Les quartiers administratifs de
la Goutte d’Or et de La Chapelle actuels correspondent à eux deux à l’ancienne
commune de La Chapelle, à laquelle le faubourg de la Goutte d’Or avait été
rattaché en 1790. De 1790 à 1860, cette commune est hors les murs. Le boom
commence après 1830 (qui est aussi le moment de la conquête de l’Algérie), et
autour de 1840, en célébration de ladite conquête, des rues y sont nommées
Constantine, (qui deviendra Myrha), Alger, (qui deviendra Mgr Affre), Oran qui
s’est maintenue ; Mazagran qui restera algérienne mais deviendra Laghouat en
1864 quand les autres seront débaptisées.
A la sortie de l’ICI, - L’Olympic-café, salle de
bal (1934, donc même date qu’immeuble suivant), investie et aménagée en salle
de concert de 80 places, bar, restaurant depuis 1999, permet à beaucoup de gens,
par sa convivialité et ses spectacles populaires, de découvrir ce quartier
métis.
on va au 21 rue Laghouat :
- La rue Laghouat est ouverte en
1841 comme la rue Léon, la rue des Gardes, la rue Richomme (sous un autre nom),
la villa Poissonnière. C’est le plein boom du lotissement du quartier : La
Chapelle passe de 2 500 habitants en 1830 à 40 000 30 ans plus tard (le
quartier administratif de la
Goutte d’Or comptait en 1999 moins de 30 000 h, dont 30%
d’étrangers, contre 17,5% en moyenne à Paris)
21, rue Laghouat (PLU) L'immeuble
a été réalisé en 1934, pour le maître d'ouvrage Fernand Bertin, par les
architectes et ingénieurs ESTP André Bertin et Abro Kandjian, qui ne voulaient
pas accepter la domination des idées du Mouvement moderne.
Pour Abro Kandjian «nous voulions rompre avec l'architecture classique, mais sans tomber dans l'extrémisme d'un Le Corbusier. Notre maître à penser était alors Mallet-Stevens».
Pour cela, l'immeuble avait une façade avec de «légères avancées des salles de séjour et des balcons". Le matériau de façade reste la pierre de taille, «seule valeur sûre à l'époque pour un investisseur immobilier". Structurae
Pour Abro Kandjian «nous voulions rompre avec l'architecture classique, mais sans tomber dans l'extrémisme d'un Le Corbusier. Notre maître à penser était alors Mallet-Stevens».
Pour cela, l'immeuble avait une façade avec de «légères avancées des salles de séjour et des balcons". Le matériau de façade reste la pierre de taille, «seule valeur sûre à l'époque pour un investisseur immobilier". Structurae
En 1934, cet immeuble
d’appartements assez vaste constitue une rareté puisque qu’Antoine Prost,
travaillant sur les recensements de 1926, 1931 et 1936, et sur les rues
Polonceau et Goutte d’Or, y trouve beaucoup de commerçants, un grand nombre de
débits de boisson et d'assez nombreux garnis pour célibataires ou couples sans
enfants, des immigrants, mais qui viennent surtout de la France provinciale, un
niveau très bas d'hygiène et de confort.
Rue Stephenson, autrefois des
Moulins car menait à la butte des Moulins qu’on verra plus bas. En prenant à
gauche, on sort de la « médina » telle que la délimite l’Aurore, en 1957 : c’est rue Myrha
au Nord, Stephenson à l’Est, rues Charbonnière et Chartres au Sud, bd Barbès à
l’Ouest.
Au bout de la
rue Doudeauville, est construite en 1846 ce qui est alors la nouvelle mairie de
La Chapelle ; après l’annexion de 1860, le bâtiment abrite justice de
paix, bibliothèque publique, écoles, pompiers.
- 14 rue Jean
Robert (PLU) : Immeuble mixte à usage de coopérative ouvrière et de logements
construit en 1885 pour le compte de la Société civile de consommation du 18e.
Il témoigne d’une rare incursion d’une coopérative ouvrière dans le domaine
immobilier, avec logements pour rentabiliser l’opération. Ici, le r-d-c est
destiné à un magasin coopératif ; sur 6 niveaux, les logements sont loués
à des sociétaires qui en ont déterminé les caractéristiques : moulures,
parquets de chêne, cheminées, papiers peints ; décorum qu’on retrouve en
façade avec brique de Bourgogne au-dessus du soubassement en pierre alors que
brique de Vaugirard nue sur cour ;
- 11, rue
Ordener/angle Jean Robert (PLU) immeuble mi-19e s. Profusion
décorative de la façade, 2 travées feintes, garde-corps en fonte, etc.
En 1900, les 2/3 de la superficie
du quartier sont recouverts par les emprises ferroviaires : réseaux du Nord,
de l’Est, raccordement des 2 réseaux entre eux, et raccordements des 2 à la Petite
Ceinture. Toutes ces emprises, moins la station, sont déjà là à l’annexion, en
1860.
- station de
Pont Marcadet, en 1900 : trains de Ceinture partant de gare du Nord, et
trains-tramways de Saint-Ouen et Saint-Denis s’y arrêtent.
- rue
Doudeauville (ouverte plus tôt : 1826, nom d’un ministre de
Charles X) au n°31 rue Doudeauville : la Coop ouvrière de TSF ;
fait régulièrement dans l’Humanité de
la pub pour son « Supermétal 6 » qui permet de capter les
« ondes rouges » que la rubrique radio du quotidien distingue des
« ondes capitalistes ». Le discours de Thorez au 12e
congrès du PC, à St-Ouen, en 1950, est ignoré de la TSF mais diffusé par Radio Prague (2 fois), Radio
Budapest, Radio Varsovie…
- 33, rue
Doudeauville : l’une des 2 coop du mouvement ouvrier juif de Paris avant
1914 : l’Association des ouvriers boulangers syndiqués (CGT). Probablement
ancien temple luthérien : paroisse luthérienne dès 1855 regroupant
300 familles avec temple successivement rue Doudeauville, puis rue Myrha, puis
rue des Poissonniers, avant le 90 bd Barbès actuel : temple luthérien
Saint-Paul. Rue des Poissonniers = rue des Allemands. Une centaine de manifestants du 9ème collectif
de sans-papiers sera accueillie, à compter du samedi 14 mars 2009, par ce temple
luthérien du boulevard Barbès. Avec l’accord du pasteur, ils occuperont les
locaux tous les jours, de 14h30 à 20h, dans l’attente d’un rendez-vous avec la
préfecture.
On jette un œil ds la rue Léon (du nom ou prénom du fils d’un
propriétaire) au LMP :
- on a transformé en salle de
spectacle, en 1986, l’ancien Lavoir
Moderne Parisien, 35, rue Léon, lavoir jusqu’en 1953, soit pendant un
siècle, contemporain de celui de la rue Neuve de la Goutte d’Or, auj. des
Islettes, à l’emplacement de la Place de l’Assommoir. Ce dernier compte 108
places quand Zola vient y prendre
des notes, en 1875 (pour l’introduire dans l’Assommoir
qui paraît 2 ans plus tard). La rue Léon, axe culturel de ce
quartier-monde, cette rue animée par le lavoir moderne parisien et
l'olympic-café, organise l'été son festival "rue Léon" avec des
animations autour des cultures africaines et des repas de rue. Une web-tv
locale intitulée rueleon.tv réalise des reportages sur la vie culturelle du
quartier.
L’action du roman se situe entre
1850 et 1868. Les seuls travaux d’Haussmann attirent à Paris 60 000
travailleurs, d’origine rurale, peu qualifiés. Cette arrivée supplémentaire de
main-d’œuvre explique que, dans le bâtiment par exemple, on puisse chômer cinq
mois par an. Les loyers montent et du fait des démolitions et du fait de l’afflux
humain. Un loyer annuel à la Goutte d’Or, si le logis est équipé d’un poêle,
vaut environ cent cinquante journées de blanchisseuse, ou cinquante journées de
peintre. Sous le Second Empire la proportion de débits de boisson est énorme
(un cabaret pour 8 personnes).
On revient prendre à dr. rue Doudeauville :
- la rue est certainement la plus
commerçante et la plus animée jusque tard le soir. Au 64 de la rue se trouve
une annexe de la célèbre maison de ventes aux enchères, Drouot. Au 80, on
aperçoit la synagogue Kedouchat Levy, séfarade, population qui arrive là dans les
années 1950 en même temps que les Algériens. Après l’instauration, en 1946, de
la libre circulation des Français musulmans entre leurs départements et la
métropole, l’immigration algérienne, de travailleurs adultes, remplace tout
naturellement l’immigration provinciale dans ce quartier de garnis pour
célibataires, sans confort et donc aux loyers faibles. Leur nombre, va décupler
entre 1946, date de l’instauration de la libre circulation, et 1954, et il
doublera entre 1954 et 1962. En 1957, la
préfecture de la Seine
dénombrera « plus de 110 000 Algériens dans la Seine, ce qui fait de Paris
la 3e ville musulmane algérienne après Alger et Oran, avant
Constantine. »
A g. Poissonniers (la route de la marée est attestée depuis 1307 ;
c’est la route d’entrée à Paris, Barbès/Ornano ne datent que du 2nd
Empire), puis à g. Panama (en 1884, du nom du canal) :
- Les Africains arrivent vers
1980. Connivences, 10 rue de Panama. La
SAPE : Société
des ambianceurs et des personnes élégantes. C’est une pratique populaire née
à la fin des années 1960 au Congo-Brazzaville, chez les jeunes. Il s’agissait
de se distinguer en portant des vêtements de luxe. La jeunesse surnomma cette
pratique la « lutte » : c’en était une pour arriver à acquérir
ou emprunter cette denrée-là. Des « lutteurs » commencèrent à émigrer
à Paris, vitrine de la mode, dans les années 1970, vivant souvent en
clandestins. Revenant de temps en temps au Congo, ils y devenaient… des
« Parisiens ». Fondée par Papa
Wemba, le roi de la rumba congolaise. Voir Sapologie, vol I et vol II sur Youtube.
A dr. Suez pour retour sur Poissonniers,
On a, à dr. : - Le marché africain du Château-Rouge, rue
Dejean, continue d’étaler des poissons exotiques : barracudas, tilapias,
mâchoirons et capitaines. Les abords, notamment entre les n° 20 et 48 rue des
Poissonniers, à gauche, ont vu s'ouvrir de nombreuses boutiques africaines.
on descend la rue des Poissonniers jusqu’à la rue Myrha :
On prend la rue Myrha (percée
en 1841, du nom de la fille de Biron alors maire de Montmartre):
C’est à la barricade de la rue
Myrha (en face du n°63,
Myrha/Poissonniers) que Dombrowsky
(ancien capitaine de l’armée tsariste, venu en France après l’échec de
l’insurrection polonaise de 1862, devenu commandant en chef de la
Commune) a été mortellement blessé, à 35 ans, le 23 mai
1871, le jour où Montmartre tombe ; il a d’abord été transporté à
Lariboisière puis, déjà mort, jusqu’à l’Hôtel de Ville. Là, mis en bière dans
son uniforme et enveloppé d’un drapeau rouge, il est conduit à la lueur des
torches au Père Lachaise ; le cortège fait halte à la Bastille et dépose le
corps au pied de la colonne de Juillet, « et les fédérés vinrent l’un
après l’autre mettre un baiser sur le front du général », écrit Lissagaray. Au Père Lachaise, où les
canons fédérés cessent pour cela de tonner, il est inhumé dans un caveau. Ses
restes en seront retirés huit ans plus tard pour être mis dans une fosse
commune du cimetière d’Ivry.
- groupe de la rue Myrha de l’Association Internationale des
Travailleurs (Ière Internationale, 1867). Il se réunit chez le Dr Dupas, au n° 76, deux fois par semaine. Victorine Brocher et son mari, qui habitent rue de la Chapelle mais ont
fréquenté d’abord le cabinet du médecin, qui est celui de leur enfant, très
malade, ont adhéré à ce groupe, la femme y entraînant l’époux. La loi ne
permettant pas la réunion de plus de trois personnes sans autorisation
officielle, c’est Roulier qui, secrétaire du groupe, fait la liaison avec les
autres.
Le 16 novembre 1867, chacun des
membres du groupe de la rue Myrha apporte le premier versement de ses 20
francs, payables par fraction, qui permettront la création d’une boulangerie
coopérative dans le quartier de la
Chapelle, qui sera la première à Paris (On a vu celles des
boulangers juifs rue Doudeauville). Une épicerie coopérative suivra mais toutes
deux couleront d’avoir trop fait crédit durant cet hiver 1867 où un froid
rigoureux s’ajoute à la misère. La boulangerie coopérative renaîtra en 1873
mais, cette fois encore, sans pouvoir durer bien longtemps.
Mais Victorine Brocher, piqueuse
de bottines qui a laissé des souvenirs, aura tout de même l’occasion d’y faire
la connaissance de Léo Frankel
(ouvrier-bijoutier, qui représente la section allemande de l'Internationale,
sera Délégué au Travail, à l'Industrie et à l'Echange de la Commune et fera décréter
l'interdiction du travail de nuit dans les boulangeries), d’Auguste Vermorel (qui sera élu au Conseil de la Commune par le XVIIIe
arrondissement, grièvement blessé le 25 mai 1871. Il est transféré comme
prisonnier à Versailles, où il meurt lentement faute de soins), de Charles Delescluse (qui sera délégué à
la guerre de la Commune ;
le 25 mai, il ne fera rien pour éviter la mort sur une barricade au
Château-d'Eau).
On descend le bd Barbès > Kata
- Seul l’ancien Barbès Palace, construit en 1914 au 34
boulevard Barbès, peut faire concurrence au Louxor en matière d’ancienneté,
mais sa typologie traditionnelle héritée du théâtre ainsi que son décor convenu
- dans le goût Louis XVI - n’ont pas l’intérêt du « Louxor ». Au
r-d-c du magasin de chaussures Kata, (là depuis 1988), sont préservés les
décors du ciné, empruntés au music-hall tandis que la salle est calquée sur
celle d’un théâtre : colonnes cannelées, couronnées de chapiteaux ioniques
et de masques ; scène fermée par un rideau rouge, couverte d’un fronton
cintré dont la clef s’orne d’une tête coiffée d’une lyre. Un escalier à 3
volées conduit au balcon dont la silhouette forme une belle courbe. La marquise
extérieure (architecte P. Dubreuil) date de 1936 à l’occasion de la
transformation de la devanture du cinéma. En janvier 1922, on y projette l’Assommoir, de Charles Maudru et
Maurice de Marsan, en 4 épisodes, avec Jean Dax et Georges Lannes.
Au carrefour
Christiani/Barbès/Poissonniers
-
l’élargissement de la rue des Poissonniers en boulevard Ornano date de 1863,
(il ne prend le nom de Barbès qu’en 1882). Gervaise
le voit se réaliser sous ses yeux (l’action du livre, rappelons-le, se déroule entre
1850 et 1868) : « Tout un côté de la rue des Poissonniers était par
terre. Maintenant, de la rue de la
Goutte-d’Or, on voyait une immense éclaircie, un coup de
soleil et d’air libre ; et, à la place des masures qui bouchaient la vue
de ce côté, s’élevait, sur le boulevard Ornano, un vrai monument, une maison à
six étages, sculptée comme une église, dont les fenêtres claires, tendues de
rideaux brodés, sentaient la richesse. Cette maison-là, toute blanche, posée
juste en face de la rue semblait l’éclairer d’une enfilade de lumière ».
Cette maison toute blanche de six
étages, c’est le premier Palais de la Nouveauté de Crespin, de 1856, entre 11 et 15 bd
Barbès, mais que Zola a vu reconstruit en 1874 (r-d-c et entresol aux magasins,
étages loués).
"La maison créée par M. et
Mme Crespin a pour objet principal la vente à crédit de marchandises de toute
nature, principalement des objets d'ameublement, de literie, de bijouterie et
d'habillement... vendus directement ou par l'intermédiaire de ses fournisseurs
et des négociants avec lesquels elle est en rapport, payés par des acomptes
mensuels ou hebdomadaires, reçus à domicile par les employés de la maison. Pour
augmenter les facilités offertes aux clients, la maison accepte même à recevoir
des dépôts de petites sommes applicables sur des acquisitions postérieures et
proportionne à ces dépôts les ventes à crédit qu'elle consent. Les classes
laborieuses sont naturellement celles qui profitent le plus des avantages
qu'offrent ces crédits et dépôts. Par suite, le nombre des clients est
extrêmement étendu, et les acquisitions faites sont d'importance généralement
minime".
les dômes sur bd Barbès datent de 1910
On prend la rue Christiani,
1887-1892 Des travaux importants
sont faits aux 30 à 34 rue de Clignancourt et 5 à 15 rue Christiani, ainsi que
l'immeuble à rotonde et coupole à l'angle de ces deux voies (pilastres
corinthiens, têtes de Mercure et caducées, balcon ouvragé). Le 7 et le 11 de la
rue Christiani sont démolis puis reconstruits. Tous ces travaux sont dirigés
par l'architecte Le Bègue. Les sculptures sont d'Etienne Leroux.
Crespin fait construire le hall central, large de 13,60 m, haut de 14 m et long de 57,82 m. Une usine centrale installée dans une dépendance permet de fournir l'électricité utilisée.
Crespin fait construire le hall central, large de 13,60 m, haut de 14 m et long de 57,82 m. Une usine centrale installée dans une dépendance permet de fournir l'électricité utilisée.
- 17, rue Christiani où Aristide Bruant a vécu jusqu’à sa mort
en 1925. L’immeuble haussmannien composait autrefois une des ailes des grands
magasins Dufayel. L’homme au chapeau
rouge peint par Toulouse-Lautrec habitait au quatrième à droite. Dans le
couloir d’entrée, un vitrail Art nouveau de 2 mètres sur 3 que le
célèbre chansonnier aurait commandé.
à l’arrivée sur rue de Clignancourt,
on évoque le :
- bal du Château Rouge, ou
Nouveau Tivoli, 42 à 54 rue de Clignancourt et 7 à 13 bis rue Custine.[le
château datait de 1789, avait été le poste de commandement de Joseph Bonaparte,
le 30 mars 1814, quand les Alliés arrivèrent à Paris.] Le bal a ouvert en 1844.
De ses deux allées de tilleuls, l’une accueille l’orchestre sous une tente de
coutil, les tables de café et la danse où rivalisent Pritchard, répétiteur de philosophie, la reine Pomaré (Elise Rosita Sergent, née en 1824 rue du Grand
Prieuré, qui mourut dans la misère encore jeune, en 1846, dans un galetas de la
rue d'Amsterdam qu'elle louait 15 francs par mois), Rose Pompon. La seconde allée est toute entière réservée à la
promenade. L’éclairage en verres de couleur y joue sur les toilettes. C’est là
qu’a eu lieu le premier de la campagne des banquets, le 10 juillet 1847, qui
réunit 1 200 personnes, dont 86 députés ; c’est là que Martin Nadaud est convié, deux ou trois ans
plus tard, au banquet qui commémore l’adoption du tarif négocié entre délégués
patrons et ouvriers typographes en 1842 ; il y croise Pierre Leroux. Démoli en 1882.
Nana, la fille de Gervaise, « comme on l’avait flanquée deux
fois dehors, au Château-Rouge,
rôdait seulement devant la porte, en attendant des personnes de sa
connaissance. La Boule-Noire*, sur
le boulevard, le Grand-Turc**, rue des Poissonniers, étaient des salles comme il
faut où elle allait lorsqu'elle avait du linge ».
*La Boule Noire était « primitivement
une goguette fondée en 1822 par une fille galante, Belle en cuisses, très en
vogue sous le Directoire pendant lequel elle était l’amie de Barras. Rigolboche
((Marguerite Badel) qui dansa le « chahut » ou « cancan» créé en 1845) y débuta
et le quadrille des lanciers y fut lancé en 1857. Disparut vers 1880, remplacé
par la Cigale.»
« Jupillon
promit à Germinie de ne plus retourner au bal. Mais le jeune homme avait un commencement de réputation à la Brididi [de
son vrai nom Paul Piston, fourreur dans la journée, « Le héros du
lancé »], dans
ces bastringues de barrière, à la Boule-Noire, à la Reine Blanche, à l'Ermitage.
Il était devenu le danseur qui fait lever les consommateurs
des tables,
le danseur qui suspend toute une salle à la semelle de sa botte jetée à deux pouces au dessus de sa tête, le danseur qu'invitent et que rafraîchissent
quelquefois,
pour danser
avec elles,
les danseuses
de l'endroit.
Le bal pour
lui n'était
plus seulement
le bal, c'était un théâtre, un public, une popularité, des applaudissements, le murmure flatteur de son nom dans des groupes, l'ovation d'une gloire
de cancan dans le feu des quinquets. » Edmond et Jules de Goncourt, Germinie
Lacerteux
- 26, rue de Clignancourt, au fronton
de Dufayel, bas-relief de Dalou «le
Progrès entraînant le Commerce et l'Industrie sous le regard protecteur de la
Science et de l'Art» est sculpté en 1895. Le sculpteur Falguière réalise «la Publicité qui est l'âme du commerce» et
«l'Economie et le Travail grâce auxquels on peut arriver à l'aisance".
Structurae.
L'architecte Rives prévoit une
nouvelle architecture de style «Louis XVI moderne» pour la rue de la Nation
(Sofia). Les ferronneries sont dans le style "Art nouveau".1913. Dufayel
reprend Crespin aîné en 1888, Dufayel qui travaillait chez Crespin depuis 5 ans
quand Zola vint faire son enquête. 15 000 employés du temps de Dufayel ;
Dufayel meurt fin 1916, ses magasins ferment
en 1930. Puis BNP en 1946, jusqu’à 6 000 employés. Puis 2002 : il est
créé 280 logements de différentes catégories. Des magasins comme «Virgin
mégastore» et «La grande Récré» viennent s'y installer.
**Le Grand-Turc, 10 bd Barbès, face à la rue de Sofia, lieu de
réunion de la colonie allemande jusqu’à
la guerre de 1870, (ouvert en 1806 rue des Poissonniers) fréquenté par Nerval
et Dumas, cité dans l’Assommoir. Les
vedettes en sont Céleste « Mogador »
(Céleste Veinard) qui, plus favorisée que la reine Pomaré, épousa le comte
Lionel de Chabrillan et mourut en 1909 ; Chicard
(Lévêque, négociant en cuir de la rue Mouffetard, large pantalon et au chapeau
pointu). En 1930, le bal remplacé par un immeuble destiné à loger le personnel
des Galeries Barbès.
On remonte Barbès jusqu’à Poissonniers :
- mosquée Al Fath, qui sera intégrée dans le nouveau bâtiment de
l’ICI
On prend rue Polonceau, à d.
- au 38 rue Polonceau existe
toujours la maison d'un des meuniers, celui du Moulin des Couronnes, le dernier
démoli ; siège de nombreuses associations, comme Grandiose. La rue, sur la
crête d’une petite butte, avait pour rôle, à son origine, de desservir les cinq
moulins qui se trouvaient sur la butte
des Couronnes de 1750 à 1830 environ. Précédemment appelée rue des
Meuniers, rue des Couronnes, chemin des Couronnes, plus anciennement chemin et
rue des Cinq-Moulins. La rue fait partie de la ville de Paris depuis le
23 mai 1863 et porte depuis le 24 août 1864 le nom des Polonceau, le père à qui l’on doit le
pont des Tournelles, et le fils qui perfectionna la locomotive. Jean-Barthélémy
Camille Polonceau (1813
- 1859)
est un ingénieur français aux chemins de fer, l’inventeur de la « ferme
Polonceau » (ferme à double poinçon disposés en V inversé). Constructeur
du train impérial de Napoléon III de la Compagnie du Chemin de fer de Paris à Orléans. L’un
des 72 noms inscrits au 1er étage de la Tour Eiffel.
Pratiquement en face :
"le petit antre grise" d'Alain Bashung |
- 29 rue Polonceau, G. Belus et
A. Hénocq architectes. Cette petite opération mixte de réhabilitation –
extension s’inscrit dans le cadre de la résorption de l’habitat insalubre en
site urbain dense, au cœur de la
Goutte d’Or. Une extension en bois sur cour vient se relier
au corps de bâtiment principal. Elle permet la réalisation de 6 appartements
PLUS traversant et d’1 commerce, et offre une grande diversité typologique.
SIEMP
On prend Erckmann-Chatrian
- Ecole maternelle, 16 rue
Richomme (architectes Jean-Louis Cardin, Jean-François Briand et Edouard
Grassin, 1994) Pour "raccommoder la ville" dans ce "site décousu
et fragmenté, résultat de la démolition du tissu urbain ancien", - de 1983
à aujourd’hui, plus de 100 immeubles ont été démolis à la Goutte d’Or dans le cadre
de la rénovation du quartier -, les architectes ont voulu des matériaux sans
"fantaisie" et "un changement d'échelle progressif", entre
une crèche basse et un immeuble plus haut. Ainsi les salles de classes (un
étage) en fond de parcelle masquent des immeubles peu esthétiques. Le bâtiment
de 2 étages à droite abrite le réfectoire et un préau couvert d'un toit courbe
gris, qui a un rôle de "repère et d'identification de l'école". Le
long des immeubles mitoyens tout à droite, une construction haute plus banale
abrite les logements de fonction.
On prend, à dr. dans la rue des Gardes, devenue une « rue de la Mode » où s’alignent les
boutiques de créateurs ; le jeudi 4 juin 2009, a eu lieu vente aux
enchères d'œuvres d'art, en particulier au 6bis, chez G’ART A LUI. La Goutte d’Or
serait en voie de « gentrification », selon certains sociologues
urbains parce que « boboïsation » n’est guère prononçable.
A g. : on aperçoit, entre
les arbres du square (aménagé en lieu et place du passage Léon et d'immeubles
détruits dans les années 1970 et 1980, et bien plus tôt du moulin Fauvet et de
sa guinguette), réaménagé en 1990 puis en 2006) :
- La fresque murale sur les
immeubles mitoyens est de Bernard Heloua,
qui a laissé les jeunes grapheurs du quartier réaliser le bas de son œuvre.
Eventuellement, à dr. :
On descend Boris Vian ; on croise… la croix de St-André des
rues de Chartes/Charbonnière. De 1830 à l’annexion, La Chapelle, commune à
laquelle la Révolution a rattaché la Goutte d’Or, ce faubourg
rural et viticole, est passée de moins de 2 500 à 40 000 habitants.
Cela s’est fait, entre autres, par le lotissement des rues de Chartres et de la Charbonnière, dont le
tracé adopte la forme d’une croix de saint André pour rendre plus facile la
pente.
Puis rue Fleury :
1, rue Fleury : Centre musical Fleury Goutte d'Or – Barbara
Un équipement public unique à Paris, dédié aux Musiques Actuelles ouvert en
février 2008]
- fresque le long de l'école
Saint-Luc : "les amoureux qui se bécotent...", de Geneviève Bachellier, artiste du
quartier ;
On prend rue St-Luc, à
gauche :
- l’église Saint-bernard, rue
d’Alger quand est posée sa 1ère pierre en 1858 (auj. Affre), livrée
au culte en 1861, d’abord comme annexe de St-Pierre de Montmartre ;
néo-gothique en pierre de taille, toiture en ardoise dans le goût bourguignon.
Par l’arrière, on voit les 2 sacristies et la chapelle de la Vierge, au couronnements
pyramidaux : animation et variété des volumes extérieurs. Flèche de 60 m de haut. Elle a été,
autour de 1996, le haut lieu du rassemblement des étrangers sans papiers. Dans
le Square Saint-bernard, devant, dans les années 1930, la Phalange du 18e, groupe de théâtre
ouvrier, faisait de l’agit-prop pendant le bal du 14 juillet, (Pour celui de
1931, la Phalange
du 18e y a fait un lâcher de tracts) et accompagnait de ses chœurs
parlés l’orateur du Secours Rouge International.