Le prétexte en est une "découverte de leur Paris ouvrier" destinée aux
lecteurs de la bibliothèque François Villon, 81 boulevard de la
Villette, 10e arrondissement. Trajet Retour ci-dessous. Voir: Sur les quais, ou 3 Susset à la manque pour le trajet Aller.
42, rue Bichat. C'est dans la cour actuelle de l'Ecole Lailler, dans l'angle sud est de l'hôpital, que fut établie la première usine à gaz de France : trois cents becs de gaz s’y allument le 1er janvier 1818. "sous les auspices de M. le Comte de Chabrol" dit la plaque commémorative, avec le concours de la Ville de Paris et du Conseil général des Hospices. C’est le premier établissement public éclairé par ce moyen. Le Comte de Chabrol était alors Préfet de la Seine. L'usine de Philippe Le Bon ne fut fermée qu'en 1860.
"Lailler était un vieux huguenot
particulièrement docile aux suggestions de sa conscience. C'est lui qui suggéra
à l'Assistance publique, l'idée de créer à l'hôpital Saint-Louis, en 1886, une
école, (Elle porte aujourd'hui son nom) où l'on traiterait les enfants
teigneux, évincés des écoles publiques pour cause de contagion, et qui
devenaient de petits vauriens." Dr Raimond Sabouraud (1937)
- Maison des Syndicats, 33 rue
de la Grange-aux-Belles,
impasse Chausson.
Expulsée de la Bourse du Travail le 12
novembre 1905, la CGT
loue d’abord un local provisoire puis Robert Louzon, qui vient d’hériter,
achète le 5 juin 1907, pour elle et les fédérations qui voudront y installer
leur siège un immeuble, ce que la loi de 1884 ne permet pas aux syndicats de
faire directement. Victor Griffuelhes, son secrétaire général, y installe au
rez-de-chaussée une imprimerie, où Monatte entrera comme correcteur en janvier
1908, et où s’imprime la Voix
du peuple, l’hebdomadaire de la confédération depuis son 5e
congrès, celui tenu à Paris du 10 au 14 septembre 1900. Un dispensaire doit
servir à la rentabilité de l’ensemble. Daniel Guérin sera lui aussi, dans les
premières années 1930, correcteur à cette imprimerie, où il croisera Arrachard,
des terrassiers, et Eugène Hénaff qui porte toujours les larges pantalons de
satin noir et la casquette du cimentier.
Le 31 juillet 1908, à l’imprimerie,
Monatte et Emile Pouget (celui du Père
Peinard, rédacteur en chef de la
Voix du peuple) travaillent à un numéro de La Voix du peuple qui
appelle à la grève générale pour le 3 août. La veille, ils ont assisté à la
charge de la cavalerie sur la manifestation de Villeneuve-Saint-Georges, qui a
laissé 4 morts et 200 blessés sur le carreau. A l’étage, le Comité confédéral
est convoqué pour minuit ; Monatte, au sortir de son travail, va coucher
par prudence chez un ami correcteur. Le bureau confédéral n’était pas chaud
pour la manifestation de Villeneuve. La grève du bâtiment avait commencé dans
les sablières de Draveil-Vigneux et durait depuis deux mois ; le 2 juin,
la police y avait déjà fait 2 morts et 10 blessés graves. Depuis la tension
montait, et il était clair que Clémenceau recherchait l’épreuve de force ;
le terrible bilan de la veille, s’il était insupportable n’était
malheureusement que trop prévisible. Au petit matin, le préfet de police,
Lépine, venait mettre fin aux débats en arrêtant Griffuelhes, Pouget et Marie.
Alors qu’il est en prison avec la majorité du Comité
confédéral, Griffuelhes est mis en cause pour sa mauvaise gestion par le
trésorier de la CGT. Quand
il en sort, après le non-lieu du 31 octobre (il a été arrêté le 1er
août), il refuse en bon libertaire de rendre des comptes et préfère ne pas
demander le renouvellement de son mandat en février 1909. Pouget ne se
représente pas davantage au poste de rédacteur en chef de la Voix du peuple.
Léon Jouhaux succède à Griffuelhes le 13 juillet 1909 ; il est ouvrier à
la manufacture d’allumettes d’Aubervilliers, est passé par un cercle
anarchiste, a fréquenté les Universités populaires. Il porte casquette,
barbiche et moustache impériales, la cravate Lavallière, des pantalons bouffant
aux genoux et serrés aux chevilles. C’est Jouhaux qui entraînera la CGT dans l’Union
sacrée et le soutien à la guerre.
Pendant la guerre, le bureau d’Alphonse Merrheim, secrétaire
de la Fédé des Métaux, à la
Grange-aux-Belles est le lieu de rassemblement de tous les
minoritaires qui passent ; Merrheim fait reparaître l’Union des métaux
pour le 1er mai 1915 : un numéro anti-guerre, dont il écrit les
articles avec Rosmer. Ensemble, ils s’occupent de son impression et organisent
la distribution de 15 000 exemplaires. Avec Raymond Péricat, du bâtiment
(Péricat a été le créateur du 1er PCF, en mai 1919, qu’il a doté du
drapeau noir et rouge qui apparaîssait ainsi pour la 1ère fois en
France), et Bourderon, des tonneaux, le secrétaire de la fédération des métaux
organise le Comité d’action internationale, le 21 novembre 1915, qui a son
siège ici, et qui deviendra le Comité pour la Reprise des Relations
internationales le 7 février 1916. Mais Merrheim refusera d’accéder à la
demande de Péricat d’organiser un arrêt de travail le 1er mai 1917
et finira à l’aile droite de la CGT.
Si la
Grange-aux-Belles est d’abord syndicale, la politique n’en a
jamais été exclue. Les 4, 11 et 19 avril 1909 s’y était tenu un congrès
anarchiste pour la constitution d’une Fédération révolutionnaire. Du 7 au 10
octobre 1918, s’y déroule, dans la grande salle de la CGT, le congrès national du
PS, dont la journée inaugurale a eu lieu à la Bellevilloise. Et,
après la scission, du 15 au 17 mai 1921, le premier congrès national
administratif du PC décide ici que le parti s’appellera Parti communiste
S.F.I.C. à compter du 1er janvier de l’année suivante, en même temps qu’il
adopte et publie ses premiers statuts. Le deuxième congrès du parti communiste
S.F.I.C. s’y réunit à nouveau le 15 octobre 1922, devant un unique portrait de
Marx en couleurs, et le délégué du Komintern, Manouilsky, soustrait à
l’observation de la police par une coupure du courant comme Clara Zetkin
l’avait été au congrès de Tours. Auparavant, N’Guyen Aït Quoc, le futur Hô Chi
Minh, et Hadj Ali Abdel Kader, le quincaillier de la rue Mouffetard, y sont
intervenus sur l’importance de la question coloniale.
Didot-Bottin 1920 signale au 33 Grange-aux-Belles, un
apprêteur d’étoffes ; un fabricant d’articles de voyages ; la Maison
des syndicats ; un géomètre ? (est-ce ce qu’il faut comprendre sous
l’intitulé « mesures linéaires » ?) ; un fabricant de boas
et collets en autruche et en marabout. Il serait amusant que l’actuelle galerie
Canal Pictures & Art, joli local industriel au 4 impasse Chausson, occupât
précisément l’atelier de l’ancien fabricant de boas.
A l’été 1923, à la Grange-aux-Belles, il y a un meeting toutes les
semaines, à en croire Jacques Valdour, et 2 à 3 000 auditeurs à chaque
fois. A l’entrée, des camelots vendent La Bataille syndicaliste, L’Avant-Garde
aussi bien que le Libertaire, et l’Ouvrière, l’hebdomadaire que
le PC a lancé en novembre de l’année précédente, à 3 000 exemplaires, et
qui aura une dizaine d’années d’existence, non sans quelques interruptions. Sur
les tables, des livres qui ont pour titre Le droit à l’amour pour la femme
ou Les douze preuves de l’inexistence de dieu, par Sébastien Faure.
Et puis voilà que la cohabitation se fait difficile. Le 11
janvier 1924, nouveau meeting du PC contre la vie chère et la politique
gouvernementale en Allemagne ; les anarchistes, qui ont déjà protesté
contre l’utilisation de ce local syndical par un parti, vont y porter la
contradiction, et la réponse revient sous forme de plomb : 2 anars sont
tués sauf que, selon May Picqueray « Comble de cynisme, un délégué du P.C.
alla trouver la famille Clot, présenta la chose à sa façon et le P.C. fit à
Clot de magnifiques funérailles... après l'avoir assassiné ! »
Effectivement, l’appartenance politique de ce dernier reste controversée, mais
la guerre est ouverte au sein du mouvement ouvrier français.
L’unité, celle en tous cas des communistes et des
socialistes, se remettra en marche après février 1934. En commençant par le
sport : les 23 et 24 décembre, les délégués de 515 clubs de l’USSGT
socialiste (environ 7 000 membres) et de la FST communiste (environ 11 000 membres)
décident ici de la fusion qui crée la FSGT. Le 12 février 1935, s’y tient l’un des
trois meetings commémoratifs des évènements de février 1934 ; c’est
Marceau Pivert qui est à la
Grange-aux-Belles (Zyromski est à la Mutualité) pour la fédération
de la Seine du
PS, partageant la tribune avec le PC, la CGTU et le Comité de Coordination Unitaire
Antifasciste. Enfin, le 8e et dernier congrès de la CGTU s’achève ici le 27
septembre : au soir, on s’en va rejoindre à la Mutualité, où il s’y
déroulait, le congrès de la CGT.
Le 2 décembre 1936, l’association des Amis de l’Union
soviétique, Jean Lurçat et Fernand Grenier en tête, y répondait au Retour de
l’URSS d’André Gide.
En
1949, Aragon y présentait aux lecteurs ouvriers le premier tome de ses Communistes.
25 à 27 rue de la Grange Aux Belles. Maison
basse de faubourg avec porche ouvrant sur une profonde cour bordée d'une
construction d'un étage sur rez-de-chaussée. Lucarnes. PLU
Avant de pénétrer dans l’hôpital Saint-Louis, en face, on
laisse Sabouraud nous rappeller la mémoire de Lailler :
« un médecin de Saint-Louis qui fut un grand homme de bien. Après la Commune de Paris en 1871, lors de la rentrée dans Paris des troupes régulières, l'hôpital Saint-Louis regorgeait de blessés du parti vaincu. Lailler alors en fit fermer les portes et se tint derrière elles pour répondre à toutes réquisitions des autorités. Le vieux médecin avait accroché à sa vareuse d'hôpital sa croix de la Légion d'honneur.
Plusieurs officiers de l'armée régulière se présentèrent pour perquisitionner dans l'hôpital, il les convainquit assez facilement de n'en rien faire, et ils passèrent. Un dernier survint, plus arrogant, qui voulut bousculer le vieux médecin et passer outre. Alors celui-ci arracha sa croix de la Légion d'honneur et la lui jeta au visage. (Il n'en porta plus jamais l'insigne). L'officier dernier venu, frappé d'étonnement devant ce geste du médecin, se retira lui aussi. Ainsi furent sauvés les blessés qui remplissaient les salles de chirurgie. »
25 mai 1895 inauguration d’un buste du Dr. Lailler sculpté par Hannaux, Emmanuel (1855-1934),
- 1 av Claude Vellefaux : Enfin, c'est Lailler encore, qui, ayant rencontré un mouleur italien, Baretta, capable d'imiter à s'y méprendre les fruits en pâtes colorés, le fit installer à l'hôpital Saint-Louis pour y reproduire par des moulages les principaux types des diverses affections cutanées => musée de dermatologie inauguré en 1889. »
- rue Jean Moinon (future rue Jean et
Marie Moinon ?) Le comte Adolphe de Madre de Loos achète les terrains en
1856, les loue à de petits entrepreneurs pour 18 ans, à charge pour eux d’y
construire des bâtiments dont la propriété reviendra au comte de Loos au terme
du bail. Construit lui-même 2 ensembles dans le haut du passage. La
« colonie de la rue St-Maur » (elle s’étend dans le
quadrilatère : rue Jean Moinon, alors passage St-Louis / rue du Buisson
St-Louis / rue St-Maur / rue de la Chopinette (devenue Sambre et Meuse)) comme
dira la délégation ouvrière à l’expo internationale de 1867 : « Tout y est mesquin, l’air y manque… L’on
sent tjs là comme partout la prétention de la charité qui impose ses règlements. »
Le couple Moinon tient, pendant la 2ème guerre mondiale, 19 rue du
Buisson St-Louis, le café des Aiglons qui est toujours propriété de la famille
de Loos)
- L’Egalitaire, 13, 15 et 17 rue de Sambre-et-Meuse.
Née d’une proposition faite dans le Rappel de juin 1876, la coopérative
avait débuté dans un magasin loué 31, rue de la Chopinette (auj. Sambre et
Meuse), ouvert seulement le dimanche matin, et trois jours par semaine de 20h à
22h. A son conseil d’administration, siégeait le mécanicien Murat, l’un des
signataires du manifeste proudhonien des 60, et qui avait été du premier voyage
de Londres, à l’origine de l’Internationale. La coopérative était alors moins
chère de 14 à 17% si l’on ajoutait à ses prix réduits la ristourne de fin
d’année.
En 1887, elle achetait le terrain de la rue Sambre et Meuse,
et y faisait construire, sur trois niveaux : des caves avec monte-charges,
les magasins et une salle de ventes au rez-de-chaussée et, au premier étage, un
magasin pour la rouennerie et la bonneterie, la confection, la chapellerie et
les chaussures, les articles de ménage et les articles de Paris, la
comptabilité, la salle d’attente des fournisseurs et trois salles modulables
pouvant en constituer une seule de 8 mètres sur 10 mètres.
Aujourd’hui, au chapiteau des travées, on voit encore le E
de l’Egalitaire, dont un fil à plomb, suspendu à un triangle, forme la barre
médiane. L’Egalitaire comptait 6 000 sociétaires en 1905 et acquérait
l’année suivante l’immeuble du n°17 pour y faire installer une salle des fêtes, qui pût être
salle de réunion pour 450 à 500 personnes. Y était adjointe une buvette où l’on
trouvait aussi du pain, du saucisson et des œufs rouges en saison [œufs colorés
en rouge avec de l’alun et du bois de campêche, vendus du milieu de février à
Pâques, à raison d’un million par an à Paris]. La boucherie et la charcuterie
étaient rapatriées au siège à cette date. A côté, une épicerie, dont le pain
était fourni par la
Boulangerie communiste, et la « répartition » (en
coopératisme, on ne dit pas la vente) des chaussures – dont les produits
fabriqués par la
Cordonnerie ouvrière – de l’habillement (« la Haute Nouveauté »),
des articles de ménage. A compter du 1er décembre 1906, un service
de livraison à domicile serait organisé les mardis, jeudis et samedis. On
trouvait encore à l’Egalitaire un atelier de réparation de chaussures et, au
13, un chantier où étaient entreposées les 600 tonnes de charbon achetées en
1903. Tous les mercredis soirs, des consultations médicales gratuites y avaient
lieu.
A l’entrée de l’Assemblée générale de 1906, la première à se
tenir dans la grande salle récemment inaugurée, le Cercle socialiste des coopérateurs
de l’Egalitaire a installé une table pour percevoir les souscriptions et les
abonnements mensuels au journal l’Humanité. L’AG approuve, de surcroît,
une subvention de 200 F
à la même Humanité, une de 100
F à la
Ruche, l’école libertaire de Sébastien Faure – on rappelle à
cette occasion que la
Bellevilloise, elle, a donné 500 F – et une troisième de 100 F à Vox Femina. On
demande également l’attribution d’une subvention pour la Symphonie de
l’Egalitaire, de sorte de l’élever au rang des musiques des sociétés
sœurs : la
Bellevilloise, la Revendication de Puteaux, l’Avenir de Plaisance,
etc. La Symphonie
s’engagerait en contrepartie à donner trois grands concerts par an, et des
cours gratuits de solfège, de violon, de chant et de danse aux enfants des
sociétaires.
L’Egalitaire comptera bientôt sept succursales, marquées de
A à G : deux dans le 19e, trois dans le 11e, une
dans le 18e et une dans le 10e.
Le 6 décembre 1908 s’était créée la Fédération Sportive
Athlétique Socialiste (FAS), pour « donner aux jeunes gens les mêmes
distractions qu’on leur propose ailleurs et en leur inculquant des idées qu’on
leur apprend ailleurs à combattre », comme l’écrirait un journal
socialiste de 1912. L’Égalitaire constitua son propre club
sportif en avril 1910. A compter d’août 1912, la FAS et son Comité régional de la Seine qui, outre des clubs
de banlieue regroupait, pour Paris, le Club athlétique socialiste de
Ménilmontant et la
Sportive Amicale de la Gare, étaient domiciliés à l’Egalitaire.
Le 1er août 1914, en pleine mobilisation, la CGT se réunissait à
l’Egalitaire. Seul Raymond Péricat (secrétaire de la Fédé du Bâtiment ;
futur gérant de la colonie de vacances (près de Meaux) de la Bellevilloise) y
réclamait une action de masse.
Durant la guerre, la
FAS était devenue FSSG, et serait FST en juin 1919, le S y
étant désormais l’initiale non plus de « socialiste » mais de
« sportive ». La branche sportive scissionne comme toutes les autres
organisations ouvrières, une partie des membres allaient voter, en juillet 1923,
l’adhésion à l’Internationale rouge des sports, et l’autre pas. L’Egalitaire
ayant voté rouge, les minoritaires durent s’en aller, rue Biscornet, les
majoritaires gardant le sigle FST et le bulletin Sport ouvrier, dont ils
feraient l’hebdomadaire Sport à compter du 5 octobre 1933.
A
cette date, au 17, se trouvait désormais la Librairie du Travail,
toujours gérée par Marcel Hasfeld, avec pour devise : « la vie
enseigne, le livre précise ». Elle publiait, dans sa Bibliothèque
communiste, les Quatre premiers congrès de l’Internationale communiste
et, un peu plus tard, dans sa Bibliothèque de l’opposition communiste, la Troisième
période d’erreurs de l’Internationale communiste, de Léon Trotsky.
- 52-56 avenue ClaudeVellefaux (16 à 18
rue Vicq d'Azir) Ecole municipale
construite par l'architecte-voyer Eugène-Vincent Pierron, entre 1890 et 1892.
Elle constitue un remarquable exemple de l'architecture scolaire de la IIIe
République. Le plan de l'immeuble est en H : deux ailes entourent les cours. La
façade est en brique, les fenêtres en métal et les détails en céramiques de
façades. PLU
- 17 rue Vicq-d’Azir est domiciliée en
1931 l’Armonia Desportivo, affilié à
l’USSGT et recrutant parmi les immigrés espagnols.
- 36, rue de la
Grange-aux-Belles 1905. Alfred Binet fait reconnaître officiellement comme
«laboratoire de pédagogie expérimentale»
le centre de recherches situé dans une école du quartier populaire de
Belleville à Paris où il travaillait depuis déjà longtemps en collaboration
étroite avec Victor Vaney, le directeur de cette école. Binet décrit ainsi ce
labo : 1 petite pièce de 5m sur 4m, au rdc d’un petit pavillon qui prend
jour sur un préau découvert. Les tableaux d’expérience qui garnissent les murs
ont été composés entièrement par M. Vaney.
Il avait cherché à établir si le rythme de la croissance
somatique des enfants était corrélé avec le milieu socio-économique des parents.
On manquait de typologie, Victor Vaney distingua 4 groupes : Misère : enfants qui sont inscrits
à la cantine gratuite et pour la
distribution de vêtements et chaussures de la Caisse des Ecoles ; Pauvreté : enfants inscrits pour les
vêtements et chaussures seulement, ou fils de veuves ou femmes seules, vivant
de leurs salaires sans recours à l’assistance de la caisse des écoles ; Médiocrité : enfants d’ouvriers,
d’employés ou de petits fonctionnaires qui n’ont pas besoin d’assistance sous
aucune forme. Élèves inscrits à la classe de garde. Aisance : enfants de commerçants, d’industriels, de contre-maître ; ou de ménages d’employés ou fonctionnaires dont le mari et la femme travaillent sans qu’il y
ait plus de 2 enfants de moins de 16 ans.
De l’avis de Vaney, son école était dans « un quartier
de niveau moyen quoique plutôt pauvre », néanmoins, c’est la table de
moyenne obtenue par la mensuration (taille, poids, diamètre bi-acromial
(distance entre pointes des épaules), capacité pulmonaire, force musculaire,
volume crânien) de plus de 200 enfants, au jour même de leur anniversaire, qui
fréquentaient cette école, qui sera considérée comme approximativement
représentative de la population parisienne.
René
Zazzo : « Soixante ans après
sa mort, le 5 juin 1971, une plaque fut apposée au 36, rue de la
Grange-aux-Belles à Belleville, à l'issue d'une cérémonie à laquelle j'avais
été convié. Au fond de la salle où se déroulait la cérémonie d'hommage à Binet,
se tenait une vingtaine de vieilles gens.
«Qui sont-ils?» demandais-je au directeur de l'école. La réponse m'émut plus que tous les discours que nous venions d'entendre: «les survivants des écoliers que Binet a examinés au début du siècle dans notre quartier de Belleville.» »
«Qui sont-ils?» demandais-je au directeur de l'école. La réponse m'émut plus que tous les discours que nous venions d'entendre: «les survivants des écoliers que Binet a examinés au début du siècle dans notre quartier de Belleville.» »
Les
années suivant 1905 seront consacrées principalement à la mise au point de son
fameux test de QI.
« Cet instrument est le 1er
exemple d’une mesure directe de la valeur psychologique des individus. Il a
assuré l’idée de l’inégalité des hommes sur une base qui se sentait vague. Il a
permis de montrer son rôle universel et mis à jour cette inégalité. »
écrira Théodore Simon, le continuateur, dans sa préface à La mesure du développement de l’intelligence chez les jeunes enfants,
1926. Claparède, Piaget passeront au Labo du 36. Pour la critique du Binet-Simon et autres révélateurs de "l'inégalité des hommes", voir l'irremplaçable: Michel Tort, Le quotient intellectuel, éd. Maspéro, Paris, 1974, rééd. en 1982, etc.