A la pointe Philippe Auguste,
entre l’avenue du même nom et le boulevard de Charonne, on se trouve au confluent
imaginaire de 2 cortèges décisifs pour le mouvement ouvrier : celui du
dimanche 22 janvier 1905, autrement dit celui des funérailles de Louise Michel,
et celui du dimanche 24 mai 1936, soit la montée au Mur des Fédérés, qui se
fait alors chaque année à l’anniversaire de la Semaine Sanglante mais se
trouve suivre de peu, cette année-là, la victoire électorale du Front Populaire.
Le cortège funèbre de Louise Michel, est parti de la gare de
Lyon comme 10 heures sonnaient au beffroi ; par le bd Diderot et l’avenue
Philippe Auguste, il parvient à notre hauteur vers 11h. Il fait un soleil clair
et froid. Passe d’abord devant nous un chariot portant des couronnes
d’immortelles, des jaunes et des rouges, des couronnes d’églantines, des
coquelicots, et une écharpe maçonnique bleue terminée par un triangle, celle de
la loge de la Philosophie sociale, dans laquelle Louise a été
initiée 4 mois plus tôt.
Voici maintenant le char funèbre
noir, « sans même les filets blancs qui courent sur le dais du corbillard
des pauvres », un char de 8e classe selon le Journal des Débats ; certains
croient y reconnaître le char même qui servit aux obsèques de Victor
Hugo ; un drap rouge qui recouvre la bière.
Derrière le corbillard, 4
femmes : Charlotte Vauvelle, la seule qui soit entièrement vêtue de
noir, et qui porte un voile de crêpe ; c’est l’amie, la compagne de Louise
Michel depuis dix ans. A côté d’elle, Séverine, qui a été la secrétaire
de Jules Vallès,
la continuatrice du Cri du Peuple, la journaliste qui, sous le nom de plume
d’Arthur Vingtras, publia des chroniques libertaires
dans la Fronde,
le quotidien féministe de Marguerite Durand, dreyfusarde, l’une des
créatrices de la Ligue des Droits de l’Homme. A côté, le Dr Madeleine
Pelletier, secrétaire générale de cette Grande Loge Symbolique
Ecossaise qui, depuis 1899, admet les femmes et qui a convaincu Louise d’y
entrer. Enfin Béatrix Excoffon, « qui porte un jupon de couleur
jaune à fleurs et, sur son corsage, une large étoffe rouge en sautoir ».
Elle la portait déjà sous la
Commune dans le Comité de vigilance des citoyennes du 18ème
arrondissement, sur la barricade de la
place Blanche, où, jeune fille de 22 ans, elle était ambulancière comme Louise, avec laquelle elle était restée liée.
C’est son mari, François Excoffon, devenu libraire-éditeur à Montmartre, qui publie
les œuvres de Louise.
Au deuxième rang, des hommes. On
dit que par respect, aucun d’eux ne fume dans le cortège. Anatole Le Grandais,
ancien chef de bataillon de la
Commune, conseiller municipal de Clignancourt, qui a proposé,
le 21 novembre dernier, au cours d’une séance houleuse du conseil municipal de
Paris, l’érection d’une statue au chevalier de La Barre, face au Sacré Cœur,
avec cette dédicace : "Au chevalier de La Barre, la libre pensée et la France
reconnaissantes." C’est lui qui, au terme du défilé, devant le cimetière
de Levallois, rappellera le rôle de Louise durant la Commune, dont il dit
qu’elle fut « le plus beau cri de révolte sociale qui ait été poussé par
l’humanité ». Camélinat, l’ancien directeur de la monnaie de la Commune, celui qui a fait
frapper 10 000 pièces de 5 francs portant sur la tranche, à la place du
« Dieu protège la France »
qui y figurait depuis 1848 : « Travail, Garantie nationale ». De
plus, la femme de Camélinat a été détenue en même temps que Louise Michel à la
prison des Chantiers de Versailles, et a pu en apprécier la bonté. Charles
Malato, déporté en Nouvelle Calédonie avec ses parents, écrivain, auteur de
La Grande Grève, celle de Montceau-les-Mines, qu’il va publier cette année 1905,
journaliste et militant libertaire, vénérable de la loge de la Philosophie sociale.
Sébastien Faure, le
fondateur du Libertaire ; c’est
au bénéfice de ses publications que Louise a rompu son exil londonien, dix ans
plus tôt, pour faire avec lui une tournée de conférences. Et puis il y a celui
avec lequel Louise « propagandait » comme il dit, depuis 3 ans, Ernest
Girault, le rédacteur de l’Homme
libre.
En février, mars et avril 1904, ils
ont visité près de 50 villes : Vers
la cité meilleure pour lui, La prise
de possession pour elle ; ils ont remis ça à l’automne avec des conférences
consacrées à l’Antimilitarisme et la Révolution russe. A
Levallois, Girault, « Rappelant les évènements qui se déroulent en Russie,
opposera les admirables funérailles que Paris socialiste fait à Louise à
celles, plus expéditives qui attendent le tsar ». Louise est morte le 10
janvier. Peu avant sa mort, elle a dit à Ernest Girault : « Mais regardez
là-bas en Russie, voyez comme c’est beau ! Vous verrez : au pays de
Gorki et de Kropotkine se passeront des évènements grandioses. Je la sens
monter, grandir, la révolution qui balaiera le tsar, et tous ses grands ducs,
et la bureaucratie slave, et qui bouleversera cette immense Maison des morts », selon un titre
de Dostoïevski. Et aujourd’hui, L’Humanité
de ce dimanche 22 janvier titre en Une : « Vers la Révolution – Les grèves
de Pétersbourg ». Compte tenu de la gravité des évènements, et de l’espoir
qu’il suscite, l’Humanité a réussi,
depuis décembre, et malgré le coût de la chose, à se payer un correspondant
permanent à Saint-Pétersbourg, qui y restera jusqu’en juin 1905. Et Lucien
Herr, est russophone : « Aujourd’hui, plus de 100 000 ouvriers,
peut-être plusieurs centaines de milliers d’hommes vont descendre dans les rues
de Pétersbourg. La police a fait savoir qu’elle ne tolérerait ni attroupements
ni cortèges, et qu’elle recourrait aux mesures les plus énergiques. On annonce
que toutes les troupes disponibles sont sous les armes. Et on annonce que les
ouvriers sont résolus à passer outre à toutes les interdictions, à toutes les
menaces. »
Demain, on appellera, et à partir
de demain on n’appellera plus ce 22 janvier 1905 que « Le Dimanche rouge
de Saint-Pétersbourg » L’Humanité
du lundi titre : « La
Révolution à Pétersbourg – Répression sauvage – 1 500
tués et blessés », et elle décrit les obsèques de Louise en p. 2. L’Humanité du mardi 24 titre :
« La Révolution
russe – Une journée du tsar : 10 000 tués et blessés »
La révolution russe, la 1ère,
celle de 1905, va jouer un rôle dans le processus de l’unité socialiste, et ça
commence ici, dans ce cortège. Le « Parti Socialiste Français », de
Jaurès, Briand et Viviani n’entrevoit encore qu’une révolution par étapes,
en commençant par un régime constitutionnel ; le « Parti
Socialiste de France » des vaillantistes et des guesdistes parle lui de
« brûler les étapes » ; mais ils sont tous là, les socialistes
« ministériels », que Louise n’appréciait guère, et qui ont ouvert
une souscription pour lui faire hypocritement cette marche triomphale, à en
croire le « Parti Ouvrier Socialiste Révolutionnaire » d’Allemane.
Dans 8 jours, le 30 janvier, un meeting va être appelé par les 3 partis
socialistes cités plus haut, avec le concours de la CGT et des Comités socialistes
de Russie et de Pologne et, pour la 1ère fois, on verra ensemble sur
l’estrade du Tivoli Vaux Hall, rue de la Douane, sous la présidence de Vaillant, Allemane pour
le POSR ; Bracke, remplaçant Jules Guesde, malade, pour le PSDF, et Jaurès
pour le PSF.
L'arrivée du cortège de Louise Michel au cimetière de Levallois |
Disons qu’à partir de midi, (on
est censé être prêt pour 1 h), le cortège se forme sous nos yeux :
Groupe de tête, rassemblement
à l’angle de la rue du Repos et du bd de Ménilmontant : Harmonie populaire
de Paris et de la
Bellevilloise, Chorale Populaire de Paris, de Bagneux et
d’Ivry, Anciens de la Commune,
CC du PCF, CAP du PS, direction de la
CGT, délégations des groupes parlementaires PC et PS, CA du
Populaire et de l’Humanité ;
1er groupe, enfants,
devant le 22 bd de Ménilmontant : Léon
Frot, conseiller municipal, chorales, dont celle de la Bellevilloise, du Secours
Rouge International, des Faucons Rouges (600),
Tambours du Patronage de la Bellevilloise, etc. 4 500 enfants, le groupe
Dimitrov du patronage de la Bellevilloise ;
2e groupe, Anciens
combattants, devant le 6, bd de Ménilmontant, avec l’Harmonie socialiste ;
les officiers de réserve républicains sont accompagnés d’une énorme gerbe en
l’honneur d’Henri Barbusse, le
fondateur de l’ARAC, enterré au Père Lachaise le 6 septembre 1935 ;
3e groupe, les
travailleurs intellectuels, devant le 200 bd de Charonne, avec la Chorale
de l’Université ouvrière : Paul Vaillant-Couturier,
Joliot-Curie ; les revues Commune, Europe, Vendredi, Soutes, Inquisition ; Aragon,
Nizan, Le Corbusier, Eugène Dabit,
Jean Lurçat… Une délégation retour
d’URSS signale par sa banderole qu’elle parlera le 29 mai à Wagram. Fermant la
marche : les Espérantistes, les Cercles scientifiques, Travailleurs sans
Dieu, Aviation populaire « l’Aile tendue » ;
4e groupe, la Seine et Marne, devant
le 128 bd de Charonne (M° Bagnolet) ;
5e groupe :
les femmes, devant le 138 bd de Charonne, avec la Chorale juive ;
6e groupe, les organisations
syndicales, devant le 170 bd de Charonne, avec l’Harmonie des
Transports ; des groupes imposants des travailleurs juifs :
« Contre tous les nationalismes, union des travailleurs français et
immigrés ». Derrière le large calicot de l’Etoile Nord-Africaine,
plusieurs milliers de travailleurs Nord-Africains, des pancartes :
« Amnistie totale en Afrique du Nord », « Abolition du code de
l’indigénat » « Suppression du service de mouchardage de la rue Lecomte » ;
7e groupe, les sportifs,
devant le 148 bd de Charonne (c’est l’angle sud avec la rue de Bagnolet), avec
l’Harmonie de Clichy, la FSGT :
« Pas un sou, pas un homme pour Berlin » (les Jeux Olympiques de) ;
8e groupe, les
jeunesses, devant le 138 bd de Charonne : « La jeunesse salue les
30 000 fusillés, nous les vengerons ! » ; portraits de
Jules Vallès, de Delescluze. Les jeunes du Secours Rouge International, coiffe
rouge, photos d’Henri Vuillemin, jeune
ouvrier du 20ème tué par la police le 26 février 1934 en s’opposant
à un meeting fasciste rue des Pyrénées, et Roger
Scorticatti, 16 ans, tué le 9 mai 34 sur une barricade anti-croix de feu de
Livry-Gargan par un commissaire de police ;
9e groupe,
Seine-et-Oise, Ouest, devant le 120 bd de Charonne ;
10e groupe, S&0,
sud, devant le 108, bd de Charonne (M° Avron) ; 11e, S&0,
Nord, 96 bd Charonne ; 12e, Seine, banlieue Ouest ; 13e,
Seine, banlieue Sud ; 14e, Seine, banlieue Nord, 15e,
Seine banlieue Est ; 16e, Paris Ville, RG, devant le 22 bd de
Charonne (M° Nation) avec l’Harmonie de Gentilly et 13e arrondissement
en tête ; 17e, Paris Ville, RD, avec la fanfare l’Etincelante
du 20e, Mocquet père, et 18e arrondissement en tête…
Derrière le cercueil de Louise
Michel, en plus des partis, syndicat, associations de Libre pensée, délégations
de la Fédération Anarchiste de Londres, du Parti ouvrier démocrate russe, des
anarchistes espagnols, polonais et italiens, on peut voir l’immense drapeau
rouge avec ses lettres blanches désignant la Chambre syndicale des ouvriers boulangers, groupe
qui a commencé le 1er à entonner l’Internationale,
bientôt reprise par tous, et qui alterne avec la Carmagnole,
et des cris : « A bas la calotte ! La calotte, hou, hou !
Vive la Commune ! »
Des femmes, l’églantine piquée au
corsage, le ruban rouge barrant la poitrine ou serrant la taille, chantant
parfois l’Internationale. Un ménage ouvrier, qui a sacrifié sa journée de repos
et emporté fillette de 13 ou 14 mois, lourde déjà pour leurs bras, et qui se
l’échangeront jusqu’à Levallois. Et il y a parmi eux Benoît Broutchoux qui cherche Pierre
Monatte. Benoît Broutchoux, plusieurs fois condamné à Montceau-les-Mines et
Blanzy a dû aller s’employer dans les mines du Pas-de-Calais. Il anime l’Action syndicale, l’organe du
« jeune syndicat » comme on dit là-bas pour l’opposer au « vieux
syndicat » de Basly et Lamendin. Il va à nouveau purger une peine de
prison, il cherche quelqu’un pour le remplacer dans ses activités syndicales
pendant ce temps-là. C’est peut-être Emile
Pouget, présent dans le cortège, qui lui indique ce Pierre Monatte qu’il a
fait entrer au Comité des Bourses du Travail. Broutchoux le cherche, le trouve,
le convainc et Monatte, alors correcteur et auteur de quelquess articles dans Pages libres, va partir pour Lens
remplacer Broutchoux jusqu’à la fin de l’année et la sortie de prison de
celui-ci.
Les Obsèques de Louise Michel Eau-forte d'Albert Peters-Desteray, 1905. Musée d’Art et d’Histoire de Saint-Denis |
On laisse ici le cortège filer
vers Levallois...
On va jusqu’à l’allée centrale.
Au coin de la rue du Repos, à 13h on était déjà très serrés, à côté de Thorez, des représentants des PC
anglais et Espagnol ; vers 13h15 sont arrivé Léon Blum, très acclamé, Jean
Zyromski (le courant de « la Bataille socialiste » dans lequel Jean
Zyromski, en charge de la page sociale du Populaire, a regroupé dès 1927
les éléments hostiles à la participation socialiste au gouvernement, domine
alors la Fédération de la Seine);
Racamond, Jouhaux et Frachon. Le
cortège s’est ébranlé : derrière la musique, les derniers communards, avec
leurs cannes, soutenus, Camélinat toujours vivant, avec ses filles. On est monté
vers le mur des Fédérés, les Communards s’asseyent sur un banc, en face, la
foule fait silence à leur passage. Les personnalités s’alignent et, le défilé commence
à passer devant eux à 14h15.
Mais, une heure plus tard, seul
le 1er groupe, celui des enfants, est passé et le 16e
groupe n’a pas démarré de la place de la Nation, on déplace donc dirigeants et
personnalités vers l’allée centrale en décidant que le cortège traversera en
ligne directe le cimetière pour ressortir rue des Rondeaux sans passer devant
le Mur.
A 21h15, on n’en est encore qu’au
9e groupe, la nuit est tombée, on fait des torches avec du
journal ; ce n’est qu’à 22h20 que se présente le dernier rang du 17e
groupe.
Le groupe Regards, le groupe Mars
sont perchés, autour d’une magnifique jeune-fille dressée contre le ciel, au
sommet d’un tombeau (peut-être Jacqueline Laurent, 18 ans, compagne de Sylvain Itkine
ou déjà de Prévert ; elle sera Françoise dans Le jour se lève). Du toit qui abrite les os des familles Chrétien
Delafolie et Rabourdin, une bande de jeunes gens chante la Carmagnole. Toutes les 10 mn, un groupe du théâtre ouvrier lance
« Camarades, la vie est à vous ».
Il y a dans le cimetière comme
une grande joie qui ne profane pas les morts mais défie la mort. Il paraît
nécessaire que dans ce lieu les hommes et les femmes qui vivent affirment avec
puissance leur vie. C’est peut-être le seul hommage digne des morts, se
souvient Francis Lemarque.
L’édition de l’Humanité du dimanche 24 mai que l’on lit dans le cortège :
« Elle aura sa revanche ! » surtitre : Au Mur, à partir de 13 heures, pour fêter la
victoire !
Pour le pain, pour la paix, pour
la liberté ! titre d’un édito encadré de Paul Vaillant-Couturier qui se
termine par « la foule immense qui défilera au Mur du Père-Lachaise, avec,
devant elle, le programme du Rassemblement populaire à réaliser, et au-delà, le
magnifique espoir de la revanche totale de la Commune, la République française
des conseils du peuple, les Soviets partout ! » repris en ligne de
pied : Les Soviets partout ! »
L’édition de l’Humanité que l’on lit dans le cortège contient, en page 5,
« Sur le Front du Travail » (titre de la page/rubrique), un article
de Pierre Delon : « Pour la revalorisation des salaires (surtitre,)
Une belle série de victoires dans les usines d’aviation ». Un article de 2
colonnes, illustré par « un tourneur au travail dans une usine de
mécanique » : « Depuis des années, écrasés par la crise et les
attaques patronales contre leurs conditions d’existence, ils se sentent forts
maintenant de leur unité syndicale réalisée, ils ont puissamment affirmé leur
volonté lors des élections législatives, et ils réclament les améliorations à
leur sort auxquelles ils ont droit. Pendant ces dernières semaines, de nombreuses
grèves ont eu lieu et se sont terminées par des victoires ouvrières. Un des
exemples les plus significatifs est celui de l’aviation. » Ce sont les
premières des grèves avec occupation qui vont maintenant s’étendre comme une
traînée de poudre.
Un portrait d’Henri Vuillemin (19
ans, que 80 000 travailleurs avaient accompagné au cimetière de Pantin)
domine aujourd’hui une place du Père Lachaise ; les poings se lèvent et le
saluent.
Sur la statue du maréchal
Gouvion-Saint-Cyr, une banderole : « Il faut sauver Ana Pauker »
(Elle a contribué à la fondation du Parti communiste roumain avant d'y être
élue en 1922 au Comité central. Après une première arrestation en 1925, Ana
Pauker a rejoint Moscou
une fois libérée. En 1931, elle participe, sous la direction d'Eugen Fried,
au « Collectif de direction » mis en place par l'Internationale communiste pour épauler la
direction du Parti communiste français ; à ce
titre, elle a poussé au Front Populaire. Elle est alors incarcérée en Roumanie
où elle va être condamnée à 10 ans de prison).
Comité Antifasciste des Galeries
Lafayette. « Libérez Ana Pauker »
Après le mur des Fédérés, on
passe devant les 5 tombes des victimes des 9 et 12 février 1934 : Maurice Bureau, 27 ans, tué le 9 février ;
Louis Lauchin, 20 ans, le 9 ; Ernest Schnarbach, 30 ans, le 9 ; Marc Tailler, 38 ans, le plus âgé, tué
le 12 à Boulogne-sur-Seine ; Vincent
Moris, 35 ans, tué à Malakoff le 12. Ils ont été enterrés le 17 février
1934 par 200 000 personnes qui répondent aux discours de Marcel Cachin et
de délégués communistes étrangers (Zyromsky y représentant la fédération de la Seine du PS) par ces
cris : « les soviets partout ! »
Sur la tombe de Barbusse, la
stèle de marbre rose de l’Oural que l’on voit aujourd’hui, façonnée par des
ouvriers russes, ne sera posée qu’au 1er anniversaire de sa mort, le
6 septembre 1936.
La tombe écarlate de Charles Lorne (tué le 1er
mai 1919, dans l'après-midi, place de l’Opéra lorsque les ouvriers tentent
d’atteindre la place de la
Concorde), fait elle aussi face au Mur.
Dans l’Humanité du lendemain, qui titre « 600 000 au mur »
parmi les 5 photos de la page, l’une montre « Les Bloch victorieux Pour un
contrat collectif dans l’aviation » [Bloch deviendra Dassault], mais le
passage des Bloch n’est pas décrit dans l’article, et aucun mot d’ordre
revendicatif n’y est cité, à part celui des midinettes. Les mots d’ordre
retenus sont exclusivement politiques : « Vive le Front
populaire », « A bas le fascisme », « Les Soviets
partout ».