- 17, rue de la Roquette (au-dessus du
bureau de La Poste), immeuble de 1870, surélevé vers 1900. Verlaine y arrive
avec sa mère, jusqu’à un 4e étage (ou 5e niveau) (c'est-à-dire dans les combles
avant la surélévation), début 1882, il va fêter son 38e anniv. Son vieil Art poétique, qui date de 1874 et de la
prison de Mons : « De la musique avant toute chose, / Et pour cela préfère
l’Impair, / Plus vague et plus soluble dans l’air, / Sans rien en lui qui pèse
ou qui pose. » vient d’être publié dans le numéro du 10 novembre 1881 de Paris-moderne, créé en mars 1881, dont
l’un des directeurs est le futur Courteline. Grâce à quoi, Verlaine est entré
en contact avec les gens de la Nouvelle Rive Gauche, qui se disent symbolistes.
Verlaine reçoit ainsi rue de la
Roquette, Charles Morice, 22 ans, le « prince des jeunes
éphèbes », ou Jean Moréas [26 ans] le « gentilhomme du Péloponnèse »,
monocle et moustache en pointe d’yatagan, qui s’en va répétant « Je suis un
Baudelaire avec plus de couleur ». Moréas a décrit la scène : Mme Verlaine
« accueille tout le monde avec une grâce à la fois gamine et maternelle,
réédite pour la centième fois des plaisanteries d’une crudité militaire, telles
que, en présentant un fauteuil : ‘Monsieur, je vous en prie et même je
vous le commande, mettez ici la 17ème lettre de l’alphabet.’ Par gentillesse,
Paul fait semblant d’être choqué : « Oh ! Maman ! ».
Après que Moréas a déclamé du Baudelaire, Mme Verlaine bondit vers lui, lui
demande de fermer les yeux et d’ouvrir la bouche et elle lui fourre
« entre les dents un morceau de sucre candi énorme, qu’il doit croquer
jusqu’au dernier bout de fil, sous peine d’affliger véritablement la bonne
dame ; car elle affirme que c’est ‘souverain’ contre les mots de gorge et
en fait elle-même une consommation copieuse ». Ils resteront à la Roquette
jusqu’à la mi-1883.
On est ici sur le parcours de
jogging du futur Francis Lemarque, peut-être l’auteur qui chanta le plus
continûment Paris, adhérent du Club pédestre de l’Etoile rouge, section
athlétisme, et participant du 1er Cross international de l’Humanité à Ivry ou Vitry, il ne se rappelle plus, le 26 février
1933.
Quand il s’entraîne dans son
quartier, Lemarque a un parcours de « 3 500 pas » : de
l’horloge de l’usine Schmit (au fond de la cour du n°22 rue de Charonne) par
cette dernière rue, Ledru-Rollin jusqu’à la mairie, en redescendant par la rue
de la Roquette et la rue de Lappe pour revenir devant le « chrono »
de l’usine Schmit. On va donc faire (une partie de) son parcours à
rebrousse-poils
Cette rue de la Roquette est
aussi celle de la montée au Père-Lachaise depuis la Bastille : l’avenue de
la République
ne rejoindra, par tronçons successifs, le boulevard de Ménilmontant qu’en 1892.
Par la rue de la Roquette
passent donc les 100 000 personnes qui suivent le cortège de Blanqui, en
1881 ; là marchent les 60 000 qui suivent celui de Jules Vallès, en
février 1885, dans lequel est visible la couronne de violettes d’un
« cercle socialiste allemand »
et d’où fusent les cris de « Vive la Commune » ; des échauffourées y auront
lieu comme déjà plus tôt boulevard Saint-Michel, qui feront 90 blessés dont
deux graves. En 1887, gravit la pente le convoi d’Eugène Pottier, dont l’Internationale, écrite à la fin de la Commune, germe encore et
ne ressurgira des poitrines du mouvement ouvrier qu’une douzaine d’années plus
tard.
- Fond Cité de la Roquette :
au 5, « styles Dugast », bureaux Renaissance, ISMH. Dans le Bottin de
1930, l’époque où Lemarque court : « Ch. Dugast, fabricant de sièges »
et, au même n°, outre Dugast : « P. Delieux, ébénistes ;
Jacques, ébéniste ; Lubac, garage pour automobiles ».
- 43-45, rue de la Roquette, la
tragédienne Segond-Weber (1867-1945 ; pensionnaire en 1887, sociétaire
de la Comédie Française en 1902 ; ses portraits à Carnavalet, ses robes au
musée de la Mode). Sur rue, deux bâtiments faubouriens accolés élevés de deux
étages carrés sur rez-de-chaussée. Lucarnes en bâtière (couvertes à 2 versants).
Eléments de décor (moulures, garde-corps) XIXe mais sur un bâti sans doute plus
ancien. Rochegude signale une ancienne faïencerie au n°43 (des frères Darte, qui
arrive en 1795 de la rue de Charonne, et sera dirigée ensuite par Olivier, en
1807, puis transférée rue de la
Fontaine-au-Roi avant de disparaître en 1825.) Porte cochère
ouvrant sur une cour très profonde perpendiculaire à la rue. Ensemble très
caractéristique de l'ancien faubourg tant par son ancienneté, sa mixité
fonctionnelle que par sa sédimentation. PLU
- fontaine de 1846, alimentée par
canal Saint-Martin, qui alimente nb fontaines publiques et maisons particulières
sur abonnement.
- 38, rue Keller, domicile en
1895 de Lemoine secrétaire général de la Moissonneuse. « l'une des plus
grandes coopératives de l'Europe, selon Georges Sorel, Introduction à l’économie moderne, 1903
[la Moissonneuse, 32 rue
des Boulets. La plus importante coopérative de consommation parisienne est née
le 14 août 1874 dans un sous-sol de moins de 7 m2, 47 rue Basfroi, de
l’effort de 32 d’ouvriers, ébénistes pour la plupart. En 1894, elle comptait 19
succursales dans le faubourg : 8 épiceries, 2 boulangeries à quatre fours,
4 boucheries, 1 magasin de vêtements et de chaussures, 1 chantier de bois
et charbons, 1 entrepôt de vins et alcools à Bercy, 15 chevaux dans ses
écuries, 150 employés ; elle réalisait 2,5 millions de francs de
chiffre d’affaires et possédait pour 252 000 francs de matériel. Elle
avait atteint 17 000 membres au 1er janvier 1895. grève du personnel de la Moissonneuse en 1892.
Au bout du compte, la
Moissonneuse se trouvera mise en liquidation au début de 1904.]
- 36, rue Keller, « volets
squelettes », Verlaine, parlant des Batignolles : « ces énormes
maisons de plâtre, à cinq ou six étages, avec leurs innombrables volets gris,
comme des poitrines de squelettes à plat »
- 29 rue Keller selon Hillairet,
mairie du 8e (Marais, Popincourt, Fbg St-Antoine, Quinze-Vingts) de 1860 à
1865. Rue Keller, allée principale d’un marché au charbon ds années 1840,
ouverte en 1856.
- 19 Immeuble de rapport
construit en 1860, soit quatre ans après l'ouverture de la rue, par
l'architecte Avezard et l'entrepreneur Ch. Many pour Antoine Rivoire (monogramme
en fonte du propriétaire A.R. à l'entrée). La façade répond aux contraintes du
lotissement et du règlement de voirie. Elle se distingue toutefois de ses
voisines par une composition savante encore proche des modèles de la Monarchie
de Juillet. La façade en pierre de taille comporte cinq travées et quatre
étages carrés sur rez-de-chaussée et un étage en retiré. L'étage noble est
signalé au centre par un "triplet vénitien" desservi par un balcon et
orné de colonnes cannelées à demi-engagées cantonnant les fenêtres en plein
cintre. Des refends bordent les deux travées latérales. PLU
On avance jusqu’au début de
l’école
- 4 rue Keller de 1855 à 1870, locomotives
Anjubault puis Corpet. Auguste Anjubault (1820-1868) est âgé de 35 ans,
lorsqu'il crée en 1855, sa société de construction mécanique et machines à
vapeur ; expose la même année une locomotive à l'exposition universelle,
destinée à la compagnie de chemin de fer de Paris à Orsay pour la ligne de
Sceaux ; oriente ensuite sa production vers des machines de chantier très
demandées durant cette période de création du réseau de voies ferrées et de
compagnies de chemins de fer. Plus de 121 locomotives Anjubault sont sorties de
ses ateliers durant les 15 années de l'activité de son entreprise, dont
qqs-unes vendues à l’export : « Ramgotty », une locomotive Anjubault
de 1862 est exposée au National Rail Museum de New Delhi. Fin 1867, début 1868,
il embauche le jeune ingénieur, centralien, Lucien Corpet pour diriger
l'entreprise, et décède peu de temps après. Après le décès de son patron, Corpet
rachète l'entreprise Anjubault et les ateliers de la rue Keller, et ouvre un
nouveau registre de production de locomotives, sur lequel il recopie de sa main
la production de la maison Anjubault. La rue
Keller, dans le quartier de la Bastille, n'est pas d'un accès facile, du fait
de sa largeur et de son encombrement, notamment par les charrettes des
charbonniers. Dès 1870 il transfère, la production puis les bureaux, dans une
usine plus vaste qu'il a fait construire sur un terrain jouxtant la maison
bourgeoise, récemment construite, où il est domicilié, sur les collines de
Charonne, 117 avenue Philippe Auguste.
- 4 à 12 rue Keller : Groupe
scolaire, Francis Lemarque (alors Nathan Korb), qui y arrive en CP en 1923,
connaît encore les anciens bâtiments ; les travaux commencent juste après
qu’il a passé son certif, à 11 ans et demi, en 1929, pour s’achever en 1931 :
architecte Louis-Hippolyte Boileau en collaboration avec E. Olombel. Les écoles
sont bâties sur les branches d'une équerre, comportant à l'origine, l'école des
filles dans l'une des branches, et l'école des garçons dans l'autre. Le
rez-de-chaussée contient les préaux, ateliers, réfectoires. Les trois étages
suivants, les classes et le quatrième en retrait, les logements et salles de
dessin. La construction en béton armé, très rationnelle, permet d'éclairer les classes
par de grandes baies vitrées. La façade est décorée de grès cérame couleur or
entre les nervures de béton armé et de grès émaillé pour les encadrements des
fenêtres. Entre chaque classe s'élève une colonne de ciment gris. D'une grande
rigueur, le plan répond à un souci de rationalité et de fonctionnalité
maximales dans la lignée des équipements réalisés dans l'entre-deux guerres par
les frères Perret ou François Le Coeur. Par sa hauteur, son plan, la rigidité
de sa façade, il anticipe d'une vingtaine d'années sur l'architecture des
collèges industrialisés de l'après-guerre. PLU
On revient sur nos pas pour
prendre le passage Bullourde ; on tombe, un peu à gauche ds le passage Ch.
Dallery, sur le Foyer de l’Ouvrier :
- Ancien "Foyer
ouvrier" construit en 1914 en brique et pierre offrant l'exemple d'une
décoration très réussie de la façade à partir de matériaux peu onéreux et
faisant écho aux premières constructions sociales à Paris. Le rez-de-chaussée
est traité en bossage rustique. Les baies vont par deux et sont couronnées par
un épais bandeau qui court sur toute la façade. Le reste de la construction est
en brique selon l'usage pour les constructions sociales.
Les fenêtres des premier et
deuxième étages sont couvertes d'un linteau de pierre. Les niveaux supérieurs
sont particulièrement mis en valeur. Les fenêtres du quatrième étage sont
surmontées d'un avant-toit alors que la baie centrale est légèrement plus haute
et forme une lucarne à ferme débordante. Au-dessus vient un étage de combles. En
mitoyenneté, ancien temple protestant construit en 1882 par W. Hansen au numéro
153 de l'avenue Ledru-Rollin, par où se fait l’entrée. Il comporte en façade un
avant-corps en légère saillie, coiffé d'un fronton où figure une bible; foyer
protestant de J.F. devenu résidence étudiante du CROUS. PLU
coup d’œil sur l’atelier Michel Cauchard
SA, créé en 1948, fabricant de boîtes d’archives ; la boîte Cauchard est devenue
un nom commun, c’est la Rolls en la matière.
On traverse Ledru-Rollin
On aperçoit, passage Rauch, le
bestiaire de Leonor Rieti, 1990, mosaïque de pâte de verre et en grès
- l’hôtel de Mortagne, construit vers
1650 par Delisle-Mansart pour quelqu’un de la maison d’Orléans. En 1746 ,
l’hôtel du duc de Mortagne est loué à Vaucanson, inspecteur des manufactures de
soie du royaume, qui y installe ses automates (le Joueur de flûte, le Canard
digérant et le Tambourinaire), ses machines : pompe à eau, métier à tisser
automatique dont il est l’inventeur, et y mène une existence passablement libertine
avec sa belle-sœur, sa nièce et, dit-on, « la Religieuse de Diderot
».
N’a-t-on pas pris pour elle, à
travers la vitre, l’une des poupées automates ? La religieuse qui a servi de
modèle à Diderot, Suzanne Simonin, ayant perdu son procès, n’a pas pu quitter
son couvent, seule la créature de roman s’en est échappée. Mais celle-ci est apparue
si vraie aux yeux d’un lecteur, le marquis de Croismare, qu’il a pris toutes
les dispositions nécessaires pour la recueillir chez lui. D’autres ont pu
croire la voir chez Vaucanson.
Après la mort de Vaucanson, ici, le
21 novembre 1782, à 74 ans, son cabinet, légué au roi et placé sous le
patronage de l’Académie des sciences, sera ici ouvert au public, plus de cinq
cents machines, qui jointes aux machines de l’hôtel d’Aiguillon, rue de
L’université, (auj ministère de la Défense), constitueront à partir du 15 juin 1795
le siège temporaire du Conservatoire des arts et métiers (institué par la Convention nationale en
1794), avant de gagner en 1799 le bâtiment de l’ancien prieuré royal de
Saint-Martin-des-Champs. Puis les locaux seront mis gratuitement à la
disposition d’inventeurs dont, en 1814, Grégoire et sa manufacture de velours.
- Vaucanson part d’ici quand le
28/11/1748 La Popelinière
[le fermier général dont Voltaire s’inspire pour le Mondain, protecteur de Rameau et de la musique de chambre] qui a
des soupçons lui demande d’inspecter, au 59 rue de Richelieu, l’hôtel qu’il
occupe depuis 1839 « vis-à-vis la bibliothèque du roi » et plus
exactement, la chambre de sa femme, où le célèbre inventeur découvre qu’une
cheminée mobile permet au maréchal duc de Richelieu, locataire de l’appartement
contigu, de pénétrer à loisir chez sa maîtresse. Le jouet à la mode, à la Noël suivante, est une
cheminée où deux pantins se retrouvent quand on en tire le rideau.
Rue de Charonne ; au fond du
passage Josset, on entre ds passage Lhomme :
- Passage Lhomme. Passage le plus
complet aux points de vue fonctionnel, morphologique, historique et esthétique.
La cheminée de l'usine est un signal monumental important à l'échelle de
l'îlot. Suivant une règle récurrente dans le faubourg, le bâti est implanté de
la rue de Charonne (bâtiment d'origine du XVIIIe siècle implanté à l'ancien
alignement revu dans la première moitié XIXe) vers le passage Josset
(bâtiments, ateliers, usine plus récents datant de la seconde moitié du XIXe
siècle et vers 1900). Au n°8, maison donnant sur le passage, atelier de
menuiserie pour scier le bois, petit bâtiment abritant la machine à vapeur et
la cheminée d'usine de section carrée en brique construits vers 1850; atelier surélevé
partiellement d' un étage carré et transformé en logement dans la première
moitié du 20e siècle (source Inventaire général). PLU. Chaisier M. Provins en
1930.
En 1995 ou 97, Catherine Deneuve
figure dans un clip vidéo de Joe Cocker, N'oubliez jamais. Commence avec Deneuve marchant le long du viaduc des Arts ;
puis (de 1'32'' à 1'44'') passage Lhomme n°8, plaque ronde Texaco huile pour autos avec le T noir au
centre d’une étoile rouge, une pompe à essence jaune, un gros garagiste penché
à l’arrière d’une dauphine noire, un jeune mécano sort du garage en chantonnant,
et laisse tout tomber pour suivre une blonde qui passe et qui pourrait évoquer
Deneuve à l’époque des Demoiselles de
Rochefort.
- 16, rue de Charonne, chambre
syndicale ouvrière du meuble, subventionnée par la ville : elle réunit 3
fois par semaine 200 apprentis en 1891. Très beau bâtiment indus en fond de
cour. L’enquête du début de 1891, nous y montre un ouvrier actif, qui est un
« ouvrier journalier ds le système des engagements momentanés » qui
travaille pour « le meuble de haut luxe ». Secteur qui ne travaille
qu’à la commande : au Fbg, 145 patrons donnent de l’ouvrage à 4 000
ouvriers. Le nôtre gagne 80 cts/h pour ces meubles-là, tarif syndical, à raison
de 10h/j => 8F/jour, sauf dimanche. Pr les meubles ordinaires, le travail
est donné à forfait et représente environ 6,72 F/jour. Le pain est à 50 cts le
kg. Cet ouvrier possède pour 150
F d’outils, le patron ne lui devant que l’établi, les
presses et les serre-joints. Dans ces 129 F de capital financier, outre son fonds de
roulement et quelques sous à la caisse d’épargne, il y a une action de la
Moissonneuse de 60 F.
Au rang du dessous, c’est le
meuble courant ou bourgeois, dans lequel le 1er rôle est aux marchands ;
env. 7 000 ouvriers. Puis la trôle, meubles faits d’avance que l’on vend
sur charrette à bois ou le samedi sur l’av Ledru-Rollin ; env. 700
trôleurs. Flamands, Alsaciens, Allemands surtout, Wallons, Piémontais.
- 18 à 24, rue de Charonne :
Schmit et Cie, ameublements, ébénisterie, tapisserie. S’installe au n°22 en 1828,
dix ans après sa fondation par Frédéric Schmit, Luxembourgeois. Prendra le nom
de Alavoine et Piollet, Schmit et Piollet (l’ébéniste de Napoléon III) en
1874. Fabrication de mobilier, agencement général, installation boutiques,
châteaux, bateaux. Entre les 2 guerres nb agencement de bateaux dont le
paquebot Normandie. Dirigée par les 2 frères Jacques et Jean Schmit. En 39, se
replie sur Laugère (Cher). A la Libération, fait surtout du mobilier pour
ministères et scolaire. En 1948, l’usine de Charonne est vendue et l’entreprise
s’installe à St-Maur des Fossés (94), où elle est tjs, avec siège social bd
St-Germain sous le nom de « Schmit Industrie ». C’est dans cette cour
qu’est l’horloge repère de Francis Lemarque.
En face : [cour du Panier
fleuri (du nom d’un opéra-comique d’Ambroise Thomas, 1839) au 17 rue de
Charonne ; là était la boutique de J.-B. François, emballeur, directeur de
la prison de la Roquette pendant la Commune. Quand la guillotine est brûlée, le 6
avril 1871, en face de la mairie du 11e, par le 137e bataillon de la garde
nationale, les cinq dalles qui servaient d’appui à l’engin seront arrachées et
transportées là. François sera fusillé à Satory.)]
On traverse pr aller au 74, rue
du Fbg St-Antoine. dès 1835, Krieger, de Strasbourg, puis Racault, puis Damon
et Cie ; 500 ouvriers en 1880, la seule usine intégrée regroupant ts
métiers du meuble sur 2 ha de bureaux, d’ateliers, de magasins. En 1868, le
fond de la cour est fermé par un atelier et par la cage de la machine à vapeur
au-dessus desquels se dresse la cheminée d'usine ; Immeuble sur la rue du
faubourg Saint-Antoine de 5 étages carrés construit en pierre de taille, entre 1880
et 1885. PLU
Si possible on traverse sinon on
va jusqu’au
- Passage du Chantier, en regardant, à g. de
celui-ci : Immeuble à usage mixte activité et logement construit en 1891
par l'architecte Louis Salvan pour Couder (demande d'autorisation de bâtir :
B.M.O. 15 août 1891). Composé de trois travées, il se caractérise par la
superposition de trois niveaux d'activité sur rez-de-chaussée surmontés de deux
niveaux de logements. Chaque fonction est bien identifiée : les étages
d'activité affichent de grandes baies vitrées et les niveaux d'habitation
arborent l'écriture plus traditionnelle de l'immeuble de rapport. L'esthétique
composite qui en résulte n'occulte pas pour autant l'inspiration des grands
modèles parisiens. La partie basse de l'immeuble a été réaménagée par l'architecte
Jean-Michel Wilmotte en 1991 (modifications des baies et des menuiseries
notamment). Sa position, face à l'embouchure de la rue de Charonne, lui confère
en outre une grande importance dans le paysage urbain. PLU
- 5 passage du Chantier :
entre 1835 et 1852, logements et ateliers construits au nord et à l'est de la
cour lorsque celle-ci est amputée de la parcelle 52 et petit immeuble édifié
rue de Charenton ; entre 1852 et 1883, vastes ateliers édifiés passage du
chantier et rue de Charenton ; ces derniers sont transformées en école de
garçons par l'architecte Lheureux, doublée d'une école de filles par Calemard
en 1891. PLU.
Puis, à gauche jusqu’au 59 rue de
Charenton ; en 1886, Damon et Cie fait démolir et reconstruire avec
un retrait de 1, 80 m l'immeuble par l'architecte Renault, de 4 étages carrés
et un étage de comble construits en pierre avec brique en remplissage. PLU
On est en face de la rue
Moreau : -7 rue Moreau, administration de L’Ame annamite, voir sur ce blog la page « Actualisations Paris Ouvrier »
- Le 15 mai 1885, 2 ans après son
départ du 17 rue de la Roquette, Verlaine vient habiter… mais laissons la
parole à Vielé-Griffin, le poète symboliste de 20 ans son cadet, qui y arrive
par l’extrémité opposée à la nôtre : « Dépassant donc la Bastille,
lieu encore lointain à cette époque pré-métropolitaine, nous suivîmes le viaduc
du chemin de fer de Vincennes, sous les arcades duquel se blottissent encore
des boutiques et des habitations cintrées d’entresol. Mais voici qu’une voûte
s’ouvre, donnant accès à une rue ; nos indications s’en confirment ;
hardiment nous franchissons l’humble arc de triomphe et, curieux bien que peu
rassurés, nous tournons sans hésiter à gauche pour nous trouver dans une grande
cour aux larges pavés gras de lessive et de déchets alimentaires… un lavoir
laissait échapper la vapeur de son essoreuse et des gaillardes aux manches
retroussées vidaient à même le ruisseau leurs baquets d’eau bleue… bientôt nous
voici reçus par le poète. Une chambre de rez-de-chaussée, triste et nue :
deux chaises ; une table devant la fenêtre sans rideaux portait des
livres, parmi lesquels nous reconnûmes, non sans émotion, nos premières
plaquettes ; un lit, à rideaux de lustrine verte, faisait face à la
fenêtre et, l’œil fixe vers la cheminée sans glace où s’accumulaient brochures
et journaux, un mauvais portrait de Verlaine, toile nue et sans cadre, pendait
à un clou. C’était sinistre. » Ca s’appelle l’hôtel du Midi, maison plus
ou moins de passes, au n°6 de la cour St-François qui ouvre au n°5 de la rue
Moreau ; et la chambre est une espèce d’arrière salle de la buvette du
marchand de vins qu’il faut traverser pour y accéder.
En octobre, il reçoit de
Mallarmé, une enveloppe sur laquelle figure ce quatrain :
Tapi sous ton chaud macfarlane /
Ce billet, quand tu le reçois / Lis-le haut ; 6 cour Saint-François / Rue,
est-ce Moreau ? cher Verlaine.
Et la lettre arrivée à bon port,
Mallarmé suit.
A l’hiver, Verlaine a la jambe
dans une gouttière, plâtrée, et sa mère qui le veille jour et nuit en attrape
une pneumonie. Le 21 janvier 1886, elle meurt dans une chambre du 1er étage.
L’escalier est trop étroit pour qu’on puisse monter Verlaine sur une civière
afin qu’il lui donne un dernier baiser. De la même façon, le cercueil sera
descendu par la fenêtre, Verlaine ne l’a pas revue et ne sera pas à la messe
d’enterrement qui est dite dans la chapelle des Quinze-Vingts. Il va rester là
encore un an ou un an et demi après quoi il sera plus souvent à l’hôpital que
n’importe ou ailleurs : 20 séjours en 10 ans. Pour Verlaine, voir d’Alain
Buisine, Verlaine Histoire d’un corps,
Tallandier, 1995.