- L’Université populaire La Solidarité était située 77 avenue d’Italie. Elle
était une émanation de la coopérative La Solidarité des Travailleurs, 4
rue Véronèse, qui avait fait construire ses locaux en 1900.
Par les rues du Dr Laurent et Ernest et Henri Rousselle, on
arrive rue du Moulin des Prés. Elle
est indiquée à l'état de chemin sur le plan de Jouvin de Rochefort (1672). La
partie comprise entre le boulevard
Auguste Blanqui et la rue Vandrezanne portait le nom de chemin de la
Butte aux Cailles, sur le plan cadastral de la commune de Gentilly, dressé en
1845. Le moulin des Prés était situé à l'extrémité sud de cette rue, au bord de
la Bièvre.
47, Moulin-des-Prés,
PLU: Petit immeuble
de logement sur jardin de la fin du XIXème siècle construit en surélévation
au-dessus du niveau de la rue du Moulin des Prés. La façade en bandes alternées
de briques polychromes est agrémentée de panneaux de céramique. Bow-window à
structure métallique orné de céramique donnant sur une cour arborée.
- les superstructures du puits artésien de la Butte-aux-Cailles, achevé au bout de
vingt-sept ans de travaux par le même ingénieur qui fora celui de la raffinerie
Say, ont été longtemps visibles sur la place aujourd'hui Paul Verlaine.
Piscine de la
Butte-aux-Cailles, inscrite MH. Remplaçant
un premier établissement de bains douches datant de 1908, créé pour profiter des
eaux tièdes (28 degrés) du puits artésien foré à partir de 1866, la piscine
actuelle est construite de 1922 à 1924 par Louis Bonnier, architecte de la
ville. Associé à des bains douches situés dans le même bâtiment, et utilisant
toujours l'eau "artésienne" (qui continue d'être pompée de nos jours)
, le bassin de natation est couvert de sept arches en béton armé. La façade sur
la place est en brique et la tour abrite un escalier. La piscine a été
réhabilitée par l'architecte Johanna Fourquier en 1991.
En descendant la rue Bobillot, on atteint la rue Martin-Bernard :
- le cinéma Tolbiac était au 23, rue Martin-Bernard. En janvier 1935, Marceau Pivert vient y donner une
conférence, qui sera suivie de la projection de Kühle Wampe, le film de Slatan
Düdov qui raconte, sur un scénario de Bertolt
Brecht, la vie d’une communauté de chômeurs berlinois pendant la montée du
nazisme. Le 13e compte plus d’une dizaine de cinémas dans les années
1930.
- l’Union ouvrière du 13e, 14 rue de l’Espérance. La Fédération
des 5e et 13e, centrale d’achat de huit coopératives de consommation des deux
arrondissements, fondée en 1900, y siègea jusqu’à son absorption dans la
Fédération parisienne.
Plus bas, mais tout est neuf à ce niveau de la rue Barrault,
inutile d'y aller voir, était la
- boulangerie-biscuiterie La Coopération socialiste, 84 rue Barrault. Inaugurée le 16
septembre 1900, en présence de personnalités du socialisme parisien, dont Jean-Baptiste Clément. Un meeting suit,
sur un terrain proche appartenant à la coopérative de production La Lutte
économique, sous la présidence d’Amilcare
Cipriani, l’ancien Communard qui s’est battu sur tous les fronts, de la
Grèce à la France, déporté par celle-ci en Nouvelle Calédonie et condamné par
l’Italie aux travaux forcés, et que ses divergences avec les socialistes de son
pays ont amené à choisir à nouveau Paris. Jean
Allemane, Aristide Briand, entre
autres, y prennent la parole. Le poète Bouchor
y dit Le Pain.
Une brûlerie centrale de café sera adjointe à la boulangerie
à la mi-1901. Celle-ci, conçue strictement à l’imitation de son modèle belge du
Palais du Peuple, n’est équipée que pour faire du pain de ménage quand les
coopérateurs parisiens consomment du pain de fantaisie. A peine deux ans après
son ouverture, elle devra abandonner la fabrication du pain et ne conserver que
celle des gâteaux ; c’est la brûlerie qui assurera alors l’essentiel de
ses recettes. Elle se fondra finalement dans le Magasin de gros des
coopératives de France, centrale d’achat créée en 1905.
la Butte-aux-Cailles
fournit de la roche, plus épaisse de
cinq centimètres que le cliquart
(soit 65 cm), au grain plus gros, aux coquillages moins nombreux. La
Butte-aux-Cailles doit aux carrières sa préservation : son sol n’était pas
apte à supporter beaucoup plus que des maisonnettes.
Sur la Butte-aux-Cailles, des chiffonniers, hotte d’osier
sur le dos, crochet à la main, fouillent le sol. Ces débris, le chiffonnier les
écoule auprès de fabricants de carton et papier, d’entreprises qui en font du
sel ammoniac et, dans le meilleur des cas, chez les revendeuses du marché du
Temple. Du Chiffonnier de Paris, première incarnation puissante de Frédérick Lemaître au théâtre de la
Porte-Saint-Martin, Félix Pyat,
futur quarante-huitard, membre de l’Internationale et communard, fait le
symbole même du prolétaire. Louis Blanc l’accueille d’un « Enfin, nous
avons le drame socialiste !», tandis qu’un article l’inscrit dans la
lignée des pièces de sape : « Tartuffe contre l’autel, Figaro contre
le trône et le Chiffonnier contre le coffre ».
Évidemment, la Butte-aux-Cailles est, pendant la Commune,
« l’une des citadelles de la révolte », Malgré Wroblewski, malgré le 101e, la Butte sera finalement prise :
l'habitat ici n'est pas assez dense et les barricades élevées sur les axes
seront tournées par les Versaillais à travers les jardins.
La butte est restée, au début du 20e siècle, un « fief
de la misère » que l’auteur de Paris-Atlas invite la municipalité à
conquérir : « Quelles merveilles aurait pu faire le génie d’un
Alphand, de la Butte-aux-Cailles, si on lui avait donné libre carrière pour la
transformer ! Soit qu’on installât sur ses pentes, de moins en moins
escarpées aujourd’hui, les verdures d’un parc, soit qu’on abattît les masures
qui la couronnent pour percer des rues montant en lacet, bordées de maisons
modestes, mais coquettes, ombragées d’un jardinet (…) Relier par une transition
progressive cette pauvre vallée de la Bièvre aux fraîches grâces du parc de
Montsouris, voilà le but ; lorsque il sera atteint, l’ancien faubourg
souffrant n’existera plus ».
Blanqui n’avait
pas pu participer à la Commune : « l’Enfermé » était –
il le sera la moitié de sa vie – en prison. Quand il en sort, c’est chez son
ami Granger, au 25 du boulevard qui porte aujourd’hui son nom, qu’il trouve
refuge.
- Institut d’études et de recherches marxistes, 64 bd Blanqui, (puis Espaces Marx avant
d'être vendu dans les années 2000). Siège des Editions sociales et de la
Nouvelle Critique dans les années 1950 ; une grande mosaïque de Fernand Léger y occupait tout un mur de
la grande salle du rez-de-chaussée.
- école russe du bd Blanqui. Les fils Trotski la
fréquentent ; « Trotski écrivait jusqu’à 3 heures du matin ; en
allant à l’école, Léon et Serge déposaient ses articles le matin à
l’imprimerie. »
- Le Marius des Misérables, (roman esquissé en 1845,
repris en 1860, publié en 1862), descendant la rue du Faubourg-Saint-Jacques,
tourne sur le boulevard intérieur de l’enceinte des Fermiers généraux (alors bd
de la Santé) et, passée la rue de la Santé, celle de la Glacière, tombe, un peu
avant d’arriver à la petite rivière des
Gobelins, sur « une espèce de champ, qui est, dans toute la longue et
monotone ceinture des boulevards de Paris, le seul endroit où Ruisdael serait
tenté de s’asseoir. (…) Un pré vert traversé de cordes tendues où des loques
sèchent au vent, une vieille ferme à maraîchers bâtie du temps de Louis XIII
avec son grand toit bizarrement percé de mansardes, des palissades délabrées,
un peu d’eau entre des peupliers, des femmes, des rires, des voix ; à
l’horizon le Panthéon, l’arbre des Sourds-Muets [un orme, qui atteindra 45 mètres
en 1900], le Val-de-Grâce, noir, trapu, fantasque, amusant, magnifique, et au
fond le sévère faîte carré des tours de Notre-Dame ».
On répond à ses questions qu’il est "au Champ de l’Alouette". L’oiseau est
le petit nom, le seul sous lequel il connaisse Cosette. Dès cet instant, pour
lui, c’est ici le pays de la jeune fille qu’il a perdue depuis si longtemps. Il
y revient chaque jour, réellement ou par la pensée. « Il habitait le Champ
de l’Alouette plus que le logis de Courfeyrac. Sa véritable adresse était
celle-ci : boulevard de la Santé, au septième arbre après la rue
Croulebarbe [auj. Ed. Gondinet]. »
Au point où cette rue de Croulebarbe rencontre l’actuelle
rue Corvisart, il y a même, alors, un très vieux moulin dont les dernières
réparations datent de 1773.
- arrière Ecole
Estienne, rue des Reculettes, PLU : Ecole Municipale du Livre
Estienne fondée à la fin du XIXème siècle. Les bâtiments disposés en U en
briques polychromes sur le boulevard Auguste Blanqui ont été réalisés en 1896
par l'architecte Samuel Menjot de Dammartin sur commande de la Ville de Paris.
Sur la rue des Reculettes, la cour est fermée par un bâtiment en béton dont
l'avant-corps est orné de bas-reliefs de style Art Déco évoquant les métiers du
livre et des arts graphiques. L'ensemble de ces constructions témoigne de
l'évolution typologique de l'architecture scolaire parisienne, de l'esthétique
rationnelle des écoles municipales en briques de la seconde moitié du XIXème
siècle, de l'influence de l'architecture industrielle sur les bâtiments
institutionnels des années trente.
Auberge de la mère
Grégoire : Victor Hugo, Chateaubriand et La Fayette (mort à Paris le 20 mai 1834) comme convives. Elle tire
son nom d'une tenancière de maison, évoquée par Béranger et peinte par Courbet
en 1855. Archimède le clochard, 1958, dialogues de Michel Audiard, la
ressuscite:
Courbet, la Mère Grégoire |
Le Poivrot : C'qu'elle avait d'tocard, la Mère Grégoire,
c'était l'humeur.
Jean Gabin : C'est surtout l'âge... Quand t'attrapes cinquante carats, t'as beau être aimable, ça n's'remarque plus...
Jean Gabin : C'est surtout l'âge... Quand t'attrapes cinquante carats, t'as beau être aimable, ça n's'remarque plus...
Spécialités du sud-ouest depuis 1935.
- 33 rue Croulebarbe. La tour Albert ou tour
Croulebarbe construite par l'architecte Édouard Albert de 1958
à 1960, en collaboration avec Robert Boileau et Jacques Henri-Labourdette, est le premier gratte-ciel de logements de la capitale française.
26
rue de Croulebarbe et 2 rue Berbier du Mets, PLU: Maison d'angle sur un
terrain en pente présentant une façade composée de deux étages carrés sur
rez-de-chaussée. Toiture en tuiles. Témoignage de l'habitat ancien du quartier
à un emplacement important dans la composition du paysage urbain.
En 1936, Auguste
Perret entame le bâtiment du Mobilier
national, 33 ans après l’immeuble du 25 bis, rue Franklin à Paris, premier bâtiment à
l'armature intégralement en béton armé. Héritier de l'ancien garde-meuble de la
Couronne, créé en 1604 par Henri IV et réorganisé par Louis XIV en 1663, place
de la Concorde, puis devant la colonnade du Louvre, le Mobilier national est un
service rattaché au ministère de la culture et de la communication.
- arrière de la fabrique
royale des tapisseries : établie par François Ier à Fontainebleau,
elle a été transportée sur les bords de la Bièvre en 1622. Louis XIV et Colbert y réunissent tous les ouvriers
du roi : brodeurs, orfèvres, fondeurs, graveurs, lapidaires, ébénistes,
teinturiers, carrossiers, dans un hôtel acheté avec ses prés, ses aunaies et
ses bois baignés par la rivière, « sur la principale porte duquel hôtel,
indique le roi, sera posé un marbre au-dessus de nos armes, dans lequel sera
inscrit : Manufacture royale des meubles de la couronne ». Et le
signataire ajoute : « La conduite particulière des manufactures
appartiendra au sieur Le Brun, notre
premier peintre, sous le titre de directeur, suivant les lettres que nous lui
avons accordées le 8 mars 1663 ».
Douze maisons, tout autour, sont réservées aux ouvriers et
exemptes d’avoir à loger les militaires. Le directeur de la manufacture – après
Le Brun viendra Mignard – peut faire
établir des brasseries de bière à l’usage de ses ouvriers sans se soucier de la
corporation des brasseurs. Le 13 décembre 1720, l’architecte Robert de Cotte étant directeur, la
miniaturiste italienne Rosalba Carriera peut visiter ici « la fabrique de
carrosses et de Phaétons et non celle des vernis », sans doute ceux dits
Martin, vernis à la résine et laques dans le goût chinois destinés aux chaises
à porteurs, meubles et lambris.
Soufflot assure
la direction des Gobelins quand Bernardin
de Saint-Pierre, de part et d’autre de son intendance au jardin des
Plantes, habite rue de la Reine-Blanche, où il achève Paul et Virginie en 1786.
La rivière des Gobelins par E. Bourdelin, le Val de Grâces, le Panthéon... (dernier 1/3 du 19e s.) |
Les mêmes lieux vers 1920. |
Au coin avec la rue G. Geffroy, Hôtel de la Reine Blanche, arrière de la Folie Gobelin. C’était là cette Folie qui attirait Pantagruel : « Pantagruel, un
jour, pour se distraire de ses études, se promenait vers le faubourg
Saint-Marceau, car il voulait voir la Folie Gobelin ». Ailleurs dans le
récit, Panurge, pour se venger,
ayant enduit les vêtements d’une « dame Parisienne » d’une certaine
substance, elle se trouva bientôt suivie de « plus de six cent mille et
quatorze chiens » qui, lorsqu’elle se crut à l’abri chez elle,
« pissèrent si bien sur la porte de sa maison, que leurs urines firent un
ruisseau où les canes auraient bien nagé ; c’est celui qui à présent
passe à Saint-Victor, dans lequel Gobelin teint en écarlate, grâce à la vertu spécifique
de ces pisses de chien ».
- domicile de Charles Rappoport, 27 ou 29 rue des Gobelins, au début du
20e siècle, dans ce 13e où réside une forte communauté
russe.
- 15, rue des
Gobelins, PLU: Maison à l’ancien alignement caractéristique de l’ancienne
rue des Gobelins, l’une des plus vieille de Paris et qui conserve encore
plusieurs maisons en pierre, pans de bois et hourdis, élevées entre 1450 et
1750. (La rue figure sur le plan de Saint-Victor (1555). Elle était
précédemment dénommée rue de Bièvre.
Une partie de la rue des Gobelins, entre la rue de la
Reine Blanche et la rue Le Brun,
fait actuellement partie de l'avenue des
Gobelins. Elle a fait partie auparavant de la rue
Mouffetard.)
- domicile d’Hô Chi Minh, 6 rue des Gobelins. N’Guyen Ai Quôc, le futur Hô Chi Minh, est à
Paris du début de l’hiver 1917 à la fin de 1923 ; d’abord ici puis 9,
impasse Compoint, dans le 17e, enfin dans le 18e, rue
Marcadet.
- 3-5, rue des Gobelins, Ancien hôtel Mascarini, remanié ou construit au 17e pour
Jean de Julienne, teinturier,
héritier de cette famille Gobelin établie ici depuis le XVe siècle. (Dans la 1ère
cour, au fond à dr, se trouve l’entrée du corps de logis principal, précédé
d’un haut perron donnant sur une double porte dont l’encadrement est orné d’un
mascaron délicat.) Le corps de logis principal, bordé par une cour minérale et
une cour plantée, abrite une rampe d'escalier en bois du XVIIème siècle
(inscrite à l'inventaire supplémentaire des monuments historiques) et un
plafond de solives peintes au premier étage. Sous le porche reliant les deux
cours, percé dans le corps de logis, la porte en bois menant aux caves a
conservé son arcade en pierre. Dans la seconde cour, vestige d’un jardin qui
allait autrefois jusqu'à la Bièvre et était bordée d'ateliers, subsiste en
retour d'équerre l'orangerie de Jean de
Julienne (remaniée), composée de huit colonnes toscanes à rez-de-chaussée supportant
un simple entablement, dans laquelle le mécène exposait ses collections de
tableaux (notamment ceux de Watteau). (Comme une grande partie du quartier des
Gobelins, les bâtiments reposent sur de profondes carrières de pierre aux ciels
soutenus par des arcs bloqués.) Haut lieu de l'histoire de l'art et de
l'architecture, intimement lié à la Manufacture des Gobelins, il constitue un
témoin quasi-intact de la typologie de l'hôtel particulier du XVIIème siècle,
exceptionnelle dans le quartier.
La famille Gobelin
avait quitté la Bièvre au moment de son anoblissement, en 1554 ; son
affaire était passée aux Canaye puis
aux Hollandais Gluck qui, sous
Louis XIV, dirigeaient les Manufactures
de draps fins et écarlates des Gobelins. Jean Gluck épouse la fille d’un concurrent, François de Julienne qui, rue de la Reine-Blanche et 259, rue
Mouffetard, tient manufacture pour les draps fins, façon d’Espagne,
d’Angleterre et de Hollande. Jean de Julienne, neveu des deux hommes, réunit
les entreprises désormais alliées dans les murs de la Folie Gobelin, qui
s’étend jusqu’à ces bâtiments habituellement désignés comme hôtel de la Reine
Blanche. Jean de Julienne est, de tous les amis de Watteau, celui qui possède le plus grand nombre de tableaux du
peintre, accrochés ici avec d’autres pièces dans sa galerie de grand
collectionneur, et jusqu’à sa mort, en 1766, octogénaire et paralytique, il
continuera de s’y faire porter.
- carrefour des Gobelins. 5 000 personnes y
manifestent le 14 juillet 1944.
- Durand Frères, tannerie de cuirs forts, 254 rue Mouffetard (auj. av. des Gobelins).
Elle emploie environ 200 ouvriers vers 1860. La Bièvre couverte, les tanneurs
se déplacent vers Gentilly et Arcueil, et Durand disparaît de l’arrondissement.
- domicile de Jeannette Vermersch, av. des Gobelins. Une chambrette, où Maurice Thorez la raccompagne, le 4
février 1934 au soir, après la conférence nationale des Jeunesses communistes
au cours de laquelle, relevée de ses responsabilités, elle s’est évanouie.
« Je viens avec toi », a-t-il dit à Jeannette ce soir-là, à en croire
Philippe Robrieux, « Je viens pour toujours. »
Par la rue de la Reine-Blanche et la rue Nicolas Roret, on
atteint la rue Le Brun.
Rue Le Brun.
Précédemment, partie de la rue des
Fossés Saint-Marcel ; cette dernière voie, indiquée sur le plan de
Saint-Victor (1555), a porté les noms de rue de Fer, rue d'Enfer et rue des
Hauts Fossés Saint-Marcel.
En face, la Manufacture. Concernant la couleur, non des
papillons, mais des étoffes, le vieux mythe de l’écarlate obtenue par l’acide
urique a la vie dure depuis qu’il a été lancé par Rabelais. Peut-être les
dispositions de l’édit louis-quatorzien en matière de brasseries, la bière
étant connue comme diurétique, l’ont-elles renforcé ? En 1823, encore, un
condamné à mort écrit au directeur des Gobelins : « Monsieur, J’ai
entendu dire, plusieurs fois, que l’on admettait dans la maison dont vous avez
la direction des personnes condamnées à des peines graves, afin qu’étant nourries
par des aliments irritants, elles procurent plus sûrement l’urine pour les
écarlates que l’on y fabrique. Me trouvant, malheureusement, condamné à la
peine capitale, je désirerais terminer ma carrière dans votre maison ;
veuillez donc, Monsieur, avoir la bonté de m’instruire s’il est vrai que l’on y
admette ces sortes de condamnés, et quelle serait la marche à suivre pour y
entrer ? ».
La Savonnerie
rejoint les Gobelins en 1825. En janvier 1860, un projet d’élargissement de la
rue Mouffetard, qui entraînerait le déplacement de la manufacture, est vivement
combattu par la presse du temps du fait qu’il néglige « l’importance
qu’elle donne à un quartier de Paris, à un faubourg peu favorisé dont elle est
la vie et l’orgueil ». À cette date, à la Folie Gobelin est installée une
fabrique de châles.
- Morane jeune, et
Morane aîné (future Société des Automobiles Delahaye). Fondée en 1835 dans
le centre de Paris, l’entreprise se déplace 10, rue du Banquier. Les frères
Paul-Henri et Florentin Morane sont fabricants de pompes, presses et outils
hydrauliques, machines à vapeur, grues et ascenseurs. Georges Morane, client de Delahaye et participant à des
compétitions avec cette voiture, et son beau-frère Léon Desmarais ont hérité de leur père et beau-père Paul Morane de
l’entreprise de mécanique du 10, rue du Banquier et cherchent des nouvelles
fabrications. Ils s’associent avec Emile
Delahaye, dont l’entreprise arrive ici de Tours, en 1898. Elle va se
trouver répartie, en 1914, sur trois sites : celui déjà cité, le 43, rue
Esquirol et le 23-25, rue Jenner. La Société des Automobiles Delahaye va
jusqu'en 1933 construire des voitures de classe moyenne réputées pour leur
solidité, mais aussi des camions, des moteurs pour l'industrie et des canots
automobiles de compétition, du matériel de lutte contre l'incendie et elle
fabriquera même une très grosse machine agricole dite " charrue
Tournesol". Ensuite, la famille Morane orientera la marque Delahaye vers
la construction de voitures de prestige et la grande compétition, avec l'apport
de la marque Delage en 1935. Devint fournisseur de nombreuses têtes couronnées
et de personnages en vue dans le monde du spectacle.
A compter de son retour en France, à la Libération, Thorez,
ministre d’état, roule le plus souvent dans une « très élégante et
ultra-luxueuse Delahaye blindée ». Delahaye ferme en 1954 après fusion
avec Hotchkiss et abandon du secteur automobile. Cette année-là, la population active du
quartier compte 43% d’ouvriers, 27% d’employés, 11% de commerçants. Les
ouvriers représentent alors 31% de la population active à Paris. Auj. Ecole
Nationale de Biologie et de Chimie de Paris.
La grève avec occupation de 1936 aux usines Delahaye |
- bibliothèque anarchiste, rue Duméril. Elle se crée
dans la mouvance de Libertad, de ses
Causeries populaires et de son
journal l’anarchie, dans les
premières années 1900. Dans la même rue Duméril, se trouve la brasserie
Dumesnil depuis 1840, qui passera rue Dareau, dans le 14e, parce que
les catacombes lui fourniront là des caves de fermentation pour ses 60 000
hectolitres de bière annuels.
- barrière des Deux-Moulins (Auj. angle rue
Duméril/bd de l’Hôpital), lieu de rassemblement des chiffonniers.
« Très mal famée à cette époque » dit Martin Nadaud, qui vient y déjeuner puis y faire la noce tout le
restant de la journée plutôt que d’aller travailler dans une fosse rue de la
Coutellerie. Bien lui en prend car l’un de ceux qui ont accepté ce travail y
meurt asphyxié.
- salle de la Grille, 136 bd de l’Hôpital. C’est le siège des « Amis de la chanson », société qui
donne des goguettes tous les dimanches durant la saison, de 4 à 7 heures du
soir. On y entend Maria Verone et Jehan Rictus. Le 14 avril 1907, le
groupe y donne en commun avec la Muse
Rouge une grande soirée artistique à la mémoire de Jules Jouy, l’un des fondateurs du Chat Noir de Montmartre, et
fournisseur de chansons de bataille pour la presse socialiste.
Ecole Nationale
Supérieure des Arts et Métiers construite en 1909-1912 par l'architecte
Georges Roussi. Construite sur les anciens abattoirs de Villejuif, l'école
couvre 20 000 m². Sur la moitié nord-ouest, le long du boulevard de l'Hôpital,
les bâtiments administratifs et les salles de cours sont disposés autour de
trois cours carrées. Sur la moitié sud-est, le long de l'avenue Stéphen-Pichon,
les ateliers sont disposés en lignes perpendiculaires à l'avenue. A cette séparation
dans le plan, s'ajoute une hiérarchisation des matériaux, rarement aussi claire
à cette époque : la façade boulevard de l'Hôpital est en pierre, les salles de
classe, sur les cours de récréation et le long des rues Pinel et Edouard-Manet
sont en pierre et brique, mariant la brique rose-jaune et la brique rouge en
des dessins variés, les ateliers sur l'avenue Stéphen-Pichon sont en brique et
meulière, la brique jouant toujours le rôle décoratif par ses couleurs et ses
appareillages.
C’est pour intégrer cet abattoir dans les limites de
l’octroi, et non pour annexer le hameau
des Deux Moulins, dit aussi d’Austerlitz, (triangle Jenner, bd de
l’hôpital, bd de la Gare devenu Vincent Auriol) dont on n’avait cure, que le
tracé du mur des Fermiers généraux a été rectifié, et créé le boulevard de la Gare en 1818
- 22, rue Rubens,
PLU: Bâtiment d'activités construit vers 1920 sur
une cour ouverte. Composition alliant rusticité et pittoresque : façade
présentant un soubassement et un rez-de-chaussée en pierre de réemploi et deux
étages en double hauteur en briques rouges. La décoration est à l'économie et
tient pour l'essentiel au calepinage des briques animant le dernier étage de
motifs géométriques. Toitures en saillies mettant en valeur la distribution des
bâtiments. L'édifice abrite actuellement des bureaux de la Caisse Régionale
d'Assurance Maladie, un centre de santé dentaire.
- la coopérative La Solidarité des Travailleurs était 4, rue Véronèse. Elle
fait construire ses locaux en 1900.
un peu à droite, sur l'av. des Gobelins,
- bibliothèque russe du POSDR, 61 ou 63 av des Gobelins. Siège du Club social-démocrate russe dès avant
la guerre de 14, que fréquentent aussi les socialistes du 13e. Le 9
avril 1914, par exemple, Charles Rappoport,
leur fait un point sur « Le PS à la veille des élections ». En 1916,
en revanche, le même Rappoport se souvient y avoir entendu Trotski et ses amis proposer, pour lutter contre la guerre, une
« fraternisation avec les soldats ennemis » qui fit hausser les
épaules de beaucoup.
- Théâtre des Gobelins, 73 av. des Gobelins. « Le 13e arrondissement va
chercher ses distractions place d’Italie et avenue des Gobelins, et le 15e
rue de la Gaîté » note Jacques Valdour, qui assiste ici, en 1909, à une
représentation des Etrangleurs de
Paris. Comme dans tous les autres théâtres populaires, les ouvriers y
« pique-niquent », ayant apporté à boire (bouteilles et verres) et à
manger, discutent, interpellent les acteurs, etc. Mais Valdour précise que ce
chahut dénote un jugement très sûr de l’ouvrier parisien : « il fait
du bruit surtout lorsque le dialogue des acteurs n’est vraiment que du
remplissage ; un profond silence s’établit lorsque l’action dramatique se
précise. »
On revient par la rue Coypel ;
- coopérative L’Utilité Sociale, 17 rue Edouard Manet. Le Club sportif
de la Jeunesse Socialiste du 13e y est hébergé, qui prendra bientôt
le nom d’Etoile Sportive de l’Utilité Sociale. C’est aussi le siège, durant la
première guerre mondiale, de la Fédération sportive ouvrière. C'est l'entrée
annexe de la
maison des syndicats, 163 bd de l’Hôpital. Largement utilisée pour les réunions des
« organisations démocratiques » : l’Union des femmes, le Comité
de défense de l’Humanité, celui des chômeurs, les Campeurs rouges des 5e-13e,
ou le groupe artistique de la coiffure, membre de la FTOF, qui y répète le
soir, en 1932. La remise des cartes aux Jeunesses communistes pour 1934, par
exemple, y a également lieu. UL CGT. Bureaux Touristra.
- préau des écoles, rue Fagon. Le compte-rendu de
mandat de Monjauvis, le député, et
d’André Marty, le conseiller
municipal du quartier de la Gare depuis déjà cinq ans, prévus pour le 5 mai
1934, vont prendre ici, après les évènements de la Cité Jeanne d’Arc, l’allure
d’un meeting de masse. Outre les deux élus, Marcel Cachin et Paul
Vaillant-Couturier, Marcel Gitton,
secrétaire du comité central, Michaut
pour les JC, Emile Bureau pour le
Secours Rouge International, et Lucien
Midol, député et représentant des cheminots, sont à la tribune dans une
atmosphère survoltée.
- domicile de Chou En-Laï (Shou Enlai), 17 rue Godefroy. Etudiant en France à
compter de 1920, il avait alors 24 ans; il demeura à cette adresse entre 1922
et 1924, indique une plaque sur la façade. Teng Hsiao Ping (Deng Xiaoping), de
huit ans son cadet, était également à Paris à la même époque. Dès 1916, une Société franco-chinoise d’éducation,
domiciliée 39, rue de la Pointe à la Garenne-Colombes, encourageait les études
financées par le travail, servait de bureau de placement, et publiait un Journal
Chinois Hebdomadaire. Shou et Deng étaient arrivés, comme 2 à 3 000
étudiants-ouvriers chinois entre 1919 et 1930, avec la deuxième vague de
l’opération travail-études, inspirée par le secrétaire général du Parti
communiste chinois, Chen Duxiu.
Après que la police de la concession internationale a tiré,
à Shangaï, sur une manifestation de soutien à des ouvriers en grève, y faisant
13 morts, Shou et Deng, comme les deux fils de Chen Duxiu sont de ceux qui
occupent la légation de Chine à Paris, le 30 mai 1925, pour protester contre le
refus qu’on leur a opposé de tenir un meeting de soutien. Ils seront expulsés
ou s’en retourneront à Shangaï. Ils y colleront les affiches des Jeunesses
communistes de France appelant à la solidarité la flotte envoyée en
renfort : « Marins français soyez dignes des marins de la Mer
noire ».
- mairie du 13e, 1 place d’Italie. Le 23
juin 1947, la municipalité invite la population à s’y regrouper pour protester
contre le projet de redressement financier de Robert Schuman, et former la
délégation qui ira faire part de ce refus à l’Assemblée nationale.
- barrière d’Italie (auj. place d’Italie). Les
chiffonniers de la rue Mouffetard et les carriers de Gentilly et d’Arcueil
défendaient la barrière d’Italie. Le 25 juin 1848, le général Bréa était venu
parlementer barrière d’Enfer, barrière Saint-Jacques, barrière de la
Santé ; arrivé barrière d’Italie, on s’était saisi de lui et on l’avait
fusillé du côté du Petit Gentilly, un peu avant le carrefour avec l’actuelle rue
de Tolbiac (à la hauteur du 76 av. d’Italie).
Le 26 au petit matin, Frédéric
Moreau, le héros de l'Education sentimentale, arrive de
Fontainebleau par cette route : « quatre barricades formaient, au
bout des quatre voies, d’énormes talus de pavés ; des torches ça et là
grésillaient ; malgré la poussière qui s’élevait, il distingua des
fantassins de la ligne et des gardes nationaux, tous le visage noir,
débraillés, hagards. Ils venaient de prendre la place, avaient fusillé
plusieurs hommes ; leur colère durait encore. » La révolution est
tombée.
Ils étaient, le 25 juin 1848, deux mille cinq cents insurgés
derrière sept barricades. Sur vingt-cinq personnes qui seront traduites devant
un conseil de guerre, on compte deux cordonniers, un contremaître tanneur, un
marchand de chevaux et deux apprentis dans ce métier, un charpentier, un maçon
et un garçon maçon, un carrier, un terrassier. Un employé de librairie est le
seul employé du lot. Cinq seront condamnés à mort, et deux finalement
guillotinés, le 17 mars 1849, à cette même barrière, devant plus de dix mille
hommes de troupe, et quatre canons braqués sur les principaux axes de
circulation.
Exécuté le premier, Henri-Joseph Daix, 44 ans, demeurait 34,
rue Poliveau. Trépané, suicidaire, borgne, c’était un administré de Bicêtre
depuis un accident qui lui avait fait perdre, de plus, l’usage d’un bras et
d’une jambe. Nicolas Larr, 29 ans, « homme d’une grande énergie et d’une
force herculéenne », était l’un de ces trois frères wurtembergeois, maçons
travaillant sous les ordres de Martin Nadaud à la construction de la nouvelle
mairie du 12e arrondissement, place du Panthéon. Il portait des boucles
d’oreilles qui l’avaient fait reconnaître. Sa femme tenait un commerce de vin à
la barrière des Deux Moulins (aujourd’hui place Pinel), côté Ivry. Nadaud
publiera une lettre pour témoigner que Larr, gagné comme beaucoup aux idées
bonapartistes, « avait marché au combat aux cris réitérés de “Vive
Napoléon !” ». En vain.
- atelier de construction de matériel roulant, place
d’Italie. Créé en 1906, c’est l’un des six qui accompagnent le
développement du métro dans la capitale.
- Au lion d’Afrique, place d’Italie. Ce café fut la
permanence de la 13e section socialiste avant le 199, boulevard de
la Gare, au milieu des années 1930.
- maison de Granger, 25 boulevard Auguste Blanqui.
Ici, « l’Enfermé » de toutes les geôles de France, dont le
Mont-Saint-Michel, vint se réfugier chez son ami Granger à sa sortie de Clairvaux, le 11 juin 1879. Zola le dépeint sous le nom de Barthès dans
son Paris : « Agé
de 74 ans, Barthès avait passé près de 50 années en prison. Il était l’éternel
prisonnier, le héros de la liberté que tous les gouvernements avaient promené
de citadelle en forteresse. Depuis son adolescence, il marchait dans son rêve
fraternel, il combattait pour une république idéale de vérité et de justice, et
il aboutissait toujours au cachot, il allait toujours achever sa rêverie
humanitaire sous de triples verrous. (...) Et lorsque la république était
venue, cette république qui lui avait coûté tant d’années de geôle, elle
l’avait emprisonné à son tour, ajoutant des années d’ombre aux années déjà sans
soleil. Et il restait le martyr de la liberté, et il la voulait quand même,
elle qui n’était jamais. »
Blanqui resta chez Granger jusqu’à sa mort, le 1er
janvier 1881. « La chambre mortuaire était au quatrième, / Et la foule à
pas lents gravissait l'escalier, / Le peuple du travail, en blouse
d'atelier... » écrira Eugène
Pottier. Ses obsèques réunirent 100 000 personnes. L’année suivante,
au premier anniversaire de sa mort, 300 personnes, rassemblées ici devant son
domicile, tentaient de partir en cortège ; dès la place d’Italie, elles
étaient dispersées par la police et un certain nombre d’entre elles arrêtées.
- adresse de Cam Yu Tchen Chen, 5 rue Thiers (auj. Paulin-Méry). On le
connaît par les papiers saisis lors d’une perquisition chez Suzanne Girault, dirigeante du PC, et
concernant la circulation de « l’or de Moscou ». Le 17 avril 1924, Yu
a écrit au camarade Sémard pour
récupérer 500 roubles or que l’Internationale lui aurait adressés via le PC.
Dans une autre correspondance, l’interlocuteur russe qui signe
« Marie » fait savoir à Suzanne Girault qu’il a envoyé 155 dollars à
Yu, « par Rose », quatre semaines plus tôt.