitués rue Saint-Antoine,
entre des maisons dont les façades ont été drapées de riches tapisseries, après
que la Bastille voisine a tiré une salve de huit cents coups de canon. Les
fêtes et les tournois qui, en 1549, suivent l’entrée solennelle d’Henri II ont
pareillement lieu ici, seul endroit de Paris à offrir assez d’ampleur à un
moment où les Tuileries n’existent pas encore et où la place de Grève, comme
son nom l’indique, est pour l’essentiel une berge en pente douce. Dix ans plus
tard, c’est encore ici que se déroule le carrousel meurtrier où le roi trouve
la mort. Et, un siècle après, c’est toujours par la rue Saint-Antoine
qu’entrent solennellement Louis XIV et la jeune reine Marie-Thérèse.
En 1646, le roi cède à la Ville
le front bastionné qui s’étend de la porte Saint-Antoine à la poterne
Saint-Louis, au débouché de la rue du Pont-aux-Choux, soit, en gros le futur
boulevard Beaumarchais. Dès les premiers mois de 1670, il est aménagé, planté
d’arbres ; c'est le Nouveau Cours.
- n° 86 : Angle rue de
Fourcy. Immeuble remanié au XVIIe siècle.
- n° 82 à 84 : Ancien hôtel
du fermier général Hainault de Cantobre en 1706. Balcon à console orné d’une
tête de Maure. Bâtiment restauré en 1993. Maison européenne de la Photographie
(7 à 11 rue de Fourcy).
- n° 70 à 80 : Immeubles
XVIIe siècle. Bel escalier au n° 70, idem au 76.
- 68, rue François-Miron. Quand,
le 26 août 1660, Louis XIV fait son entrée solennelle à Paris, son cortège
passe, rue aujourd’hui François-Miron, devant l’hôtel de Beauvais qu’on
inaugure précisément pour l’occasion. Au balcon, la reine mère, Anne
d’Autriche, et le cardinal de Mazarin, son mari secret ; Cateau la
Borgnesse, sa femme de chambre, qui déniaisa le jeune roi, élevée au baronnage
en même temps que son mari, ex-marchand de ruban à la galerie du Palais, et
maîtresse de la maison ; enfin, Turenne tout frais nommé, en avril,
maréchal général des camps et armées du roi !
Mozart y arrive le 18 novembre1763
à trois heures et demie de l'après-midi, avec Marianne, sa sœur, et leur père,
accueillis par le comte Van Eyck, ambassadeur de Bavière à Paris, l'occupant
des lieux. Leurs hôtes font transporter le clavecin de la comtesse dans la
chambre des Mozart. Wolfgang n'aura 8 ans que le 31 janvier : il est trop petit
pour voir le jardin suspendu, au-dessus des stalles prévues pour dix-huit
chevaux, dans la cour de l’hôtel.
- Il y avait déjà, à la fin du 13e
siècle, une rue des Juifs qui, curieusement, va cesser
de l’être précisément à l’époque où ils n’y ont jamais été aussi nombreux pour devenir Ferdinand Duval en
1900. La communauté a sa bibliothèque ouvrière, 27, rue des Écouffes (coin avec
le 23, rue des Rosiers), et son Fourneau économique, 22, rue des Juifs (coin
avec le 7, rue des Rosiers), cette rue qui prend le nom du préfet Ferdinand
Duval juste avant que les premières affiches « en langue juive »,
comme dit Charles Rappoport, n’apparaissent dans le quartier à l’occasion des élections
de 1902. La chose ne passe pas inaperçue des journalistes du Temps.
- la rue Cloche-Perce, du 13e siècle,
tire vraisemblablement son nom d'une enseigne faite d'une cloche bleue (pers ou
perse, soit entre le bleu et le vert).
- n° 15, rue Vieille du Temple :
Hôtel de Vibraye ou de Schomberg (1650). Restauré en 1980. n° 17 et 19 du 17e
siècle. n°21 du 18e siècle; n°23 idem, très restauré.
- La rue du Trésor occupe l'emplacement
de l'ancien hôtel du maréchal d'Effiat, père du Cinq-Mars qui fut le favori de
Louis XIII. Elle se termine en cul-de-sac par une fontaine inutilisée datant du
XIXème siècle. Dès 1883, se réunissait au café Trésor, aujourd'hui des
Philosophes, une Société des ouvriers juifs russes – « en réalité des
ouvriers juifs de Pologne et de Roumanie », précise Charles Rappoport, (populiste
russe, diplômé de philosophie en Suisse et futur meilleur propagandiste du PC,
débarqué à Paris au 50, rue des Francs-Bourgeois) -, et bientôt s’y tient, au
sous-sol, en yiddish, la permanence du Syndicat des casquettiers.
Propriétaires
de leur machine à coudre, ils sont de six à huit ouvriers en moyenne, au mieux
de quinze à vingt, à travailler chez cent soixante fabricants dont deux
seulement chôment le samedi. Importatrice de casquettes, le couvre-chef de ses
ouvriers, jusqu’en 1890, la France en devient exportatrice avec le
développement des ateliers juifs.
Le Fourneau
économique, de six cent cinquante à sept cents portions qu’il servait chaque
jour, grimpe à mille huit cents portions « après Chisinau ». Le
pogrom qui a frappé la ville de Bessarabie en 1903 a suscité un exode massif.
De nouveaux groupes d’ouvriers juifs, tailleurs, casquettiers, ébénistes, mais
aussi forgerons, cordonniers, sculpteurs, mécaniciens, ferblantiers,
serruriers, chaudronniers, confectionneurs en fourrure, viennent s’installer
dans les 4e et 10e arrondissements.
Le
siège du syndicat des casquettiers sera 13, rue Geoffroy l’Asnier au début des
années 1930, lieu où a été construit depuis le Mémorial de la Shoah.
- n° 36 Hôtel construit à la fin
du XVIIe siècle pour Jean Godart, sieur du Petit Marais. Ancien hôtel Poussepin
(1660), de Baillie (1776). Fond de cour, plafond peint à voussure XVIIe siècle.
Les portes monumentales et vantaux protégés IMH
- n° 44 : Ancien hôtel
XVIIIe siècle. Beau portail avec mascaron, ferronneries. Les portes
monumentales et vantaux protégés IMH
- 47, rue
Vieille-du-Temple : Amelot de Bisseuil prend possession de son hôtel
« si beau, si riche et si orné » de la rue Vieille-du-Temple, édifié
sur celui de Rieux devant lequel était née, le soir du 23 novembre 1407, la
guerre civile de trente ans des Armagnacs et des Bourguignons.
Les
porte-couteaux, « estafiers » dans la vieille langue, de Jean sans
Peur sont à l’affût depuis bien huit jours, dans une maison vide, « à
l’image Notre-Dame », qu’ils ont louée en face. Peu après huit heures du
soir, le duc d’Orléans sort de l’hôtel Barbette où la reine, sa belle-sœur et
sa maîtresse, accouche d’un énième enfant. Le duc est gai, tête nue dans une
houppelande de damas noir fourrée de martre, il joue avec ses gants et
chantonne, faiblement accompagné de quelques porteurs de torches, pages et
valets. Les assassins, près d’une vingtaine, armés d’épées, de casse-tête, de
demi-lances, d’arcs et de flèches, frappent à tour de bras ; ils mettent
le feu à leur repaire et filent au galop par la rue des Blancs-Manteaux,
obligeant chacun à moucher ses chandelles sur leur passage, et jetant derrière
eux des chausse-trappes. Devant l’hôtel de Rieux, on ramasse le corps de Louis
d’Orléans pour le porter à l’intérieur : une main en est coupée, le bras
gauche arraché, la moitié de la cervelle a coulé dans le ruisseau ; on
emporte également son page. Un valet, grièvement blessé, a trouvé refuge dans
une maison du coin de la rue des Rosiers.
Prévenus par le
prévôt de Paris, les princes, c’est-à-dire les deux oncles du roi, ducs de
Berry et de Bourbon, et son cousin germain, duc de Bourgogne, commanditaire du
meurtre, se réunissent aussitôt, avec quelques membres du grand conseil du roi,
à l’hôtel d’Anjou, chez le roi de Sicile.
Dans la
chapelle de l’hôtel autrefois de Rieux, le culte protestant est célébré
fréquemment, deux bons siècles plus tard, par le chapelain de l’ambassade de
Hollande, d’où la désignation future du lieu comme "hôtel des Ambassadeurs
hollandais". Valentin Conrart s’est marié ici, en 1634, selon le rite
réformé ; Germaine Necker, future Mme de Staël, y est baptisée de même en
1766. Beaumarchais y installe, dix ans plus tard, les bureaux de Rodrigue
Hortalez et Cie, sa maison de commerce d’armes à destination des
« insurgents » américains, montée avec un million de livres de fonds
publics que Vergennes, le ministre des Affaires étrangères, a mis à sa
disposition. Il y vivra avec Marie-Thérèse de Willer-Mawlaz, et leur fille
Eugénie, qui y naît, jusqu’à ce qu’il fasse construire par Lemoyne sa
somptueuse résidence des environs de la Bastille.
C’est au 47, rue
Vieille-du-Temple, donc, que Beaumarchais écrit Le Mariage de Figaro, qu’il lance l’édition des œuvres complètes de
Voltaire sitôt la mort du philosophe, qu’il écrit encore Tarare, livret d’opéra moquant le despotisme oriental, destiné à la
musique de Salieri. Mozart vient de créer, à Vienne, ses Noces de Figaro.
On aperçoit l'échauguette de la
rue des Franc-Bourgeois: « À l’angle de la rue Vieille-du-Temple, elle
montait la garde, dressant sa silhouette élancée contre le fond étoilé de la
nuit printanière. Un toit de tuiles grises, tout neuf, coiffait les ruines
qu’on s’apprêtait peut-être à restaurer. De-ci de-là, des meurtrières
s’ouvraient dans la maçonnerie grossière constituant la façade du
rez-de-chaussée. (…) Les fenêtres du premier étage, à l’encadrement sculpté,
étaient obturées par des briques. Celles du dessus béaient sur le noir. (…)
L’asphalte résonna sous un talon de fer. Ce n’était pas un des estafiers de
Jean sans Peur. »
C’est Nestor Burma qui parle,
dans la Fièvre au Marais.
Explication: le roman est de 1955, l’échauguette de l’hôtel Hérouët (vers 1510), a été endommagée par un bombardement de 1944
et l’on a envisagé de la démolir.
Au n° 12, rue des Blancs
Manteaux, l'ancien monastère des Blancs Manteaux est classé (l'église, en
totalité y compris les cryptes, façades et toitures du bâtiment conventuel
subsistant [actuellement presbytère]). En 1258, saint Louis fait construire une
église et un petit couvent, à l’abri de l’enceinte de Philippe Auguste, pour y
installer les Serfs de la Vierge Marie, ordre mendiant dont l'habit est le
manteau blanc. C'est dans cette église que fut déposée la dépouille de Louis,
duc d'Orléans, assassiné le 25 novembre 1407 par son cousin Jean sans Peur,
duc de Bourgogne. Le monastère s’agrandit en 1685, et se dote d'une nouvelle église au détriment de l’enceinte de Philippe Auguste, toujours là mais bien ruinée. La
façade de Notre-Dame-des-Blancs-Manteaux lui vient de l’église Saint-Eloi des
Barnabites, de 1704, sise dans l’île de la Cité. Saint-Eloi détruite lors des
travaux d’Haussmann, sa façade sera remontée aux Blancs Manteaux par Baltard,
l’architecte des Halles, en 1863.
À la Pizza du Marais, 15, rue des
Blancs-Manteaux, Font et Val donnaient, en 1974, leur Sainte Jeanne du Larzac : pendant les manœuvres de printemps,
la belle Jeanne Duret « pompait l’armée pour la rendre
inoffensive » ! L’année suivante, Renaud y partageait l’affiche avec
Yvan Dautin et ils réunissaient quinze spectateurs chacun. Mais à la Pizza du
Marais, Renaud a griffonné Laisse béton
au dos d’un paquet de cigarettes et bientôt c’est le tube !
- 9, rue Aubriot, portes
monumentales et vantaux, protégés IMH
- Au Crédit Municipal, "chez
ma tante", on peut voir l'étuve servant à stériliser les matelas mis en
gage; au n°22, cour Martin Feuillée, se trouve l'hôtel des Ventes du Mont de
Piété où ont encore lieu chaque année une centaine de ventes aux enchères des
objets non retirés.
- 2, 4, rue Rambuteau, jolie
façade
- angle Franc-Bourgeois /
Archives : L’hôtel des Guise, est passé aux mains de François de Rohan,
prince de Soubise au début du 18e siècle. Comme il a besoin de jouer aux petits
soldats, pour oublier qu'il laisse « sa femme, à la cour, se mêler du
grand, des grâces et des établissements de sa famille » en sa qualité de
maîtresse royale, l’architecte lui fait une vaste cour d’honneur, propice aux
revues militaires, entre un porche monumental ouvert sur la rue des Franc-Bourgeois
et le mur latéral du palais des Guise rhabillé en façade principale. Au bout du
jardin, l’un de leurs fils, celui qui, sans doute, l’est
« naturellement » du roi, se fait construire un hôtel par le même
architecte, qui appelle Robert Le Lorrain à sculpter ici Les Chevaux du Soleil au fronton des écuries comme il allonge, de
l’autre côté du parc mitoyen, La Gloire
et La Magnificence au sommet du corps
central de la façade.
Le musée des Archives nationales
conserve, au bord de l'escalier du 1er étage, les 24 canons de fusils alignés
constituant la machine de Fieschi utilisée dans l'attentat du 28 juillet 1835
contre Louis Philippe.
- 45, rue des Archives :
L’ordre religieux de Notre Dame de la Rédemption des Captifs, ou des Pères de
la Merci, se consacrait depuis 1218 au rachat des chrétiens capturés par les
barbaresques. En 1613, la reine Marie de Médicis les installa rue du Chaume,
actuelle rue des Archives.
Une église et les premiers
bâtiments conventuels sont alors construits. Mais quand François de Soubise
entreprend les travaux de son hôtel au début du XVIIIème siècle, il souhaite
aussi avoir un beau vis à vis et finance la reconstruction de l’église de la
Merci, où sa famille possède une chapelle, et du couvent, travaux menés par son
architecte Germain Boffrand, en 1727-31.
L’église qui se trouvait au n°47
de la rue des Archives a été fermée puis détruite à la révolution et remplacée
par des immeubles de rapport. Le couvent qui se présente comme un hôtel
particulier avec son grand portail a été conservé et transformé pour
l’habitation. Il possède encore un beau cadran solaire sur une de ses façades
et un très bel escalier.
- 58, rue des
Archives. Clisson, compagnon d’armes de Du Guesclin, a fait bâtir son hôtel
vers 1370 ; c’est le moment où la vieille enceinte de Philippe Auguste,
remplacée, était démolie et offrait du terrain à bon marché ; le temps
aussi où le séjour du roi Charles V à l’hôtel Saint-Paul attirait la
noblesse au Marais. L’hôtel était bâti depuis dix ans quand éclata à Paris la
révolte dite des Maillotins, suscitée par un impôt de trop et, retour de la
guerre de Flandre, Charles VI désarma les Parisiens, abolit leur
gouvernement municipal, les fit emprisonner par centaines, pendre les uns et
confisquer les biens de ceux que l’on ne pendait pas. C’est Clisson qui avait
suggéré au roi, pas encore âgé de 15 ans, le désarmement de Paris : il avait
fait arracher toutes les portes de la ville, et les avait fait coucher au sol
afin que les piétinent chaque jour les hommes et les bêtes. Paris resta ainsi
ouverte à tous les vents durant neuf années, si bien que Froissart pourra
écrire que Clisson avait, au sens propre, ouvert la porte à ses assassins quand
il sera, dans la nuit du 13 au 14 juin 1391, assailli devant son hôtel par
Pierre de Craon et une quarantaine de ses hommes, qui sans cela n’auraient
jamais pu pénétrer en ville.
Laissé pour mort, le connétable
se remettra pourtant de ses blessures.
Un siècle et
demi plus tard, les Guise acquièrent l’ex-hôtel de Clisson, et François de
Guise s’inquiète d’abord du maintien de son alimentation par les eaux de
Savies, l’une des commodités de la maison. Les autres épisodes sont plus
sanglants. Quand Paris, après un premier massacre de protestants, à Wassy,
accueille et escorte comme un roi François de Guise, c’est jusqu’ici. C’est
encore dans cet hôtel que se trame peut-être l’assassinat de Coligny, sûrement
la Saint-Barthélemy. Le 9 mai 1588, malgré la défense du roi, le fils aîné des
Guise, Henri le Balafré, rentre à Paris, c’est-à-dire toujours ici, rue alors
du Chaume. Trois jours plus tard, au petit matin, l’Université se couvre de
barricades, qui n’arrivent qu’à la mi-journée autour de son hôtel. Il joue
l’étonné : « Je dormais quand tout commença », écrira-t-il.
« Et en effet, raconte Michelet, il se montra le matin à ses fenêtres en
blanc habit d’été, dans le négligé d’un bon homme qui à peine s’éveille et
demande : “Eh ! que fait-on donc ?” ».
Puis, se posant
en médiateur, « sans armes, une canne à la main, il parcourait les rues,
recommandant la simple défensive ; les barricades s’abaissaient devant
lui. Il renvoya les gardes au Louvre ; il rendit les armes aux Suisses.
Tous l’admiraient, le bénissaient. Jamais sa bonne mine, sa belle taille, sa
figure aimable, souriante dans ses cheveux blonds, n’avaient autant charmé le
peuple ». Et Michelet le montre aussi habile à rendre leurs manières aux
bourgeois qu’à serrer les mains crasseuses des pauvres, tournant vers les uns
un œil d’autant plus compatissant que sa balafre le fait larmoyer, et vers les
autres un œil ravi. « Le 9 mai, c’était un héros ; le 12 au soir, ce
fut un dieu. »
La reine mère est chez Henri de
Guise lorsque son plus intime confident vient dire au duc : « Le roi
est parti ».
À l’invitation des Guise, Pierre
Corneille, académicien, mais toujours normand, vient profiter du nouveau régime
vigoureusement mis en place par le jeune Louis XIV, en s’installant à Paris
avec son frère Thomas, dans leur hôtel.
Dans son immense hôtel, Melle de
Guise, Marie de Lorraine, entretient une musique d’une quinzaine d’exécutants
pour lesquels compose Marc Antoine Charpentier, avant de tenir parmi eux la
partie de haute-contre. Charpentier, qui est naturellement son pensionnaire, y
écrit, dans les années 1680, un ballet pour Polyeucte
comme des intermèdes pour la reprise d’Andromède,
l’une et l’autre de Pierre Corneille. Seule la mort de Mlle de Guise mettra fin
à un séjour de près de vingt ans (de 1670 à 1688), qu’il quittera pour devenir
le maître de musique des jésuites. Autour s’élèvent maintenant de beaux hôtels,
comme celui d’Assy (n°58bis), que l’architecte Pierre Le Muet achève juste
avant de passer à son chef d’œuvre, l’hôtel d’Avaux (aujourd’hui musée d’Art et
d’Histoire du judaïsme, 71, rue du Temple).
Les Archives nationales, créées
par l’Assemblée constituante, qui ont connu la salle des Feuillants puis le
couvent des Capucins, sont déposées au palais de Soubise en 1808 ; doivent
les y rejoindre celles de tous les pays de l’Empire napoléonien. De l’hôtel de
la maison de Guise il ne reste plus qu’un escalier à la double croix de
Lorraine. Michelet, après qu’il aura été nommé à la tête de la section
historique des Archives, en 1831, y occupera durant vingt-cinq ans un bureau
aux boiseries très simples autour d’une glace élégamment encadrée.
-Les beaux balcons aux consoles
massives de l’hôtel Lelièvre font face, rue de Braque, au portail d’Olivier de
Clisson. Au 3, rue de Braque, grille ornée de pommes de pin, décoration
traditionnelle des cabarets.
Source: gallica.bnf.fr |
- 7, rue de Braque, cour ; "Petit
hôtel de Mesmes et de Vergennes, ministre de Louis XVI" dans la
légende d'Atget:
- 11, rue de Braque,
soubassement; ancienne maison Bournigat du 17e siècle.
- 71-75, rue du Temple (auj.
Musée d’art et d’histoire du Judaïsme), bâti par Le Muet pour Claude de Mesme, comte
d’Avaux, qui meurt en 1650. L'hôtel passera ensuite au gendre de
Colbert, duc de Saint-Aignan. Son aile gauche est un « mur renard », une façade plaquée,
ici contre la muraille de Philippe Auguste sur laquelle vient partout buter le
bourg.
Hôtel Claude de Mesmes, "centre
du mouvement des journées de juillet 1830" dans la légende d'Atget.
L'hôtel connu aussi comme de Saint-Aignan, est sis 57, rue
Sainte-Avoye dans la nomenclature de l'époque. Y habitent l'avocat Etienne
Garnier-Pagès et son demi-frère. Lors des Trois glorieuses de 1830, "la
commune centrale" républicaine y établit son quartier général et, le 29
juillet, à lire Louis Blanc, Histoire de
10 ans : "Plusieurs citoyens s’étaient réunis tumultueusement rue Sainte-Avoye,
dans la maison de Garnier-Pagès. Il y avait été arrêté que le général
Lafayette, le général Gérard, le duc de Choiseul, seraient invités à prendre en
main la force publique. En même temps, par une coïncidence singulière, MM.
Charles Teste et Taschereau créaient, dans les bureaux du National, un
gouvernement provisoire, composé de MM. Lafayette, Gérard et Labbey de
Pompières. Sur l’avis du poète Béranger, ce dernier nom fut remplacé par celui
du duc de Choiseul. Et une proclamation, que le Constitutionnel trompé
publia, répandit dans tout Paris la grande nouvelle d’un gouvernement qui
n’existait que dans l’esprit de quelques courageux faussaires comptant sur le
succès pour se faire absoudre."
Si l'on en croit l'anonyme Souvenir glorieux du Parisien, ou Précis
historique des journées des 26, 27, 28, 29, 30 et 31 juillet, suivi des plus
beaux traits de cette mémorable révolte, et d'un tableau contenant le nom des
braves qui se sont le plus signalés,
"Un nommé Jean Grenier,
ouvrier poêlier, rue de la Mortellerie n°20, s'est présenté dans la matinée du
31 juillet au commandant du poste de l'hôtel Saint-Aignan, rue Sainte-Avoye, 7e
arr. "Sergent, dit-il, voici mon sabre, je l'ai bien employé depuis trois
jours, maintenant je retourne à mon ouvrage et mon arme me devient inutile,
j'en fais don à la Garde Nationale." Ce trait de patriotisme le plus
désintéressé a été accueilli comme il devait l'être ; son auteur s'est refusé à
recevoir aucun prix de son arme. "Je ne vends pas mon sabre, disait-il, je
le donne." Et en effet il en fit don à un Grenadier qui en manquait."
Source: gallica.bnf.fr |
Source: gallica.bnf.fr |
- C’est au n° 79 – alors rue
Sainte-Avoye –, qu’en 1623, Jean Habert – « Montmor le Riche », selon
Tallemant des Réaux –, se fait construire l’hôtel fastueux qu’on connaît encore
comme l’hôtel de Montmor. Henri-Louis Habert, fils de Montmor le Riche, né en
1603 comme Valentin Conrart, est déjà, à 22 ans, conseiller au parlement
de Paris. Ses cousins Germain et Philippe sont tous les deux membres de
l’Académie, et des familiers de l’hôtel de Rambouillet. Il les y rejoint et
« Les Trois Habert » aident à tresser la Guirlande de Julie, y nouant Narcisse, Souci, Rose et Perce-Neige.
À 31 ans, Henri-Louis est à son tour de l’Académie, et il en héberge les
séances durant trois mois dans l’hôtel paternel. Mais son intérêt va davantage
aux sciences et il reçoit, au milieu d’une collection de tableaux qui ne
regroupe pas moins de cent quatre-vingt-sept pièces, et de manuscrits anciens
dont Colbert trouvera soixante-treize dignes de sa bibliothèque, l’abbé
Mersenne, Étienne Pascal et son fils Blaise, Roberval, Gui Patin, l’Italien
Campanella, l’Anglais Hobbes, l’Allemand Kepler.
À l’hôtel de
Montmor, Gassendi finit ses jours chez Henri-Louis Habert, auquel il lègue la
lunette qu’il a lui-même reçue de Galilée, à condition que son hôte sera
l’éditeur de ses œuvres complètes. Henri-Louis fait enterrer son ami à
Saint-Nicolas-des-Champs, dans la chapelle de la famille Habert de Montmor,
auprès de Guillaume Budé, son grand-oncle, le célèbre helléniste, fondateur du
Collège de France, qui s’était éteint en 1540 au 203 bis, rue Saint-Martin.
En 1657, ce qui
était une sorte de salon scientifique se formalise et adopte une constitution
en neuf règles qui en fait l’Académie Montmorienne. Jean Chapelain,
versificateur ennuyeux, mais correspondant de Huygens, y rend compte des
découvertes de ce dernier : l’horloge à balancier, Titan, l’anneau de
Saturne…
On donne souvent
Chapelain comme le modèle de Molière pour le Philinte du Misanthrope, en tout cas, après l’interdiction de Tartuffe dès le lendemain de sa
création, le 12 mai 1664, c’est devant des membres de l’Académie Montmorienne –
Jean Chapelain, Gilles Ménage, l’abbé de Marolles – que Molière en donne une
lecture.
C’est encore ici qu’en 1667, deux
médecins du roi font la première expérience de transfusion du sang : celui
d’un veau sur un malheureux valet de chambre de Mme de Sévigné, amie et voisine
des Habert de Montmor.
- mur peint rue des
Haudriettes : l’Esprit des lieux
- façades et balcons des 5 et 5
bis
Source: gallica.bnf.fr |
- Hôtel Bondeville (IMH), 4 rue des Haudriettes : hôtel d'origine 16ème,
façades sur cour et cour, restauration contemporaine (façades). Hôtel de
Maupéou dans la légende d'Atget qui en photographie la cour pleine de tonneaux:
- fontaine des Haudriettes,
Située à l'intersection de la rue des Archives et de la rue des Haudriettes,
cette fontaine classée, en forme de bâtiment trapézoïdal, a été conçue par
Moreau-Desproux, petit-fils par alliance de Jean Beausire et Maître des
Bâtiments de la Ville. Elle sera construite vers 1770 aux frais du prince
François de Rohan, et remplacera la Fontaine Neuve qui datait de 1636. Elle est
ornée d'un bas relief en marbre de Pierre Mignot représentant une naïade
allongée dans les roseaux. Le mascaron représentant une tête de lion crachait
de l'eau du canal de l'Ourcq, mais qui provenait à l'origine de Belleville.
La fontaine des Haudriettes subira de nombreuses restaurations, la plus importante étant celle entreprise par David en 1836.
Son nom provient d'une légende selon laquelle Etienne Haudry, un marchand drapier et grand panetier de Philippe le Bel, tardait à revenir de Croisade. Sa femme, qui ne l'attendait plus, prit le voile. Au retour d'Haudry, le couple donnera naissance à la société des femmes veuves, dites Haudriettes, qui possèderont diverses propriétés dans le rue qui porte leur nom.
La fontaine des Haudriettes subira de nombreuses restaurations, la plus importante étant celle entreprise par David en 1836.
Son nom provient d'une légende selon laquelle Etienne Haudry, un marchand drapier et grand panetier de Philippe le Bel, tardait à revenir de Croisade. Sa femme, qui ne l'attendait plus, prit le voile. Au retour d'Haudry, le couple donnera naissance à la société des femmes veuves, dites Haudriettes, qui possèderont diverses propriétés dans le rue qui porte leur nom.
-60, rue des Archives / 24, rue
des 4 Fils, François Mansart bâtit l’hôtel de Guénégaud en 1651-53, que le bénédictin
Germain Brice, dans le premier guide touristique parisien, publié en 1684,
décrira ainsi : « Le devant est orné d’architecture, avec des
refends, et des vases sur l’entablement, qui font ensemble une décoration
agréable » (aujourd’hui musée de la Chasse et de la Nature).
- 20, rue des 4 Fils, bâtiment de 1747 où habita de
Sèze, défenseur de Louis XVI.
Très tard dans la soirée du 1er
décembre 1851, Maxime Du Camp voit arriver chez lui un ami, très
préoccupé : il est passé vers minuit devant l’Imprimerie nationale, rue
Vieille-du-Temple, et il l’a vue entourée par une compagnie de la garde
municipale, ce qui ne présage rien de bon. Ce qu’il n’a pu voir, c’est, dedans,
chaque ouvrier, encadré par deux gendarmes, qui, dans le silence obligatoire,
compose un tout petit fragment de texte qui à lui seul est sans signification.
Le puzzle se reconstitue le lendemain matin sur tous les murs de Paris : "l’Assemblée
nationale est dissoute".
- au bout de la rue des 4 Fils,
le 11, rue de la Perle, de 1717, devenu
un immeuble municipal occupé par la Direction des affaires scolaires.
- 87, rue Vieille du Temple :
L’imprimerie royale de Richelieu, après les Tuileries et le Louvre, est devenue
nationale à l’hôtel de Toulouse, en l’an II, avant de gagner l’hôtel de
Rohan en 1811.
D. Vierge, éd. de 1879 d'Histoire d'un crime, Groupe Hugo Paris 7 |
- Dans les
années 1630, la troupe de Montdory s’installe au jeu de paume du Marais, rue
Vieille-du-Temple, au revers de l’hôtel Salé. Paris ne compte alors que deux
salles de théâtre et deux troupes permanentes : les Comédiens du roi, de
Bellerose, qui jouent à l’Hôtel de Bourgogne, et le Théâtre du Marais.
Bellerose, à en croire Tallemant, « était un comédien fardé, qui regardait
où il jetterait son chapeau, de peur de gâter ses plumes. Ce n’est pas qu’il ne
fît bien certains récits et certaines choses tendres, mais il n’entendait point
ce qu’il disait ». Montdory est, selon l’abbé d’Aubignac, «le premier
acteur de [son] temps» ; il sait donner à l’interprétation de la comédie
le ton « d’honnêteté », et à la tragédie classique celui de grandeur et de
noblesse qu’attend alors l’élite de « la Cour et de la Ville ».
Corneille lui confie son Illusion comique à l’hiver de 1635-1636,
et le Cid, en janvier 1637 ;
Montdory y interprète Rodrigue. La France est en guerre avec l’Espagne, le
public en entend des résonances dans la pièce, le succès est inouï. Le Cid « est si beau », écrit
Montdory dès le 18 janvier à Guez de Balzac, « qu’il a donné de l’amour
aux dames les plus continentes, dont la passion a même plusieurs fois éclaté au
théâtre public. On a vu seoir en corps aux bancs de ses loges ceux qu’on ne
voit d’ordinaire que dans la chambre dorée et sur le siège des fleurs de lys.
La foule a été si grande à nos portes et notre lieu s’est trouvé si petit, que
les recoins du théâtre qui servaient les autres fois comme de niche aux pages
ont été des places de faveur pour les cordons bleus [de l’ordre du
Saint-Esprit] et la scène a été d’ordinaire parée de croix de chevaliers de
l’Ordre ».
- Aubert de Fontenay, dit Aubert
des Gabelles parce qu'il eut le quasi monopole de celles-ci de 1632 à 1656,
voit naturellement sa demeure qualifiée « d’hôtel salé ». Elle lui
sera confisquée à la chute de Fouquet. C’est l’École centrale des Arts et
Manufactures qui marqua ensuite le plus les lieux. On peut voir les marques de
censive du Fief des Coutures Saint-Gervais (F C S G en losange autour d'une
croix chrétienne) sur l’angle des communs de l’hôtel Salé, rue de Thorigny / rue
des Coutures Saint-Gervais.
En face du musée Picasso, Françoise
de Sévigné, fille de l'épistolière, épouse le comte de Grignan en 1669. Le jeune couple et Mme de
Sévigné mère s’installent 8, rue de Thorigny (la maison brûlera ensuite et
celle que l’on voit aujourd’hui est plus récente) mais, à l’automne 1669, le
comte de Grignan est nommé lieutenant général du Languedoc. Voilà Madame de
Sévigné épistolière par force, qui écrit ses premières lettres à sa fille en
1671. Mme de Sévigné logera ensuite rue du Parc-Royal où nous la retrouverons,
la variole menaçant la rue de Thorigny. Puis elle louera une maison qui existe
encore au 14 rue Elzévir (alors rue des Trois Pavillons) entre mai 1672 et
1677.
Dans le
lotissement que réalise Le Jay, président au parlement de Paris, des
terrains cultivés, "cultures" ou "coutures" des hospitalières
de Saint-Gervais, Villedo construit avec le charpentier Claude Dublet,
bâtisseur des maisons du pont Marie, tout le côté des numéros pairs de la rue
Neuve-Saint-Louis (aujourd’hui de Turenne) entre les rues Saint-Gilles et
Saint-Claude.
[En 1637,
Michel Villedo, « maçon de la Creuse » mais de bonne bourgeoisie
rurale, pas exactement un pauvre hère, a signé avec le bureau des finances le
« traité » qui lui confie les travaux d’un canal de dérivation
destiné à réguler les crues de la Seine. Il a déjà à son actif l’église de la
Visitation-Sainte-Marie de François Mansart, mais son grand projet, auquel il a
réussi à intéresser le Père Joseph, l’éminence grise, et par l'intermédiaire de
celui-ci le rouge cardinal de Richelieu lui-même, c’est la reviviscence du bras
mort de la Seine par le creusement et l’élargissement du ruisseau de
Ménilmontant, qui en est un vestige, depuis l’Arsenal jusqu’à l’extrémité du
Cours-la-Reine, au large de l’enceinte des « fossés jaunes » dont la
construction vient de s’achever. La surintendance des finances se dédit et
Villedo est nommé, à titre de compensation, « général des œuvres de
maçonneries et ouvrages de Sa Majesté ».]
Source: gallica.bnf.fr |
- 64, rue de Turenne, construit
par Villedo et Dublet donc, l’hôtel Méliand (du pdt de Tanlay chez Atget), pour François Petit, maître
d’hôtel ordinaire du roi ;
- comme au 66-68, celui de Pierre
Boulin, trésorier du Marc d’or (un droit qui se lève sur tous les offices de
France à chaque changement de titulaire) ;
- comme au 68 bis, enfin, où
Turenne vécut une quinzaine d’années, l'hôtel que l’église
Saint-Denys-du-Saint-Sacrement a remplacé.
À la mort de Turenne, le 30
juillet 1675, Mme de Sévigné habite donc rue des Trois-Pavillons (aujourd’hui 14,
rue Elzévir). « Tout le monde se cherche pour parler de M. de
Turenne ; on s’attroupe ; tout était hier en pleurs dans les rues, le
commerce de toute autre chose était suspendu... Jamais un homme n’a été
regretté aussi sincèrement ; tout ce quartier où il a logé, et tout Paris
et tout le peuple étaient dans le trouble et dans l’émotion. »
Au n° 62, rue de Turenne, l’hôtel
de Hesse; au 60, un hôtel qui sera plus tard celui du « Grand
Veneur », et qui a retrouvé un état proche de sa réfection de 1735. A
l’arrière, 15, rue du Grand Veneur, dans un bâtiment de 1865-66, habita l'abbé
Surat, archidiacre de Notre-Dame de Paris, otage de la Commune, tué lors de son
évasion de la Roquette.
En face du 60, l'Hôtel de Pologne
(IMH), 65 rue de Turenne, 17ème classique : escalier et sa rampe; au n° 56, habiter
Scarron (voir ci-dessous); aux 52 et 54, la bibliothèque des Amis de
l’instruction, organisée par des artisans et des ouvriers sous le Second
Empire, occupe un local depuis 1884.
Mais le plus saisissant de ce que
l'on doit à nos duettistes, c’est, dans la partie orientée est-ouest de
l’actuelle rue Villehardouin, les douze maisons de rapport uniformes, hautes de
deux étages et d’un comble, larges de quatre travées, s’élevant sur des
parcelles identiques de cent quarante-quatre mètres carrés, qui lui donnaient
alors le nom de rue des Douze-Portes.
Paul Scarron a
été atteint, en 1638, d’un rhumatisme tuberculeux. Il est revenu du Mans
paralysé des jambes, la nuque raidie, déformé, condamné à la chaise,
« avec la douleur que donne [un] derrière pointu qui n’a plus
d’embonpoint ». Mais pas plus sinistre pour autant :
Revenez mes
fesses perdues,
Revenez me
donner un cul,
En vous perdant
j’ai tout perdu.
Hélas !
qu’êtes-vous devenues ?
Appui de mes
membres perclus,
Cul que j’eus
et que je n’ai plus...
En 1652, il
arrache à la misère, en l’épousant, une jeune orpheline très belle, Françoise
d’Aubigné, qui sera un jour Mme de Maintenon. À l’angle de la rue
Neuve-Saint-Louis et de la rue des Douze-Portes (soit les actuelles rues de
Turenne et Villehardouin), Scarron accueille les hommes les plus en vue de
l’intervalle heureux qui sépare la dictature de Richelieu de l’absolutisme de
Louis XIV, des libertins comme d’Elbène ou le maréchal d’Albret.
Désormais, quand il s’éloigne,
toujours à regret, du Marais, c’est que s’impose une cure. Ninon, pendant ce
temps-là, prête sa « chambre jaune » à Mme Scarron et à Villarceaux.
Crébillon père, Lesage succèderont à Scarron
dans cette maison.
La forte pente de la rue
Saint-Gilles, comme celle de la rue Saint-Claude, rappelle que le boulevard
Beaumarchais est construit sur l’escarpe des remparts. « Vainement on
chercherait dans Paris une rue plus paisible que la rue Saint-Gilles, au
Marais, à deux pas de la place Royale. Là, pas de voitures, jamais de foule. À
peine le silence y est rompu par les sonneries réglementaires de la caserne des
Minimes, par les cloches de l’église Saint-Louis ou par les clameurs joyeuses
des élèves de l’institution Massin à l’heure des récréations. Le soir, bien
avant dix heures, et quand le boulevard Beaumarchais est encore plein de vie,
de mouvement et de bruit, tout se ferme », raconte Émile Gaboriau en 1872
dans L’Argent des autres.
Dans l’ancienne infirmerie du
couvent des minimes, placée dans le pavillon ouest du portail dessiné par
François Mansart en 1678, seul vestige qui nous soit resté après la démolition
du cloître au profit de l’agrandissement de la caserne, en 1925, quatre cents
élèves ont connu à l'institution Massin, à en croire Ernest Lavisse dont les
souvenirs ont le sérieux de l’historien professionnel, le régime du bain de
pieds collectif et mensuel ! Cela a-t-il fait d’Auguste Blanqui, qui y fut
élève dès ses 13 ans, un révolutionnaire ?
- 29, rue de Sévigné. Dans
l’hôtel des Saint-Fargeau, de 1686, que la famille du conventionnel avait
occupé jusqu’à la fin de l’Empire, l’institution Jauffret accueillit les fils
Hugo, le romancier Edmond About, Louis Ulbach, le futur directeur de la Revue de Paris. Durant la Deuxième
République, Pierre Larousse y était répétiteur de français et de latin pour les
classes élémentaires. Sous la Troisième, Émile Durkheim y rencontrait Jean
Jaurès préparant comme lui le concours d’admission à l’École normale
supérieure. L’un sera le plus connu des sociologues français ; l’autre, le
grand leader du mouvement socialiste.
- 8, rue du Parc-Royal : Mme
de Sévigné y loge, on l'a dit, chez ses cousins Coulanges entre fin 1671 et mai
1672, la variole se faisant menaçante rue de Thorigny.
- 13, rue Payenne, hôtel de
Châtillon ;
- n°11 le toit en carène de
bateau de l’hôtel de Marle, presque contemporain de Carnavalet, est
caractéristique de Philibert Delorme. Baudelaire n’aura pas le temps, en un
trimestre, d’user ses fonds de culotte dans la pension qui y est alors
installée.
- n°9, hôtel Donon, d’époque
Henri III, musée Cognac Jay. Tous ces bâtiments ont une autre façade rue
Elzévir. Madame de Sévigné y loue une maison presque au coin de la rue du Parc Royal
entre mai 1672 et 1677.
- 31, rue des Francs-Bourgeois,
Hôtel d'Albret. La façade sur rue est l''une des rares représentations dans le
Marais de l'architecture Louis XV avec son balcon en ferronnerie. L'Hôtel, de François
Mansart, date du XVIème siècle.
L'Hôtel Lamoignon est du 16e
siècle. Son dernier agrandissement datait de 1624 et de Charles de Valois,
bâtard du roi Charles IX et de Marie Touchet, sa favorite, qui y avait
vécu jusqu'a sa mort en 1650, quand en 1658 Guillaume de Lamoignon loua l'hôtel.
Il y tint hebdomadairement un salon où l'on pouvait côtoyer entre autres
Boileau et Racine. L'hôtel fut acheté par son fils en 1688. L'avocat de Louis
XVI, Lamoignon de Malesherbes y vit le jour en 1721. La famille de Lamoignon
avait quitté les lieux vers 1750 ; le quartier passait de mode, et le 5e
duc d’Aumont revendait lui aussi.
- Claude Boislève, pour lequel
François Mansart a refait l’hôtel Carnavalet, l’un des premiers du Marais,
construit à la jonction des règnes de François Ier et d’Henri II,
sans doute par Pierre Lescot et avec le concours de Jean Goujon, est embastillé
à la chute de Fouquet.
Après trois ans d’instruction,
s’ouvre devant une chambre ad hoc, installée à l’Arsenal, le procès de Fouquet
que Mme de Sévigné suit avec anxiété du 14 novembre, où il commence, jusqu’au
verdict, qui tombe le 20 décembre1664. Un jour, enfin, elle réussit à apercevoir
Fouquet, sur le trajet de la Bastille, sans doute depuis l’hôtel Fieubet.
« Imaginez-vous que des dames m’ont proposé d’aller dans une maison qui
regarde droit dans l’Arsenal, pour voir revenir notre pauvre ami. J’étais
masquée, je l’ai vu venir d’assez loin. M. d’Artagnan était auprès de
lui ; cinquante mousquetaires derrière, à trente ou quarante pas. Il
paraissait assez rêveur. Pour moi, quand je l’ai aperçu, les jambes m’ont
tremblé, et le cœur m’a battu si fort, que je n’en pouvais plus. En
s’approchant de nous pour rentrer dans son trou, M. d’Artagnan l’a poussé, et
lui a fait remarquer que nous étions là. Il nous a donc saluées, et a pris
cette mine riante que vous connaissez. Je ne crois pas qu’il m’ait
reconnue. »
Bouleversée, elle s’en retourne
rue Sainte-Avoye (aujourd’hui du Temple), où elle est venue loger, veuve à
25 ans, à la fin de sa période de deuil.
Enfin, le 7 octobre 1677, elle
écrit à sa fille : « Vous m’attendrissez pour la petite (…) Ne
pourriez-vous point l’amener ? Vous auriez de quoi la loger au
moins ; car, Dieu merci, nous avons l’hôtel de Carnavalet. C’est une
affaire admirable : nous y tiendrons tous, et nous aurons le bel
air ; comme on ne peut pas tout avoir, il faut se passer des parquets et
des petites cheminées à la mode ; mais nous aurons du moins une belle
cour, un beau jardin, un beau quartier, et de bonnes petites filles bleues [Celles
du couvent contigu des Annonciades célestes], qui sont fort commodes, et nous
serons ensemble, et vous m’aimez, ma chère enfant ».
L’Ecole des
Ponts et Chaussées passera de l’hôtel Libéral Bruant, domicile de Perronet, son
fondateur, à l’hôtel Carnavalet. Puis Carnavalet n’abritera pas moins de deux
pensions.