De Verlaine au 4ème à Verlaine tout en bas

Le prétexte en est une balade au départ de (et retour à) la librairie La Manœuvre (58, rue de la Roquette) dans le cadre du Festival Bastille Quartier Libre.
- 17, rue de la Roquette (au-dessus du bureau de La Poste), immeuble de 1870, surélevé vers 1900. Verlaine y arrive avec sa mère, jusqu’à un 4e étage (ou 5e niveau) (c'est-à-dire dans les combles avant la surélévation), début 1882, il va fêter son 38e anniv. Son vieil Art poétique, qui date de 1874 et de la prison de Mons : « De la musique avant toute chose, / Et pour cela préfère l’Impair, / Plus vague et plus soluble dans l’air, / Sans rien en lui qui pèse ou qui pose. » vient d’être publié dans le numéro du 10 novembre 1881 de Paris-moderne, créé en mars 1881, dont l’un des directeurs est le futur Courteline. Grâce à quoi, Verlaine est entré en contact avec les gens de la Nouvelle Rive Gauche, qui se disent symbolistes. Verlaine reçoit ainsi rue de la Roquette, Charles Morice, 22 ans, le « prince des jeunes éphèbes », ou Jean Moréas [26 ans] le « gentilhomme du Péloponnèse », monocle et moustache en pointe d’yatagan, qui s’en va répétant « Je suis un Baudelaire avec plus de couleur ». Moréas a décrit la scène : Mme Verlaine « accueille tout le monde avec une grâce à la fois gamine et maternelle, réédite pour la centième fois des plaisanteries d’une crudité militaire, telles que, en présentant un fauteuil : ‘Monsieur, je vous en prie et même je vous le commande, mettez ici la 17ème lettre de l’alphabet.’ Par gentillesse, Paul fait semblant d’être choqué : « Oh ! Maman ! ». Après que Moréas a déclamé du Baudelaire, Mme Verlaine bondit vers lui, lui demande de fermer les yeux et d’ouvrir la bouche et elle lui fourre « entre les dents un morceau de sucre candi énorme, qu’il doit croquer jusqu’au dernier bout de fil, sous peine d’affliger véritablement la bonne dame ; car elle affirme que c’est ‘souverain’ contre les mots de gorge et en fait elle-même une consommation copieuse ». Ils resteront à la Roquette jusqu’à la mi-1883.

On est ici sur le parcours de jogging du futur Francis Lemarque, peut-être l’auteur qui chanta le plus continûment Paris, adhérent du Club pédestre de l’Etoile rouge, section athlétisme, et participant du 1er Cross international de l’Humanité à Ivry ou Vitry, il ne se rappelle plus, le 26 février 1933.
Quand il s’entraîne dans son quartier, Lemarque a un parcours de « 3 500 pas » : de l’horloge de l’usine Schmit (au fond de la cour du n°22 rue de Charonne) par cette dernière rue, Ledru-Rollin jusqu’à la mairie, en redescendant par la rue de la Roquette et la rue de Lappe pour revenir devant le « chrono » de l’usine Schmit. On va donc faire (une partie de) son parcours à rebrousse-poils
Cette rue de la Roquette est aussi celle de la montée au Père-Lachaise depuis la Bastille : l’avenue de la République ne rejoindra, par tronçons successifs, le boulevard de Ménilmontant qu’en 1892. Par la rue de la Roquette passent donc les 100 000 personnes qui suivent le cortège de Blanqui, en 1881 ; là marchent les 60 000 qui suivent celui de Jules Vallès, en février 1885, dans lequel est visible la couronne de violettes d’un « cercle socialiste  allemand » et d’où fusent les cris de « Vive la Commune » ; des échauffourées y auront lieu comme déjà plus tôt boulevard Saint-Michel, qui feront 90 blessés dont deux graves. En 1887, gravit la pente le convoi d’Eugène Pottier, dont l’Internationale, écrite à la fin de la Commune, germe encore et ne ressurgira des poitrines du mouvement ouvrier qu’une douzaine d’années plus tard.

- Fond Cité de la Roquette : au 5, « styles Dugast », bureaux Renaissance, ISMH. Dans le Bottin de 1930, l’époque où Lemarque court : « Ch. Dugast, fabricant de sièges » et, au même n°, outre Dugast : « P. Delieux, ébénistes ; Jacques, ébéniste ; Lubac, garage pour automobiles ».


- 43-45, rue de la Roquette, la tragédienne Segond-Weber (1867-1945 ; pensionnaire en 1887, sociétaire de la Comédie Française en 1902 ; ses portraits à Carnavalet, ses robes au musée de la Mode). Sur rue, deux bâtiments faubouriens accolés élevés de deux étages carrés sur rez-de-chaussée. Lucarnes en bâtière (couvertes à 2 versants). Eléments de décor (moulures, garde-corps) XIXe mais sur un bâti sans doute plus ancien. Rochegude signale une ancienne faïencerie au n°43 (des frères Darte, qui arrive en 1795 de la rue de Charonne, et sera dirigée ensuite par Olivier, en 1807, puis transférée rue de la Fontaine-au-Roi avant de disparaître en 1825.) Porte cochère ouvrant sur une cour très profonde perpendiculaire à la rue. Ensemble très caractéristique de l'ancien faubourg tant par son ancienneté, sa mixité fonctionnelle que par sa sédimentation. PLU

- fontaine de 1846, alimentée par canal Saint-Martin, qui alimente nb fontaines publiques et maisons particulières sur abonnement.

- 38, rue Keller, domicile en 1895 de Lemoine secrétaire général de la Moissonneuse. « l'une des plus grandes coopératives de l'Europe, selon Georges Sorel, Introduction à l’économie moderne, 1903
[la Moissonneuse, 32 rue des Boulets. La plus importante coopérative de consommation parisienne est née le 14 août 1874 dans un sous-sol de moins de 7 m2, 47 rue Basfroi, de l’effort de 32 d’ouvriers, ébénistes pour la plupart. En 1894, elle comptait 19 succursales dans le faubourg : 8 épiceries, 2 boulangeries à quatre fours, 4 boucheries, 1 magasin de vêtements et de chaussures, 1 chantier de bois et charbons, 1 entrepôt de vins et alcools à Bercy, 15 chevaux dans ses écuries, 150 employés ; elle réalisait 2,5 millions de francs de chiffre d’affaires et possédait pour 252 000 francs de matériel. Elle avait atteint 17 000 membres au 1er janvier 1895. grève du personnel de la Moissonneuse en 1892. Au bout du compte, la Moissonneuse se trouvera mise en liquidation au début de 1904.]

- 36, rue Keller, « volets squelettes », Verlaine, parlant des Batignolles : « ces énormes maisons de plâtre, à cinq ou six étages, avec leurs innombrables volets gris, comme des poitrines de squelettes à plat »

- 29 rue Keller selon Hillairet, mairie du 8e (Marais, Popincourt, Fbg St-Antoine, Quinze-Vingts) de 1860 à 1865. Rue Keller, allée principale d’un marché au charbon ds années 1840, ouverte en 1856.

- 19 Immeuble de rapport construit en 1860, soit quatre ans après l'ouverture de la rue, par l'architecte Avezard et l'entrepreneur Ch. Many pour Antoine Rivoire (monogramme en fonte du propriétaire A.R. à l'entrée). La façade répond aux contraintes du lotissement et du règlement de voirie. Elle se distingue toutefois de ses voisines par une composition savante encore proche des modèles de la Monarchie de Juillet. La façade en pierre de taille comporte cinq travées et quatre étages carrés sur rez-de-chaussée et un étage en retiré. L'étage noble est signalé au centre par un "triplet vénitien" desservi par un balcon et orné de colonnes cannelées à demi-engagées cantonnant les fenêtres en plein cintre. Des refends bordent les deux travées latérales. PLU

On avance jusqu’au début de l’école
- 4 rue Keller de 1855 à 1870, locomotives Anjubault puis Corpet. Auguste Anjubault (1820-1868) est âgé de 35 ans, lorsqu'il crée en 1855, sa société de construction mécanique et machines à vapeur ; expose la même année une locomotive à l'exposition universelle, destinée à la compagnie de chemin de fer de Paris à Orsay pour la ligne de Sceaux ; oriente ensuite sa production vers des machines de chantier très demandées durant cette période de création du réseau de voies ferrées et de compagnies de chemins de fer. Plus de 121 locomotives Anjubault sont sorties de ses ateliers durant les 15 années de l'activité de son entreprise, dont qqs-unes vendues à l’export : « Ramgotty », une locomotive Anjubault de 1862 est exposée au National Rail Museum de New Delhi. Fin 1867, début 1868, il embauche le jeune ingénieur, centralien, Lucien Corpet pour diriger l'entreprise, et décède peu de temps après. Après le décès de son patron, Corpet rachète l'entreprise Anjubault et les ateliers de la rue Keller, et ouvre un nouveau registre de production de locomotives, sur lequel il recopie de sa main la production de la maison Anjubault. La rue Keller, dans le quartier de la Bastille, n'est pas d'un accès facile, du fait de sa largeur et de son encombrement, notamment par les charrettes des charbonniers. Dès 1870 il transfère, la production puis les bureaux, dans une usine plus vaste qu'il a fait construire sur un terrain jouxtant la maison bourgeoise, récemment construite, où il est domicilié, sur les collines de Charonne, 117 avenue Philippe Auguste.
- 4 à 12 rue Keller : Groupe scolaire, Francis Lemarque (alors Nathan Korb), qui y arrive en CP en 1923, connaît encore les anciens bâtiments ; les travaux commencent juste après qu’il a passé son certif, à 11 ans et demi, en 1929, pour s’achever en 1931 : architecte Louis-Hippolyte Boileau en collaboration avec E. Olombel. Les écoles sont bâties sur les branches d'une équerre, comportant à l'origine, l'école des filles dans l'une des branches, et l'école des garçons dans l'autre. Le rez-de-chaussée contient les préaux, ateliers, réfectoires. Les trois étages suivants, les classes et le quatrième en retrait, les logements et salles de dessin. La construction en béton armé, très rationnelle, permet d'éclairer les classes par de grandes baies vitrées. La façade est décorée de grès cérame couleur or entre les nervures de béton armé et de grès émaillé pour les encadrements des fenêtres. Entre chaque classe s'élève une colonne de ciment gris. D'une grande rigueur, le plan répond à un souci de rationalité et de fonctionnalité maximales dans la lignée des équipements réalisés dans l'entre-deux guerres par les frères Perret ou François Le Coeur. Par sa hauteur, son plan, la rigidité de sa façade, il anticipe d'une vingtaine d'années sur l'architecture des collèges industrialisés de l'après-guerre. PLU

On revient sur nos pas pour prendre le passage Bullourde ; on tombe, un peu à gauche ds le passage Ch. Dallery, sur le Foyer de l’Ouvrier :
- Ancien "Foyer ouvrier" construit en 1914 en brique et pierre offrant l'exemple d'une décoration très réussie de la façade à partir de matériaux peu onéreux et faisant écho aux premières constructions sociales à Paris. Le rez-de-chaussée est traité en bossage rustique. Les baies vont par deux et sont couronnées par un épais bandeau qui court sur toute la façade. Le reste de la construction est en brique selon l'usage pour les constructions sociales.
Les fenêtres des premier et deuxième étages sont couvertes d'un linteau de pierre. Les niveaux supérieurs sont particulièrement mis en valeur. Les fenêtres du quatrième étage sont surmontées d'un avant-toit alors que la baie centrale est légèrement plus haute et forme une lucarne à ferme débordante. Au-dessus vient un étage de combles. En mitoyenneté, ancien temple protestant construit en 1882 par W. Hansen au numéro 153 de l'avenue Ledru-Rollin, par où se fait l’entrée. Il comporte en façade un avant-corps en légère saillie, coiffé d'un fronton où figure une bible; foyer protestant de J.F. devenu résidence étudiante du CROUS. PLU

coup d’œil sur l’atelier Michel Cauchard SA, créé en 1948, fabricant de boîtes d’archives ; la boîte Cauchard est devenue un nom commun, c’est la Rolls en la matière.

On traverse Ledru-Rollin

On aperçoit, passage Rauch, le bestiaire de Leonor Rieti, 1990, mosaïque de pâte de verre et en grès
- l’hôtel de Mortagne, construit vers 1650 par Delisle-Mansart pour quelqu’un de la maison d’Orléans. En 1746 , l’hôtel du duc de Mortagne est loué à Vaucanson, inspecteur des manufactures de soie du royaume, qui y installe ses automates (le Joueur de flûte, le Canard digérant et le Tambourinaire), ses machines : pompe à eau, métier à tisser automatique dont il est l’inventeur, et y mène une existence passablement libertine avec sa belle-sœur, sa nièce et, dit-on, « la Religieuse de Diderot ».
N’a-t-on pas pris pour elle, à travers la vitre, l’une des poupées automates ? La religieuse qui a servi de modèle à Diderot, Suzanne Simonin, ayant perdu son procès, n’a pas pu quitter son couvent, seule la créature de roman s’en est échappée. Mais celle-ci est apparue si vraie aux yeux d’un lecteur, le marquis de Croismare, qu’il a pris toutes les dispositions nécessaires pour la recueillir chez lui. D’autres ont pu croire la voir chez Vaucanson.
Après la mort de Vaucanson, ici, le 21 novembre 1782, à 74 ans, son cabinet, légué au roi et placé sous le patronage de l’Académie des sciences, sera ici ouvert au public, plus de cinq cents machines, qui jointes aux machines de l’hôtel d’Aiguillon, rue de L’université, (auj ministère de la Défense), constitueront à partir du 15 juin 1795 le siège temporaire du Conservatoire des arts et métiers (institué par la Convention nationale en 1794), avant de gagner en 1799 le bâtiment de l’ancien prieuré royal de Saint-Martin-des-Champs. Puis les locaux seront mis gratuitement à la disposition d’inventeurs dont, en 1814, Grégoire et sa manufacture de velours.
- Vaucanson part d’ici quand le 28/11/1748 La Popelinière [le fermier général dont Voltaire s’inspire pour le Mondain, protecteur de Rameau et de la musique de chambre] qui a des soupçons lui demande d’inspecter, au 59 rue de Richelieu, l’hôtel qu’il occupe depuis 1839 « vis-à-vis la bibliothèque du roi » et plus exactement, la chambre de sa femme, où le célèbre inventeur découvre qu’une cheminée mobile permet au maréchal duc de Richelieu, locataire de l’appartement contigu, de pénétrer à loisir chez sa maîtresse. Le jouet à la mode, à la Noël suivante, est une cheminée où deux pantins se retrouvent quand on en tire le rideau.

Rue de Charonne ; au fond du passage Josset, on entre ds passage Lhomme :
- Passage Lhomme. Passage le plus complet aux points de vue fonctionnel, morphologique, historique et esthétique. La cheminée de l'usine est un signal monumental important à l'échelle de l'îlot. Suivant une règle récurrente dans le faubourg, le bâti est implanté de la rue de Charonne (bâtiment d'origine du XVIIIe siècle implanté à l'ancien alignement revu dans la première moitié XIXe) vers le passage Josset (bâtiments, ateliers, usine plus récents datant de la seconde moitié du XIXe siècle et vers 1900). Au n°8, maison donnant sur le passage, atelier de menuiserie pour scier le bois, petit bâtiment abritant la machine à vapeur et la cheminée d'usine de section carrée en brique construits vers 1850; atelier surélevé partiellement d' un étage carré et transformé en logement dans la première moitié du 20e siècle (source Inventaire général). PLU. Chaisier M. Provins en 1930.
En 1995 ou 97, Catherine Deneuve figure dans un clip vidéo de Joe Cocker, N'oubliez jamais. Commence avec Deneuve marchant le long du viaduc des Arts ; puis (de 1'32'' à 1'44'') passage Lhomme n°8, plaque ronde Texaco huile pour autos avec le T noir au centre d’une étoile rouge, une pompe à essence jaune, un gros garagiste penché à l’arrière d’une dauphine noire, un jeune mécano sort du garage en chantonnant, et laisse tout tomber pour suivre une blonde qui passe et qui pourrait évoquer Deneuve à l’époque des Demoiselles de Rochefort.

- 16, rue de Charonne, chambre syndicale ouvrière du meuble, subventionnée par la ville : elle réunit 3 fois par semaine 200 apprentis en 1891. Très beau bâtiment indus en fond de cour. L’enquête du début de 1891, nous y montre un ouvrier actif, qui est un « ouvrier journalier ds le système des engagements momentanés » qui travaille pour « le meuble de haut luxe ». Secteur qui ne travaille qu’à la commande : au Fbg, 145 patrons donnent de l’ouvrage à 4 000 ouvriers. Le nôtre gagne 80 cts/h pour ces meubles-là, tarif syndical, à raison de 10h/j => 8F/jour, sauf dimanche. Pr les meubles ordinaires, le travail est donné à forfait et représente environ 6,72 F/jour. Le pain est à 50 cts le kg. Cet ouvrier possède pour 150 F d’outils, le patron ne lui devant que l’établi, les presses et les serre-joints. Dans ces 129 F de capital financier, outre son fonds de roulement et quelques sous à la caisse d’épargne, il y a une action de la Moissonneuse de 60 F.
Au rang du dessous, c’est le meuble courant ou bourgeois, dans lequel le 1er rôle est aux marchands ; env. 7 000 ouvriers. Puis la trôle, meubles faits d’avance que l’on vend sur charrette à bois ou le samedi sur l’av Ledru-Rollin ; env. 700 trôleurs. Flamands, Alsaciens, Allemands surtout, Wallons, Piémontais.

- 18 à 24, rue de Charonne : Schmit et Cie, ameublements, ébénisterie, tapisserie. S’installe au n°22 en 1828, dix ans après sa fondation par Frédéric Schmit, Luxembourgeois. Prendra le nom de Alavoine et Piollet, Schmit et Piollet (l’ébéniste de Napoléon III) en 1874. Fabrication de mobilier, agencement général, installation boutiques, châteaux, bateaux. Entre les 2 guerres nb agencement de bateaux dont le paquebot Normandie. Dirigée par les 2 frères Jacques et Jean Schmit. En 39, se replie sur Laugère (Cher). A la Libération, fait surtout du mobilier pour ministères et scolaire. En 1948, l’usine de Charonne est vendue et l’entreprise s’installe à St-Maur des Fossés (94), où elle est tjs, avec siège social bd St-Germain sous le nom de « Schmit Industrie ». C’est dans cette cour qu’est l’horloge repère de Francis Lemarque.

En face : [cour du Panier fleuri (du nom d’un opéra-comique d’Ambroise Thomas, 1839) au 17 rue de Charonne ; là était la boutique de J.-B. François, emballeur, directeur de la prison de la Roquette pendant la Commune. Quand la guillotine est brûlée, le 6 avril 1871, en face de la mairie du 11e, par le 137e bataillon de la garde nationale, les cinq dalles qui servaient d’appui à l’engin seront arrachées et transportées là. François sera fusillé à Satory.)]

On traverse pr aller au 74, rue du Fbg St-Antoine. dès 1835, Krieger, de Strasbourg, puis Racault, puis Damon et Cie ; 500 ouvriers en 1880, la seule usine intégrée regroupant ts métiers du meuble sur 2 ha de bureaux, d’ateliers, de magasins. En 1868, le fond de la cour est fermé par un atelier et par la cage de la machine à vapeur au-dessus desquels se dresse la cheminée d'usine ; Immeuble sur la rue du faubourg Saint-Antoine de 5 étages carrés construit en pierre de taille, entre 1880 et 1885. PLU

Si possible on traverse sinon on va jusqu’au

 - Passage du Chantier, en regardant, à g. de celui-ci : Immeuble à usage mixte activité et logement construit en 1891 par l'architecte Louis Salvan pour Couder (demande d'autorisation de bâtir : B.M.O. 15 août 1891). Composé de trois travées, il se caractérise par la superposition de trois niveaux d'activité sur rez-de-chaussée surmontés de deux niveaux de logements. Chaque fonction est bien identifiée : les étages d'activité affichent de grandes baies vitrées et les niveaux d'habitation arborent l'écriture plus traditionnelle de l'immeuble de rapport. L'esthétique composite qui en résulte n'occulte pas pour autant l'inspiration des grands modèles parisiens. La partie basse de l'immeuble a été réaménagée par l'architecte Jean-Michel Wilmotte en 1991 (modifications des baies et des menuiseries notamment). Sa position, face à l'embouchure de la rue de Charonne, lui confère en outre une grande importance dans le paysage urbain. PLU

- 5 passage du Chantier : entre 1835 et 1852, logements et ateliers construits au nord et à l'est de la cour lorsque celle-ci est amputée de la parcelle 52 et petit immeuble édifié rue de Charenton ; entre 1852 et 1883, vastes ateliers édifiés passage du chantier et rue de Charenton ; ces derniers sont transformées en école de garçons par l'architecte Lheureux, doublée d'une école de filles par Calemard en 1891. PLU.

Puis, à gauche jusqu’au 59 rue de Charenton ; en 1886, Damon et Cie fait démolir et reconstruire avec un retrait de 1, 80 m l'immeuble par l'architecte Renault, de 4 étages carrés et un étage de comble construits en pierre avec brique en remplissage. PLU

On est en face de la rue Moreau : -7 rue Moreau, administration de L’Ame annamite, voir sur ce blog la page « Actualisations Paris Ouvrier »
 
- Le 15 mai 1885, 2 ans après son départ du 17 rue de la Roquette, Verlaine vient habiter… mais laissons la parole à Vielé-Griffin, le poète symboliste de 20 ans son cadet, qui y arrive par l’extrémité opposée à la nôtre : « Dépassant donc la Bastille, lieu encore lointain à cette époque pré-métropolitaine, nous suivîmes le viaduc du chemin de fer de Vincennes, sous les arcades duquel se blottissent encore des boutiques et des habitations cintrées d’entresol. Mais voici qu’une voûte s’ouvre, donnant accès à une rue ; nos indications s’en confirment ; hardiment nous franchissons l’humble arc de triomphe et, curieux bien que peu rassurés, nous tournons sans hésiter à gauche pour nous trouver dans une grande cour aux larges pavés gras de lessive et de déchets alimentaires… un lavoir laissait échapper la vapeur de son essoreuse et des gaillardes aux manches retroussées vidaient à même le ruisseau leurs baquets d’eau bleue… bientôt nous voici reçus par le poète. Une chambre de rez-de-chaussée, triste et nue : deux chaises ; une table devant la fenêtre sans rideaux portait des livres, parmi lesquels nous reconnûmes, non sans émotion, nos premières plaquettes ; un lit, à rideaux de lustrine verte, faisait face à la fenêtre et, l’œil fixe vers la cheminée sans glace où s’accumulaient brochures et journaux, un mauvais portrait de Verlaine, toile nue et sans cadre, pendait à un clou. C’était sinistre. » Ca s’appelle l’hôtel du Midi, maison plus ou moins de passes, au n°6 de la cour St-François qui ouvre au n°5 de la rue Moreau ; et la chambre est une espèce d’arrière salle de la buvette du marchand de vins qu’il faut traverser pour y accéder.
En octobre, il reçoit de Mallarmé, une enveloppe sur laquelle figure ce quatrain :
Tapi sous ton chaud macfarlane / Ce billet, quand tu le reçois / Lis-le haut ; 6 cour Saint-François / Rue, est-ce Moreau ? cher Verlaine.
Et la lettre arrivée à bon port, Mallarmé suit.
A l’hiver, Verlaine a la jambe dans une gouttière, plâtrée, et sa mère qui le veille jour et nuit en attrape une pneumonie. Le 21 janvier 1886, elle meurt dans une chambre du 1er étage. L’escalier est trop étroit pour qu’on puisse monter Verlaine sur une civière afin qu’il lui donne un dernier baiser. De la même façon, le cercueil sera descendu par la fenêtre, Verlaine ne l’a pas revue et ne sera pas à la messe d’enterrement qui est dite dans la chapelle des Quinze-Vingts. Il va rester là encore un an ou un an et demi après quoi il sera plus souvent à l’hôpital que n’importe ou ailleurs : 20 séjours en 10 ans. Pour Verlaine, voir d’Alain Buisine, Verlaine Histoire d’un corps, Tallandier, 1995.